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Antonio<br />
Sylvia est dans la cuisine en train de terminer la <strong>vais</strong>selle à la main, car « à nous<br />
trois, a-t-elle dit un jour, il n’y a plus grand-chose à faire ». Elle n’utilise plus la<br />
machine à laver. Sylvia n’a que trente-cinq ans mais elle en paraît bien plus.<br />
Désormais elle est de ces femmes à qui il est impossible de donner un âge véritable.<br />
Bizarrement, une mèche blanche pousse sur le devant de son front. Elle est apparue<br />
au réveil, le lendemain de notre retour du Portugal. Pendant plusieurs jours, <strong>je</strong> n’en<br />
ai pas parlé dans l’espoir qu’elle l’effacerait d’un coup de teinture. Mais un <strong>soir</strong>, elle<br />
a précédé ma question.<br />
– Tu as vu cette mèche, Antonio ? Je la garderai tant que tu n’auras pas respecté<br />
ta promesse. Hein, Antonio, tu te souviens de ta promesse ?<br />
Elle s’était exprimée en portugais, ce qu’elle ne faisait jamais.<br />
– <strong>Ce</strong>tte mèche, elle n’est pas arrivée par hasard. C’est un signe, crois-moi.<br />
J’a<strong>vais</strong> répondu dans notre langue natale :<br />
– Je <strong>tuer</strong>ai ce type, Sylvia. Je te l’ai promis. <strong>Ce</strong>la prendra le temps qu’il faudra,<br />
mais <strong>je</strong> le ferai.<br />
Et j’a<strong>vais</strong> même ajouté :<br />
– J’en ai autant besoin que toi.<br />
J’a<strong>vais</strong> menti, mais cette femme que j’aimais tant avait besoin d’y croire.<br />
C’étaient les seuls mots que j’a<strong>vais</strong> pu trouver ce <strong>soir</strong>-là pour ralentir sa lente<br />
agonie.<br />
Nous ne faisons plus l’amour et nous ne nous touchons plus. À peine parfois, par<br />
mégarde, m’effleure-t-elle. Mais <strong>je</strong> sais que nous nous aimons, peut-être même plus<br />
qu’avant.<br />
– Où étais-tu passé ? m’interroge Sylvia sans me regarder, avant d’ajouter :<br />
Priscilla est déjà montée se coucher.<br />
Pourquoi cette question, à nouveau, alors que <strong>je</strong> sors tous les <strong>soir</strong>s, même les<br />
jours de pluie ? Pourtant, chaque fois que <strong>je</strong> rentre, elle me demande où j’étais<br />
passé, comme si elle s’attendait à ce que <strong>je</strong> réponde que <strong>je</strong> viens de tenir ma<br />
promesse, alors qu’elle n’en a plus jamais parlé. Je ressens sa déception au plus<br />
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