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Jocelyne n’a pas été longue à nous apporter les cafés, et <strong>je</strong> vois, à son attitude,<br />
qu’elle est surprise de me trouver là, comme une présence incongrue dans ma<br />
salopette bleue, frappée du sigle « Gaboriaud SA ».<br />
– Vous tirerez la porte derrière vous, Jocelyne. Merci. Prends du sucre, Antonio.<br />
– Merci.<br />
D’habitude, j’en prends deux, mais là un seul suffira. J’attends qu’il commence à<br />
boire avant d’avaler mon café d’une traite. En reposant la tasse, la cuillère<br />
s’échappe et tombe sur la moquette grise, laissant une petite tache brune. Il la voit,<br />
mais ne dit rien.<br />
– J’ai beaucoup pensé à notre conversation d’hier <strong>soir</strong>, commence-t-il.<br />
Va-t-il maintenant me reprocher de l’avoir soupçonné ? Je ne voudrais pas devoir<br />
m’excuser encore. Je réalise à quel point j’ai été stupide. Comment ai-<strong>je</strong> été assez<br />
idiot pour imaginer que, lui, le seul homme auquel <strong>je</strong> peux me confier, était<br />
l’<strong>assassin</strong> de mon fils ! Quand <strong>je</strong> pense que j’a<strong>vais</strong> décidé de le <strong>tuer</strong>, j’en ai encore<br />
des frissons, et j’éprouve de la honte, tellement notre complicité est forte désormais.<br />
Mais il semble l’avoir oublié, car il poursuit :<br />
– J’ai travaillé pour toi, Antonio.<br />
Surpris, <strong>je</strong> demande :<br />
– Travaillé pour moi ?<br />
– Oui.<br />
Et il sort un papier qu’il lit à haute voix :<br />
– C’est l’adresse du fumier. Cité « Les Alouettes », appartement 18, bâtiment C, à<br />
Plaisir. C’est là qu’il est planqué, chez sa poule.<br />
– Les flics et mon avocat n’ont jamais voulu me donner sa nouvelle adresse.<br />
Comment avez-vous fait ?<br />
– À toi d’agir, maintenant, se contente-t-il de dire, et il reprend le papier, se lève<br />
pour s’asseoir sur un coin du bureau, face à moi. Antonio, <strong>je</strong> tiens à t’aider. <strong>Ce</strong> que<br />
tu m’as dit hier <strong>soir</strong> m’a bouleversé. À ta place, j’aimerais pouvoir compter sur un<br />
ami. Et tu peux compter sur moi.<br />
– Merci, <strong>je</strong> ne l’oublierai pas, monsieur Boulard, dis-<strong>je</strong> dans un murmure.<br />
– Tu te souviens de l’adresse ?<br />
– Plaisir, cité « Les Alouettes », appartement 18, bâtiment...<br />
– C. Bâtiment C.<br />
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