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Quand <strong>je</strong> suis arrivé chez moi, j’a<strong>vais</strong> presque oublié Rodriguez, et <strong>je</strong> m’en<br />
voulais seulement d’avoir bêtement paniqué. Je me suis dit qu’à l’avenir il faudrait<br />
que <strong>je</strong> sois davantage maître de mes émotions. <strong>Ce</strong> <strong>soir</strong>-là, j’ai bien profité de mes<br />
gosses qui se sont précipités vers moi.<br />
– Papa, papa ! a crié Arthur.<br />
Il fallait toujours que Christine tempère leur joie, et elle a déclaré :<br />
– À table, maintenant. On a assez attendu votre père. Le jour où il arrivera à<br />
l’heure, les poules auront des dents !<br />
– Cot ! Cot ! s’est amusée Amandine.<br />
J’ai expliqué à Christine que j’a<strong>vais</strong> raccompagné un collègue.<br />
– Et il s’appelle comment celui-là ? Ou celle-là, peut-être ?<br />
Encore cette jalousie stupide.<br />
– Elle s’appelle Antonio. Antonio Rodriguez.<br />
Elle s’est étonnée :<br />
– C’est pas possible que tu aies raccompagné ce type-là !<br />
– Pourquoi, tu le connais ? Tu connais Antonio Rodriguez ?<br />
J’ai prononcé « Antonio Rodriguez » à la portugaise, histoire de faire rigoler les<br />
gosses. Ça n’a pas manqué, et Kévin a repris en écho : « Antonio Rodriguez !<br />
Antonio Rodriguez ! » Mais le petit n’a pas fait rire Christine.<br />
– Oui, <strong>je</strong> le connais, figure-toi. C’est celui qui a perdu son fils, renversé par un<br />
chauffard qui s’est enfui, le salaud. Parce que c’est bien un salaud, celui-là, hein,<br />
Jean-Pierre ?<br />
J’ai répliqué, parfaitement maître de moi :<br />
– Je vois que madame suit l’actualité !<br />
– Plus que tu ne crois, Jean-Pierre. Plus que tu ne crois !<br />
Elle était blême.<br />
– Tu ne devrais pas t’approcher de ces gens-là.<br />
– Et pourquoi, s’il te plaît ? C’est un collègue.<br />
– Il porte la poisse. Ne l’approche pas. Conseil d’amie, ou plutôt d’épouse,<br />
répondit-elle sans hésiter.<br />
– N’importe quoi !<br />
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