Daumier, peintre et lithographe - Histoire et Patrimoine du Vexin
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bien artificiel, il n'est pas contestable que certains ne soient fondés.<br />
Nombre de figures de Diaz sont en efT<strong>et</strong>,de la main d'Honoré <strong>Daumier</strong>(l) ;<br />
<strong>et</strong> pour Delacroix, ce grand sensitif, si inqui<strong>et</strong>, si impressionnable, fit<br />
plus que d'admirer <strong>Daumier</strong> <strong>et</strong> de copier plusieurs de ses Baigneuses.<br />
Il a peint le Naufrage <strong>du</strong> Don Juan, <strong>et</strong> l'on ne peut contester que ces<br />
faces bosselées, ces attitudes contractées, ces tons simples <strong>et</strong> rudes, que<br />
l'accent général de la peinture, n'accusent l'inlluence de <strong>Daumier</strong>.<br />
La parenté est, peut-être, encore plus étroite avec Mill<strong>et</strong>. Telle<br />
paysanne <strong>du</strong> Wagon de 3^ classe, telle charmante Baigneuse, de la<br />
collection Décharné, d'un faire si limpide, si fiuide, si primesautier,<br />
semblent appartenir au maitrc des Glaneuses.<br />
A la vérité, ces deux grands amis, ces deux grands artistes, qui<br />
travaillaient si près l'un de l'autre, eurent le même goût pour le dessin<br />
sculptural, affectionnant <strong>du</strong> même cœur les ombres transparentes,<br />
l'éclairage à contre-jour, le coloris sobre <strong>et</strong> sourd à la hollandaise,<br />
tous deux, selon la remarque faite au suj<strong>et</strong> de <strong>Daumier</strong> par les Goncourt,<br />
partant de la réalité la plus bourgeoise — la plus rustique chez Mill<strong>et</strong><br />
— pour atteindre, tel l'auteur de la Recherche de l'Absolu, au<br />
fantastique.<br />
A ceux qui prétendaient que Mill<strong>et</strong> avait été imité par <strong>Daumier</strong>,<br />
M. Arsène Alexandre a très judicieusement fait observer qu'avant Mill<strong>et</strong>,<br />
<strong>Daumier</strong> avait fait des Mill<strong>et</strong>. C'est ainsi, par exemple, que, dans la<br />
Revue des <strong>peintre</strong>s, en 1834, parut une planche intitulée Le Malade <strong>et</strong><br />
signée de <strong>Daumier</strong>, représentant assis au milieu d'un bois dépouillé un<br />
vieux paysan en sabots <strong>et</strong> en bonn<strong>et</strong> de coton, vêtu d'une lourde<br />
limousine. Derrière le malade, une jeune fille attentive se tenait<br />
debout. Le paysan, si àprement accroché à la glèbe, dont J.-F. Mill<strong>et</strong><br />
nous contera la vie fruste, <strong>Daumier</strong> déjà nous le révèle.<br />
Que si l'on considère la décision des contours, l'ampleur débor-<br />
dante des volumes, le style épique de <strong>Daumier</strong>, il n'y a point lieu<br />
d'être surpris <strong>du</strong> mot de Daubigny visitant à Rome les fresques de<br />
Michel-Ange : « C'est comme <strong>du</strong> <strong>Daumier</strong> ! » (2). Non, ce n'était point<br />
là sniiplement, ainsi que le pense M. Béraldi, « une boutade d'artiste».<br />
(1) Voir SrnsiiT. Souvenirs sur Théodore Hotisseau. Techener, 1872.<br />
(2) Balzac <strong>et</strong> Daubigny ne furent point seuls à établir un parallèle entre Michel-Ange el<br />
<strong>Daumier</strong>. Michel<strong>et</strong>, lui aussi, écrivit un jour à <strong>Daumier</strong> : « Vous êtes le Michel-Ange de la caricature.<br />
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