Bulletin de liaison et d'information - Institut kurde de Paris

REVUE DE PRESSE. PRESS REVlEW.BERHEVOKA ÇAPÊ.RIVISTA STAMPA.DENTRO DE LA PRENSA.BASlN ÖZET;
LIBÉRATION-19 mars 1993
TURQUIE .,
Le tabou kurde commence ~ se ~~~era~n~a~~
De uis 1991 une timide reconnaissance se dessine pour les droits de la mmonte kurde. Et I~ ~/tuation militaire
p dans I~ Sud-Est du pays pourrait évoluer après l'annonce d'un cessez-le-feu par la guenlla du PKK.
Après l'annonce d'un cessez-le-feu
DDilatéral et temporaire (do 20 mars
ao 15 avril) par le chef rebelle knrde
Abdnllab 0caIan, surnommé «Apo.,
l'atmosphère s'était neUement détendue
à Diyarbakir, capitale do K1II'Ötan
tore, où l'on craignait des événements
sanglants le jour de Newroz
(nouvel an kurde, le 21 mars). Mais
les sympathisants do PKK (Parti des
travailleurs du Kurdistan), en lutte
année depuis près de neuf ans, attendent
maintenant un geste des autorités
turques en réponse à leur proclamation
de cessez-le-feu.
Istanbul, envoyé spécial
unai AsIan est journaliste et
kurde. Longtemps, il été
contraint de n'écrire qu'en
turc. «le peux maintenant
être publié dans ma langue
mais si j 'emploie des termes
téls que Kurdistan ou peuple
kurde, le journal est saisi», expliquetoil.
L'an dernier, un hebdoma4aire
entièrement écrit en kurde a vu le
Jour. fi n'a pas dépassé le premier
numéro mais, malgré cet échec,
quelques périodiques politiques continuent
de paraJ.rre, s'ajoutant a';lX publications
militantes kurdes écrites en
turc. La plus connue, Yeni Ulke, ne
dépasse pas les 10000 exemplaires.
En revanche, restent interdites les
émissions de télévision ou de radio
dans la langue de dix à quinze millions
de Kurdes. de Turquie (un citoyen
sur cinq), qui n'a pas davantage
droit de cité dans l'enseignement.
Longtemps nié, le fait kurde commence
timidement à apparaître al1
grand jour. Même au Parlement, où
les députés du petit parti d'extrême
gauche HEP, élus à l'aut?mn~ 1991
sur les listes du SHP (partI soclal-démocrate
du peuple), affichent le~
kurdité militante, bien que la Constitution
interdise tout parti formé sur
une base ethnique. «Mais une demande
de levée de mon immunité parlementaire
est en cours. tempère
Mahmoud Halinak, ancien présiden(
de ce parti, parce que, d'après un.
rapport de police, j'aurais parlé en
tant que président du Parti du peuple
kurde, violant ainsi les lois punissant
toute propagande contre l'indivïsibilité
de l'Etat et de la République. »
La politique d'Ankara sur la question
kurde oscille entre l'aveuglement
et l'ambiguïté. Dans le Sud-Est du'
pays, treize départements peuplés en
majorité de Kurdes continuent à être
sous l'état d'urgence, au nom de la
1utte contre les «terroristes sépara-
tistes» du PKK (le 'Parti des travailleurs
du Kurdistan). Avec pour
conséquence une «sale guerre» et son
cortège d'arrestations arbitraires,
d'exécutions sommaires. rég~lièrement
dénoncées par les organisations
de défense des droits de l'homme.
dont la Fédération internationale
d'Helsinki pour les droits de l'hom~
qui accuse les forces de sécun~é
turques d'avoir abattu de sang-froId
plusieurs dizaines de personnes.
Dans l'Ouest du pays et notamment
dans les grandes villes comme Istanbul,
où vivent au moins un million de
Kurdes, les chose ont commencé à
changer. bien que timidement «L'évo:
lution est indéniable, souligne l'intellectuel
Mehmet Baykara. Mais elle résulte
d'une simple tolérance de la part
du gouvernement et reste donc à la
merci d'une volte{ace. D'où l'impor-
'tance d'une véritable législation garantissant
les droits des Kurdes et leur
identité.» Mehmet Baykara fut un des
promoteurs du symposium qui a réuni
fin février à Istanbul des intellectuels
kurdes et turcs de toutes tendances, en
présence de représentants de tous les
partis politiques. Du jamais vu.
