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Antonio<br />
Sylvia accompagne Priscilla se coucher. Ma petite fille est gaie et réclame une<br />
histoire, j’aime l’entendre supplier sa maman qui finit toujours par céder. Assis dans<br />
le salon, j’écoute la douce voix de Sylvia pendant un moment, puis <strong>je</strong> descends à la<br />
cave. Je ne le trouve pas tout de suite et <strong>je</strong> me demande si Sylvia n’est pas venue le<br />
récupérer avant moi, quand, soulagé, j’aperçois enfin l’étui du fusil, couvert de<br />
poussière, posé sur l’armoire de métal gris. Je l’attrape et <strong>je</strong> remonte.<br />
– Où étais-tu passé ? demande Sylvia que <strong>je</strong> n’ai pas entendue approcher.<br />
Je réponds : « À la cave », et <strong>je</strong> continue à astiquer le canon du fusil avec du<br />
Miror, sur la table de la cuisine. J’ai étendu un vieux journal pour ne pas salir.<br />
J’ajoute, en levant les yeux vers elle :<br />
– Il faut que <strong>je</strong> le nettoie, il y a si longtemps que <strong>je</strong> ne m’en suis pas servi.<br />
Elle se sert une tisane, s’assied en face de moi et m’observe sans prononcer un<br />
mot.<br />
Incapables d’en parler devant Priscilla qui ne nous avait pas lâchés de la <strong>soir</strong>ée,<br />
nous n’avons pas encore pu évoquer la libération de Demay. À quoi bon le faire<br />
maintenant ? Nettoyer le fusil devant elle devrait suffire à nous comprendre.<br />
Pourtant, après de longues minutes de silence, elle demande d’une voix presque<br />
tremblante :<br />
– Tu es sûr d’y arriver ?<br />
– <strong>Ce</strong> fumier est libre maintenant. Il n’en profitera pas longtemps, crois-moi. Ils<br />
vont regretter de l’avoir laissé sortir.<br />
Je m’attaque au canon de l’arme avec une petite brosse, des copeaux de rouille en<br />
sortent et tombent sur le carrelage. J’interviens avant qu’elle n’attrape le balai :<br />
– Je nettoierai.<br />
Elle se rassied, alors que <strong>je</strong> préférerais qu’elle me laisse seul, et se contente de<br />
me regarder en train de démonter le fusil.<br />
– Il fonctionne toujours ? demande-t-elle.<br />
– Oui.<br />
Qu’avons-nous à nous dire de plus ? Mais elle poursuit :<br />
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