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Ce soir je vais tuer l'assassin - Jacques Expert

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Et puis, un jour, en rentrant d’Eurodisney, où entre parenthèses <strong>je</strong> m’étais<br />

particulièrement ennuyée (<strong>je</strong> déteste attendre des heures pour une attraction de<br />

quelques minutes), <strong>je</strong> lui a<strong>vais</strong> montré les traces rouges sur la carrosserie, afin de<br />

guetter sa réaction. Elle avait été à la hauteur de mes attentes, ce salaud me mentait<br />

encore une fois. Dès lors, <strong>je</strong> ne l’a<strong>vais</strong> plus lâché tant qu’il ne signalerait pas<br />

l’accident à l’assurance. Je devinais pourquoi il cherchait à gagner du temps. Aussi,<br />

plus il repoussait le moment qui aurait pu le faire plonger, plus <strong>je</strong> m’obstinais. Je le<br />

harcelais pour le seul plaisir de l’emmerder, <strong>je</strong> m’amusais de ses hésitations et<br />

parfois de sa peur, si palpable. Mais, <strong>je</strong> dois le reconnaître, d’abord j’ai été soulagée<br />

de constater qu’il était de nouveau passé entre les gouttes. Que serais-<strong>je</strong> devenue<br />

avec mes trois gosses et un mari en taule ? Désormais, <strong>je</strong> m’en moque.<br />

J’ai un dossier en béton et, cette nuit, j’ai envie de le lui balancer au visage<br />

tellement <strong>je</strong> n’ai pas supporté son air triomphant. Je me fiche pas mal qu’un<br />

imbécile plonge à sa place, mais <strong>je</strong> ne veux pas qu’il se croie définitivement à<br />

l’abri. <strong>Ce</strong> <strong>soir</strong>, <strong>je</strong> veux qu’il sache que <strong>je</strong> sais.<br />

Je n’accepterai jamais qu’il s’en tire aussi facilement, alors <strong>je</strong> le secoue. Il<br />

grogne, demande ce qui se passe, quelle heure il est.<br />

– L’heure de te dire ce que <strong>je</strong> sais.<br />

Je refuse d’éteindre et, sur un ton presque neutre, comme si j’étais désolée, <strong>je</strong><br />

dis :<br />

– Je sais que c’est toi qui as tué le petit Rodriguez.<br />

– Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes ? Tu me réveilles pour des conneries<br />

pareilles ?<br />

Il se retourne, souffle bruyamment, fait mine de vouloir se rendormir, mais<br />

j’insiste. J’avance à ma façon, avec douceur :<br />

– C’est toi qui as renversé le petit Rodriguez. Je le sais. Aussi, dis-le-moi, mon<br />

chéri. Je suis prête à tout entendre. Mais dis-le-moi, mon amour, <strong>je</strong> te pardonnerai,<br />

dis-<strong>je</strong> d’une voix presque suppliante.<br />

Il se lève. Il ne m’a jamais regardée aussi méchamment. Je me fais misérable :<br />

– Je sais que c’est toi. Je ne peux pas supporter qu’un innocent soit accusé. J’ai<br />

honte pour nous, Jean-Pierre.<br />

– Un innocent ? Tu oublies que cet innocent, comme tu dis, a avoué et qu’il est en<br />

taule !<br />

– C’est un innocent, Jean-Pierre. Je n’arrive pas à dormir, <strong>je</strong> n’arrête pas de<br />

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