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Grave%20sur%20Chrome%20-%20William%20Gibson.pdf

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« Bon Dieu », dit Deke en étalant du beurre danois sur une<br />

galette aux algues. « Je les ai ra-ti-boi-sés avec leurs Spad. Et<br />

pourtant, c’étaient pas non plus des mauvais.<br />

— C’est chouette, mon chou », marmonna Nance. Elle<br />

travaillait sur son projet de fin d’études, transpirant à entrer des<br />

données en machine.<br />

« Tu sais quoi, je crois bien que je me découvre un vrai talent<br />

pour ce genre de merde. Tu vois ? Je veux dire, le programme<br />

me file un avantage, mais j’ai la carrure pour en tirer profit. Tu<br />

sais que je commence à me bâtir une vraie réputation ? » D’un<br />

geste impulsif, il alluma la radio. Une section de cuivres<br />

Dixieland bien râpeux se mit à beugler à tue-tête.<br />

« Eh, fit Nance, ça te dérangerait pas de… ?<br />

— Non, je voulais juste… » Il tripota les boutons, tomba sur<br />

une espèce de merde lente et romantique. « Voilà. Allez, viens,<br />

lève-toi. Dansons.<br />

— Eh, tu sais bien que je peux pas…<br />

— Bien sûr que tu peux, sacré nom d’une pipe. » Il lui lança<br />

son gros ours en peluche, puis ramassa par terre une robe en<br />

patchwork de coton. Il la tint par la taille et la manche, coinçant<br />

le col sous son menton. Elle sentait le patchouli, plus faiblement<br />

la sueur. « Tu vois, moi, je me tiens ici. Et toi, là. On danse.<br />

Pigé ? »<br />

Les yeux papillotant doucement, Nance se leva, serra très<br />

fort le nounours. Et ils dansèrent alors, lentement, en se<br />

regardant dans les yeux. Au bout d’un moment, elle se mit à<br />

pleurer. Malgré tout, elle continuait de sourire.<br />

Deke rêvassait, se prenant pour Minus Montgomery, câblé à<br />

son chasseur. Imaginant la machine répondant au plus infime<br />

influx nerveux, les réflexes hyperexcités, le flot continu de<br />

l’extracame dans les veines.<br />

Le plancher de Nance devint la jungle, son lit un plateau sur<br />

les contreforts des Andes, et Deke poussait à fond les gaz de son<br />

Spad, comme s’il était une machine de combat interactive<br />

intégralement câblée. Des seringues hypodermiques pilotées<br />

par ordinateur déversaient en un lent goutte-à-goutte dans ses<br />

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