Etat des lieux, défis et perspectives de renforcement de la protection sociale en Côte d’IvoireCNPS et 0,3% par les compagnies d’assurance privée. Il est à noter que, dans le cas de la CNPS,l’assurance maladie se limite à la prise en charge des frais de soins médicaux liés à l’accouchement(sous la branche des prestations familiales) et des frais relatifs aux accidents de travail et auxmaladies professionnelles. Les mutuelles communautaires sont très peu développées en Côted’Ivoire, en comparaison des pays comme le Bénin, le Mali et le Sénégal. La Côte d’Ivoire est ainsiun des pays de la sous-région où la contribution des paiements directs des ménages (ou « out ofpocket payments ») aux DTS est la plus élevée. Parmi les pays de la CEDEAO, seules la Guinéeet la Sierra Leone présentaient une contribution des ménages plus importante selon les donnéesde la Banque Mondiale de 2008 (Figure 4.2). Selon l’ENV de 2008, à peine 8% des ménagesont bénéficié d’une prise en charge partielle ou intégrale de leurs frais de santé, que ce soit parune assurance, des parents, l’Etat, une ONG ou autre. Par ailleurs, cette prise en charge est trèsinégalitaire : elle ne bénéficie qu’à 5,2% des ménages appartenant au quintile le plus pauvre contre13,5% des ménages du quintile le plus riche (Banque Mondiale, 2010b).Figure 4.2 Dépenses de santé par sources de financement (%), 2008Sources : CNS 2007-2008 (MSHP, 2010); Banque Mondiale, World Development Indicators, pour les autres pays.Les taux d’utilisation des services de santé sont faibles. La revue sectorielle de la santé a montréque le taux de fréquentation des services sanitaires publics reste un des plus faibles d’Afriquede l’Ouest. Pour les consultations curatives dans les établissements publics, tous âges confondus, lamoyenne de fréquentation a varié de 0,16 à 0,21 entre 2001 et 2008, alors que l’OMS recommandeun taux de 1, c’est-à-dire en moyenne un contact par an par habitant. Ce taux de fréquentationvarie énormément d’une région à l’autre, de 0,006 dans la Région des Montagnes (2001) à 0,58dans la Région du N’Zi Comoé (2003), en raison probablement des inégalités dans la répartitiongéographique des établissements sanitaires et du personnel de santé, ainsi que des disparités dansles taux de pauvreté par régions (Tableau 3.4). Le Chapitre 3 a déjà mis en relief les faibles taux detraitement des maladies chez les enfants, notamment pour le paludisme, qui est la première causede mortalité infanto-juvénile, ainsi que les faibles taux d’accouchement en établissements sanitaires.Environ 66% des dépenses de santé des ménages s’effectuent dans les officines (pharmaciesprivées, vendeurs informels, etc.). Cela confirme que les ménages dépensent leur argent plutôtdans les pharmacies, et moins dans les structures de santé publiques, qui restent peu utilisées.La faible qualité des services publics se caractérise notamment par les ruptures de stocksde médicaments qui obligent les patients à recourir aux pharmacies privées beaucoup plus chères.Tout le système public d’acquisition et de distribution de médicaments a connu des perturbationsdu fait des dettes des établissements sanitaires à l’égard de la Pharmacie de Santé Publique (PSP)59
Etat des lieux, défis et perspectives de renforcement de la protection sociale en Côte d’Ivoireet des dettes de celle-ci auprès de ses fournisseurs. Selon la revue sectorielle, seulement 20% desmédicaments proviennent de la PSP et donc du secteur public, et en janvier 2009, le taux derupture de médicaments était de 35% (Banque Mondiale, 2010b).Les coûts constituent une importante barrière à l’accès, surtout pour les plus pauvres.L’importance du facteur coût est mise en évidence par des données de l’ENV de 2008 quimontrent que la part des ménages du premier quintile ayant eu des dépenses sanitaires dans lestrois mois précédant l’enquête (56,5%) était moindre que celle du cinquième quintile (69,3%).Notons que