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Ce soir je vais tuer l'assassin - Jacques Expert

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ai bien profité et, résultat, il a filé droit. Un vrai toutou ! Jusqu’à ce qu’il se rebiffe<br />

ce <strong>soir</strong>. Il a fait son malin, mais <strong>je</strong> conserve les meilleures cartes et ça lui passera.<br />

Je les oublie, lui et sa bouteille. Qu’il se bourre la gueule, j’en ai rien à faire.<br />

J’enlève ma chemise de nuit et j’observe attentivement ma silhouette dans la glace,<br />

en me demandant ce qui me manque pour faire encore bander un autre homme que<br />

ce connard de Jean-Pierre. Qu’est-ce que <strong>je</strong> dois faire ? Pas grand-chose.<br />

Abandonner mes lunettes, faire une couleur, perdre quelques kilos et retrouver ma<br />

poitrine de <strong>je</strong>une fille. Mes seins sont lourds, ils tombent à cause de mes trois<br />

gosses, et <strong>je</strong> les remonte en les serrant fermement l’un contre l’autre. Dès demain, <strong>je</strong><br />

<strong>vais</strong> m’occuper de moi et changer tout ça.<br />

Est-ce l’effet de l’alcool que j’ai bu ce <strong>soir</strong>, ou parce que <strong>je</strong> me caresse les seins,<br />

mais une envie de plaisir s’empare soudain de moi. Je ferme les yeux, incapable de<br />

résister à ce désir qui m’envahit. C’est trop bon, et si rare. J’ai un besoin fou de<br />

faire l’amour mais <strong>je</strong> ne lui donnerai pas le plaisir de me dominer. Je ne supporterais<br />

pas son regard triomphant, ses remarques. Je parviens à contenir mon envie et <strong>je</strong><br />

préfère encore me caresser, seule dans mon lit, avec en fond sonore le bruit<br />

obsédant de la télé qui monte du salon et qui me rappelle qu’il est là, en bas, avec sa<br />

bouteille. Je l’oublie pour ne penser qu’à moi, et tandis que le plaisir me submerge<br />

enfin, <strong>je</strong> laisse échapper un râle si puissant que j’en viens à espérer qu’il m’ait<br />

entendue jouir.<br />

Je continue à me caresser et <strong>je</strong> réalise soudain que la vie serait bien sans lui, que<br />

<strong>je</strong> serais heureuse, débarrassée de ce minable qui ne sait même plus me donner du<br />

plaisir. J’ai joui, encore, avec une frénésie que <strong>je</strong> ne veux pas éteindre.<br />

Je songe à Demay qui va crever ce <strong>soir</strong>, peut-être est-il mort à ce moment précis.<br />

Je <strong>je</strong>tte un œil sur le réveil : 0 h 45. Jean-Pierre n’est toujours pas monté. Que peutil<br />

bien regarder à cette heure-là ? Peut-être s’est-il endormi dans son fauteuil ? Je<br />

n’en demande pas plus. Qu’il ne vienne pas empester la chambre avec ses relents de<br />

whisky. Il a tellement picolé qu’il va ronfler comme une brute, et <strong>je</strong> ne <strong>vais</strong> pas<br />

réussir à m’endormir sans mes bouchons d’oreilles. Qu’il reste en bas, <strong>je</strong> ne veux<br />

pas sentir son corps allongé à côté du mien.<br />

C’est à Rodriguez que <strong>je</strong> pense maintenant. Rodriguez, l’« ami de Jean-Pierre »,<br />

celui qui a tué son fils. Jean-Pierre auquel il a confié son secret. Il le sait, ce pauvre<br />

idiot de Portugais, que son « ami » s’est servi de son secret pour me donner une<br />

leçon ? Il le sait que son « ami » n’en a rien à foutre qu’il tue un innocent ? Et, au<br />

contraire, qu’il l’a encouragé pour se sauver lui-même ? Quel imbécile, lui aussi !<br />

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