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Ce soir je vais tuer l'assassin - Jacques Expert

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Sylvia<br />

Dans la voiture, <strong>je</strong> demande à Antonio de me déposer à l’hôpital. Il s’en étonne à<br />

peine, peut-être même en est-il soulagé. Je n’ai pas envie de passer la journée avec<br />

lui, à ressasser ce que nous venons de vivre. Que pourrions-nous nous dire de plus,<br />

si ce n’est exprimer jusqu’à saturation le dégoût que m’inspire le tueur de Victor ?<br />

Lui aussi, sans doute, a envie de rester seul, à voir comment il est passé à l’orange<br />

cette fois.<br />

– Sois prudent !<br />

– Je suis prudent.<br />

– Tu es passé au rouge.<br />

– À l’orange ! Et il n’y avait personne.<br />

– Nous ne sommes plus pressés, maintenant. Ne conduis pas comme un fou.<br />

– N’importe quoi.<br />

– Nous n’allons quand même pas nous disputer alors qu’on vient d’arrêter<br />

l’<strong>assassin</strong> de Victor.<br />

Je lui prends la main, la caresse, et <strong>je</strong> me lance :<br />

– Alors ?<br />

Je sens son trouble. Il tente de retirer sa main mais <strong>je</strong> la retiens et j’insiste :<br />

– Parle-moi, Antonio.<br />

Il s’arrête sur le bas-côté. Enfin, il m’attire à lui et <strong>je</strong> me laisse faire, posant la<br />

tête sur son épaule. Il y a si longtemps que nous n’avons pas été aussi proches. Je<br />

reconnais son odeur que j’aime tant, et <strong>je</strong> réalise que cela fait des mois que <strong>je</strong> ne<br />

m’en suis pas enivrée. Je ferme les yeux pour l’écouter. Il raconte le mépris qui l’a<br />

envahi, la haine qui l’a submergé, les mots qu’il n’a pas su dire. Il ajoute qu’il a été<br />

horrifié, que, à un moment, il a voulu fuir. Il me confie qu’il est soulagé et un peu<br />

perdu. Il traite Demay de bête, d’animal repoussant.<br />

– À la fin, <strong>je</strong> ne pou<strong>vais</strong> plus le regarder. Il était tellement repoussant dans sa<br />

crasse et sa pisse. Et puis <strong>je</strong> n’arri<strong>vais</strong> pas à réaliser que c’était lui. Que c’était fini.<br />

Il dit « Demay » et non « l’<strong>assassin</strong> de Victor ». Je n’aime pas ça, et soudain, <strong>je</strong><br />

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