globalement, environ 70% des dépenses de santé des ménages sont consacrées àl’achat de médicaments, quelque soit le quintile. Compte tenu des ruptures de stocks dans lesstructures sanitaires publiques, les patients, y compris les plus pauvres, sont obligés de recouriraux pharmacies privées (en moyenne 42% plus chères), aux vendeurs de la rue ou aux guérisseurstraditionnels (les médicaments traditionnels constituant 13% des dépenses de santé des ménages).En ce qui concerne les consultations médicales, l’ENV a trouvé que les plus riches (du cinquièmequintile) consultaient plus que les plus défavorisés du premier quintile (16% contre 11%). Parmi ceuxqui ne consultent pas, 58% attribuent ceci au coût estimé trop élevé, 9% à l’éloignement, et 14%au fait que la consultation n’est pas jugée nécessaire. Par ailleurs, les plus pauvres ont davantagerecours aux guérisseurs traditionnels que les plus riches (18% contre 6%) et se rendent beaucoupmoins chez le médecin (27% contre 52%). Les données de la MICS de 2006 confirment que lespauvres ont une fréquentation des services de santé généralement plus faible comparée au quintilele plus riche. Par exemple, pour les infections respiratoires aiguës, les enfants des ménages lesplus pauvres ont trois fois moins de chance de recourir à une consultation par rapport aux enfantsdu quintile le plus riche.De plus, la distribution géographique des ressources, concentrées dans les villes, aboutit àun système de soins particulièrement défavorable aux pauvres, qui sont concentrés dans leurécrasante majorité en milieu rural. Le personnel de santé est fortement concentré dans lesgrandes villes, avec 60% du personnel dans la seule région des Lagunes (Abidjan), régionqui abrite également 13% des structures sanitaires publiques, dont 11 des 13 établissementspublics nationaux. Tandis qu’il y a un médecin pour 5695 habitants au niveau national, cette ratioest d’un médecin pour 20 000 habitants en excluant Abidjan. Seulement 44% de la populationvit à moins de 5 km d’un établissement sanitaire, tandis que 27% vit à une distance de 5 à 15 km,et 29% à plus de 15 km (Banque Mondiale, 2010b).Selon l’ENV de 2008, environ 18% des ménages ont subi des dépenses dites « catastrophiques »,définies par l’OMS comme des dépenses en santé supérieures à 40% des dépensesnon-alimentaires (ou de subsistance). La proportion des ménages confrontés à des dépensesde santé catastrophiques est beaucoup plus élevée parmi les ménages les plus pauvres(Figure 4.3). De même, le pourcentage des ménages ayant eu des dépenses catastrophiquesen santé varie en fonction de la provenance géographique (par exemple, les dépenses catastrophiquesconcernent presque 40% des ménages en Moyen Cavally et autour de 8% dansla Région des Lacs), de la présence d’une personne âgée (28,75% des ménages avec personneâgée ont eu des dépenses catastrophiques), et du sexe du chef de ménage (35 % des ménagesgérés par une femme ont été affectés par des dépenses catastrophiques contre 14% des ménagesdont le chef est un homme).Tous ces constats démontrent le manque de protection sociale contre le risque maladie.Lorsque les ménages doivent soudainement faire face à un besoin de financement qui excèdeleur capacité financière (de part leurs propres ressources, avec des appuis de parents ou amis,ou via des emprunts supportables), ils atteignent alors un niveau de dépenses catastrophique,qui risquent de les appauvrir. La fréquence des dépenses catastrophiques et l’importance desdépenses directes des ménages au point de prestation des services (96% de toutes les dépensesde santé des ménages) indiquent le faible niveau de protection sociale contre le risque maladie.En effet, les mécanismes d’assurance et de prépaiement bénéficient à une partie infime de lapopulation, limités essentiellement aux fonctionnaires, aux employés du secteur privé formel et en60
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