You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
une gerbe d’eau et de vapeur. <strong>Le</strong>s lanciers se tournèrent alors<br />
vers la rive occidentale, qu’ils entreprirent de découper.<br />
D’énormes blocs de pierre roulèrent dans le fleuve barré, dont<br />
les eaux commençaient à contourner le pont effondré.<br />
Au matin, le Rhône coulait dans la vallée, et seul un mince<br />
filet d’eau courait encore au fond de l’ancien lit.<br />
Épuisés mais satisfaits, Hawkmoon et ses hommes se<br />
congratulèrent, avant de se remettre en selle pour repartir vers<br />
le sud.<br />
<strong>Le</strong> premier coup venait d’être porté à l’armée granbretonne,<br />
et c’était un coup sévère.<br />
La petite troupe s’accorda quelques heures de repos dans les<br />
collines, puis se remit en route pour rattraper l’ennemi.<br />
Hawkmoon, blotti derrière un buisson, contemplait en<br />
souriant la confusion qui régnait dans la vallée.<br />
<strong>Le</strong> fleuve n’était plus qu’un bourbier, où gisaient, comme des<br />
baleines échouées, les péniches granbretonnes. Certaines<br />
avaient la poupe profondément enfoncée dans la vase, d’autres<br />
reposaient sur le flanc, d’autres enfin, retournées, avaient<br />
répandu leur chargement autour d’elles : machines de guerre<br />
brisées, animaux affolés, vivres gâtés. Enfoncés jusqu’à micuisse<br />
dans la boue, les soldats essayaient de haler le matériel<br />
jusqu’à la rive, de libérer les chevaux entravés et de rattraper les<br />
moutons, les porcs et les bœufs qui s’étaient enfuis, pris de<br />
panique.<br />
<strong>Le</strong>s grognements des bêtes et les cris des hommes<br />
emplissaient l’atmosphère. L’armée avait perdu sa belle<br />
ordonnance. Sur les berges, de fiers cavaliers se voyaient forcés<br />
de transformer leurs pur-sang en vulgaires animaux de trait,<br />
pour tenter de rapprocher de la terre ferme les barges enlisées.<br />
Un peu plus loin on dressait le camp, car Meliadus avait<br />
compris qu’il était impossible de continuer à avancer avant<br />
d’avoir sauvé du désastre la plus grande partie du matériel et<br />
des vivres. <strong>Le</strong>s gardes que l’on avait postés autour du camp<br />
s’intéressaient plus au spectacle de leurs compagnons enfoncés<br />
dans la vase qu’aux collines, où Hawkmoon et ses hommes<br />
attendaient leur heure.<br />
114