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170<br />

CONFÉRENCE<br />

Une grand’ quantité <strong>de</strong> tres-bons et beaux chevaux… qui sçavoi<strong>en</strong>t<br />

aller <strong>de</strong> tous airs (Brantome, XVI e siècle)<br />

Le moreau superbe, qui alloit a <strong>de</strong>ux pas et un saut, et d’un tres-haut<br />

et bel air (ibid.)<br />

(remarquer égalem<strong>en</strong>t une expression comme se donner <strong>de</strong>s airs* qui<br />

<strong>de</strong>vait être à l’origine une métaphore équestre). La sophistication <strong>de</strong>s<br />

courtisans amateurs <strong>de</strong> lég<strong>en</strong><strong>de</strong>s équestres alla jusqu’à attribuer différ<strong>en</strong>ts<br />

« climats moraux » selon les différ<strong>en</strong>ts pas — sophistication qui<br />

consistait à distinguer toto coelo un pas d’un autre. Et peut-être avai<strong>en</strong>tils<br />

à l’esprit, à moitié ironiquem<strong>en</strong>t, l’»air» magique d’une belle femme<br />

quand ils attribuai<strong>en</strong>t l’air,l’aria à un pur-sang. Plus tard, par ricochet*,<br />

le terme équestre a pu à nouveau se tourner vers la féminité, plus particulièrem<strong>en</strong>t<br />

dans les <strong>ce</strong>rcles précieux* qui se délectai<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’emploi<br />

d’une terminologie sportive et guerrière dans les choses <strong>de</strong> l’amour,<br />

comme dans toute chose spirituelle ; on peut p<strong>en</strong>ser que un bel air* est<br />

retourné <strong>de</strong>s écuries aux <strong>de</strong>meures humaines, où il était né. — Il est<br />

possible <strong>en</strong> effet que le français mo<strong>de</strong>rne avoir l’air <strong>de</strong>*, employé pour<br />

une personne, soit fondé <strong>en</strong> partie sur l’« air » attribué aux chevaux ; <strong>en</strong><br />

espagnol, on trouve l’expression, attestée par Covarrubias (1611), t<strong>en</strong>er<br />

Pedro el ayre <strong>de</strong> Juan = « es pare<strong>ce</strong>rsele <strong>en</strong> el movimi<strong>en</strong>to (!), o <strong>en</strong> el<br />

cuerpo, o rostro » ; <strong>en</strong> français aussi, avoir l’air <strong>de</strong>* a pu au départ être<br />

employé pour une personne <strong>en</strong> mouvem<strong>en</strong>t — comparant son propre<br />

mouvem<strong>en</strong>t à <strong>ce</strong>lui d’un cheval ; le bel air* serait le pas idéal !<br />

(L’exemple qui suit, <strong>de</strong> la plume <strong>de</strong> A. Castro, <strong>en</strong> espagnol mo<strong>de</strong>rne,<br />

semble conserver à la fois le s<strong>en</strong>s <strong>de</strong> « climat » et <strong>ce</strong>lui <strong>de</strong>s « airs » attribués<br />

aux personnes selon les attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s chevaux : « Savonarola se<br />

mueve <strong>en</strong> medio <strong>de</strong> aires proféticos y maravillosos ».) — Dans une <strong>de</strong>s<br />

variantes <strong>de</strong> l’argot mo<strong>de</strong>rne espagnol (le xíriga <strong>de</strong>s maçons <strong>de</strong>s Asturies)<br />

on r<strong>en</strong>contre une curieuse périphrase du pronom personnel :<br />

miaire, tuaire, suaire, nuestrosaires, etc. (cf. Aurelio <strong>de</strong> Llano Roza <strong>de</strong><br />

Ampudia, Dialectos jergales asturianos [Oviedo, 1921]). J’ose voir dans <strong>ce</strong>t<br />

étrange suffixe notre aire, aria, air appliqué ironiquem<strong>en</strong>t à une personne<br />

qui se donne <strong>de</strong>s airs*, se da aires <strong>de</strong> gran señor. Selon Dauzat<br />

(Romania, XLVIII, 412) la même périphrase se trouve dans le « Bellaud »<br />

(« argot <strong>de</strong>s peigneurs <strong>de</strong> chanvre du Jura »*) : voutres èr = vous [« vos<br />

airs »]. On peut <strong>de</strong> même faire le rapprochem<strong>en</strong>t avec une construction<br />

similaire dans « l’argot <strong>de</strong>s malfaiteurs »* : monan = moi [« mon an »] ;<br />

votre an = vous [« votre an »] : <strong>ce</strong>la représ<strong>en</strong>te une parodie <strong>de</strong> périphrase<br />

d’un style autrefois très élevé — cf. Corneille : « un plus puissant démon<br />

veille sur vos années ». — Ainsi tu (m’)as (tout) l’air d’un idiot* (et plus

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