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LEO SPITZER<br />

179<br />

chapitrer, faire la leçon, etc.) r<strong>en</strong>voi<strong>en</strong>t à une lecture <strong>de</strong>s <strong>texte</strong>s sacrés<br />

(comme ici le Lévitique) sur la moralité <strong>de</strong>vant un chapitre <strong>de</strong> moines<br />

ou <strong>de</strong> prêtres, et dans lesquels les reproches particuliers adressés aux<br />

membres du groupe étai<strong>en</strong>t inclus. De même, <strong>en</strong> espagnol, echar las fiestas<br />

et <strong>de</strong>cir los nombres <strong>de</strong> Pascua — « blâmer » — conti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t une référ<strong>en</strong><strong>ce</strong><br />

à l’annon<strong>ce</strong> <strong>de</strong>s jours <strong>de</strong> fête <strong>de</strong> la communauté, ainsi que l’explication<br />

<strong>de</strong> la variété <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong> <strong>ce</strong>s jours dans lesquels on incorporait<br />

la <strong>ce</strong>nsure appropriée <strong>de</strong> péchés particuliers (cf. Schevill-Bonilla dans<br />

leur édition <strong>de</strong>s Novelas ejemplares, III, 350) ; la même explication est<br />

valable pour leer la cartilla a alguno — « lire le catéchisme à quelqu’un »<br />

= « le <strong>ce</strong>nsurer ». Le calabrais lejere lu cal<strong>en</strong>nariu — blâmer quelqu’un,<br />

doit avoir la même histoire que l’espagnol echar las fiestas, et <strong>de</strong> <strong>ce</strong> motif<br />

semblable doit dériver l’expression flor<strong>en</strong>tine far l’albero a qc. [sc.<br />

« réciter l’albero di famiglia — l’arbre généalogique <strong>de</strong> quelqu’un »] et<br />

l’itali<strong>en</strong> leggere la vita a qc. — qui, à son tour, n’est relié qu’indirectem<strong>en</strong>t<br />

au germanique Levit<strong>en</strong> les<strong>en</strong> (cf. ma note dans Die Umschreibung<strong>en</strong><br />

<strong>de</strong>s Hungers, p. 156, et A. Prati, Italia dialettale, VI, 270). Le cadre d’un<br />

servi<strong>ce</strong> religieux supra-personnel est égalem<strong>en</strong>t suggéré par le Fr. chanter<br />

<strong>de</strong>s anti<strong>en</strong>nes à quelqu’un, l’It. cantare il mattutino, il vespro, <strong>ce</strong>s expressions<br />

signifiant toutes <strong>de</strong>ux « faire <strong>de</strong>s reproches à quelqu’un ». On<br />

trouve <strong>en</strong>core un « cadre musical » pour le reproche dans l’it. battere,<br />

cantare la solfa — « blâmer », ou chez Dante : suonare cotai note (d’où l’it.<br />

suonarle a qc. — « blâmer quelqu’un ») ; à <strong>ce</strong>la <strong>en</strong>core <strong>de</strong>vrait être comparé<br />

le moy<strong>en</strong> haut allemand salfisir<strong>en</strong> — « expliquer », qui est un parallèle<br />

sémantique au développem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’A.Fr. <strong>de</strong>cliner — « expliquer ».<br />

— Pour finir, je m<strong>en</strong>tionnerai <strong>en</strong> guise d’illustration à <strong>ce</strong>tte habitu<strong>de</strong><br />

médiévale <strong>de</strong> pla<strong>ce</strong>r tout phénomène dans un cadre, dans un tout clos,<br />

le célèbre motif épique <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la beauté humaine qui<br />

consiste à faire la liste <strong>de</strong>s parties du corps <strong>de</strong> la tête aux pieds — un<br />

procédé <strong>en</strong>core utilisé par l’Arioste dans sa <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la beauté<br />

d’Alcine et que Lessing a dénoncé comme un empiètem<strong>en</strong>t <strong>de</strong> l’art pictural<br />

sur l’art littéraire, sans pr<strong>en</strong>dre <strong>en</strong> considération que pour le lecteur<br />

médiéval l’idée <strong>de</strong> « totalité idéale » d’un corps magnifique était<br />

plus importante que sa représ<strong>en</strong>tation graphique. Le plaisir esthétique<br />

particulier que <strong>de</strong>vait éprouver <strong>ce</strong> lecteur à <strong>ce</strong>s « <strong>de</strong>scriptions canoniques<br />

» était du même ordre que <strong>ce</strong>lui qu’il trouvait dans la déclinaison<br />

d’un paradigme complet.<br />

26 E. Cassirer voit chez Giordano Bruno le Weltgefühl <strong>de</strong> l’infinitisme<br />

qui précéda la découverte savante <strong>de</strong> l’infini : cf. Individuum und Kosmos

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