Les autorités turques ont imposé,
pendant 70 ans un modèle jacobin
de République «une et indivisible»,
où les Kurdes avaient tous les droits,
sauf celui de se revendiquer kurdes;
ils n'existaient pas davantage dans le;
discours officiel qui les désignait sous'
le terme de «Turcs des montagnes».
De très nombreux Kurdes jouaient un
rôle de premier plan' dans les institutions
de l'Etat. y compris dans l'armée,
mais jamais ils ne s'affirmaient
guinaires du groupe d'Abdullah Ocalan,
surnommé «Apo»,
«C'est seulement parce que le PKK
existe .et se bat que le problème
kurde est maintenant au premier
plan en Turquie », souligne un professeur
d'université, qui reconnaît
aussi que la guérilla menée depuis
hüit ans par cette organisation sert
!lussi de prétexte à l'intransigeance
,dlitpouvoir et surtout de l'armée. Le
.PXK a été sérieusemnt mis à mal sur
lé plan militaire, après la destruction
'de' ses sanctuaires en Irak du Nord
par les forces armées turques. Il est
Jesonnais obligé de composer avec
Jalal Talabani et Mahmoud Barzani,
les leaders kurdes d'Irak, qui savent
que toute entité ou Etat kurdes en
Irak du Nord n'est pas viable sans
l'accord d'Ankara. «Apo» offre maintenant
un cessez-le-feu unilatéral et
veut négocier avec les autorités
turques. qu'il place ainsi dans un sérieux
embarras. Celles.ci, avec le
soutien d'une bonne partie de l'opinion,
restent prudentes et proclament
leur refus de négocier avec les terroristes.
Mais, phénomène nouveau, de
nombreuses voi;o:,s'élèvent, comme
celle de Ertugul Ozkok, rédacteur en
chef du quotidien Hurriyet: «L'Etat
est peut-être en train de venir à
bout du PKK mais cela ne signifie
,pas que le problème kurde sera terminé.»
Pour la première fois, un institut de
~~s des plus sériel1X du pays, la
sociéte Kondw, ä mene à Istanbul une
vaste enquête sur un échantillon de
16000 personnes pour le compte du
quotidien libéral Milliyet. Quelque
12% des habitants de cette métropole
de plus de dix millions d'habitants
s'affrrment d'un façon ou d'une autre
comme d'origine kurde. Un tiers
d'entre eux se revendiquent commè
pleinement kurdes. Et, sur ces derniers,
moins d'un sur deux :rêve d'un
Kurdistan indépendant. Un certain
nombre des personnes interrogées ont
probablement eu peur de répondre
franchement. Le résultat n'en est pas
moins significatif.
'Jes autorités turques ont longtemps
Jlarié sur le désir d'assimilation par
un mieux-être économique, Dans la
même logique, elles avaient tardive';
ment lancé un ambitieux programme
de développement du Sud-Est. Cela
ne suffit plus, même si la plupart des
hommes politiques d'Ankara refusent
encore de.1' admettre. Adnan
Kahveci, ancien ministre d'Ozal,
mort il y a un mois dans un accident
de voiture, était l'un des rares à lan~
cer un cri d'alarme, affrrmant que
«cet aveuglement portait le pays à'
la catastrophe ». fi donnait l'exemple
de l'Espagne et du problème
basque: «Tout en appliquant sans
concession les lois antiterroristes,
',lle a reconnu aux Basques les
droits démocratiques et culturels
qu'ils revendiquaient.» Sa voix est
restée isolée. Man: SEMO
comme tels,
Le chef de l'Etat Turgut 0z8I, ~
par sa mère, fut le premier à rompre le:
tabou en évoquant ouvertement llli
question, notamment lors du grand
exode des Kurdes fuyant la répression
ds troupes de Saddam Hussein après
la guerre du Golfe. Le Premier ministre
conservateur Suleyman Demirel,
à son arnvée au pouvoir il y a un
an et demi, à la tête d'une coalition
avec les socialistes, évoqua publiquement
la reconnaissance «du fait
kurde» et instaura un ministère des
droits de l'homme, confié à un Kurde.
Mais ces bonnes intentions ne furent
pas suivies d'effet, notamment dans le
Sud-Est. La répression menée par la ~
gendarmerie et l'armée au nom de la l
lutte contre le PKK ont fait de ce parti ~ "
un porte-drapeau pour de ~o1ilbreux :'! '.; ., .... .
Kurdes. Même pour ceux qUI ne se re-. ~ ".. . , . . .
connaissent guère dans la langue de '.,.nbu', mars 1992: la première réunion kurde autorisée.
bois archéomarxiste et les actions san-
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