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se porter partie civile 122 . Restent les syndicats qui<br />
disposent du droit de substitution, si du moins ils peuvent<br />
engager une action en justice pour injure non publique.<br />
En tout état de cause, l’absence de jurisprudence notable<br />
ne permet pas de bien identifier ce qui relève de l’injure<br />
fondée sur le sexe. Une étude sur les décisions des<br />
juridictions de première instance serait sans doute<br />
nécessaire pour évaluer en détail l’application de ces<br />
dispositions.<br />
2 - Une forme de sexisme ordinaire au sein même du<br />
harcèlement sexuel : les propos et comportements<br />
sexistes<br />
Depuis la loi n°2012-954 du 6 août 2012 relative au<br />
harcèlement sexuel et sa circulaire d’application 123 , la<br />
nouvelle définition du harcèlement sexuel qui consacre le<br />
harcèlement sexuel « d’ambiance ou d’environnement<br />
hostile» et intègre dans ses éléments constitutifs l’atteinte<br />
à la dignité de la personne (L.1153-1 CT et 222-33 I-II-III<br />
du Code pénal), vise deux formes de harcèlement :<br />
a. le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des<br />
propos ou comportements à connotation sexuelle qui<br />
soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur<br />
caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son<br />
encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.<br />
b. le fait, même non répété, d'user de toute forme de<br />
pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir<br />
un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché<br />
au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers 124 .<br />
Il convient d’observer que cette nouvelle définition a été<br />
reprise dans le Code du travail (cf infra) afin d’affirmer de<br />
façon expresse le principe de l’interdiction du harcèlement<br />
sexuel et des discriminations pouvant en résulter à<br />
l’encontre des salarié-e-s.<br />
Cette première définition du harcèlement sexuel nous<br />
concerne tout particulièrement d’autant que la circulaire<br />
du 7 août 2012 125 précise que «le délit suppose tout d’abord<br />
des comportements de toute nature (propos, gestes,<br />
envoi ou remise de courriers, objets, attitudes…), qui sont<br />
imposés à la victime, qui sont répétés et qui présentent une<br />
connotation sexuelle». Trois précisions sont ici apportées.<br />
◗ Le verbe « imposer » n’exige pas que la victime ait fait<br />
connaître de façon expresse et explicite à l’auteur des<br />
faits qu’elle n’était pas consentante ;<br />
◗ Il suffit que les comportements répétés (au moins deux<br />
fois) « revêtent une connotation sexuelle, ce qui n’exige<br />
donc pas qu’ils présentent un caractère explicitement et<br />
directement sexuel » ;<br />
◗ Pour être punissables, ces comportements doivent<br />
porter atteinte à la dignité. Cette hypothèse recouvre<br />
« les propos, ou comportements ouvertement<br />
sexistes, grivois ou obscènes, tels que des paroles ou<br />
écrits répétés constituant des provocations, injures ou<br />
diffamations même non publiques, commises notamment<br />
en raison du sexe ». Ces agissements sont également<br />
punissables s’ils ont pour conséquence de rendre<br />
insupportables les conditions de travail.<br />
Ainsi, pourrait être pris en compte un certain nombre de<br />
propos qui n’étaient pas retenus comme du harcèlement<br />
par certains juges du fond. S’il semble donc que cette<br />
nouvelle définition permette de saisir les agissements «<br />
sexistes », il reste à savoir comment les juges du fond<br />
interpréteront la loi. Il est encore trop tôt pour le savoir.<br />
3 - Le harcèlement moral : un moyen masqué de<br />
sanctionner les comportements sexistes<br />
Faute de délit spécifique permettant de condamner<br />
explicitement les auteurs de sexisme ordinaire, les victimes<br />
se fondent souvent sur le délit de harcèlement moral.<br />
Le harcèlement moral, tel que défini à l’article 222-33-2<br />
du Code pénal 126 , permet, en effet, en raison de son<br />
caractère général, de condamner des agissements quelle<br />
que soit leur cause, par exemple de nature sexiste, dès<br />
lors qu’ils sont répétés, qu’ils dégradent les conditions de<br />
travail et qu’ils sont intentionnels.<br />
C’est sans doute la raison qui explique, si l’on examine la<br />
jurisprudence de la Cour de Cassation et des juges du<br />
fond, que certaines femmes victimes d’agissements<br />
122 - Cass. Crim. 27 novembre 2012 N° de pourvoi: 11-86982. Dans cet arrêt relatif à une injure raciale, la Cour n’est pas entrée en voie de condamnation (amende<br />
de 750€) estimant que l’action n’avait pu être correctement engagée, sur citation directe du MRAP, car l’habilitation à agir que la loi accorde à ce type<br />
d’association ne vaudrait qu’en cas d’injure publique<br />
123 - On rappelle que la Décision QPC du conseil constitutionnel du 4 mai 2012 a déclaré contraire à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen<br />
de 1789 et au principe de la légalité criminelle qu’il supporte, la définition de l’incrimination supportée par l’article 222-33 du Code pénal<br />
124 - En prévoyant que le harcèlement sexuel peut être le fait d’un acte isolé, dès lors qu’il est exercé sous la forme de pression grave, la définition donnée à l’article<br />
L. 1153-1 du Code du travail se démarque de la définition de l’agissement à connotation sexuelle constitutif d’une discrimination découlant de la loi du 27<br />
mai 2008 portant adaptation des dispositions au droit communautaire qui prévoit : « tout agissement à connotation sexuelle subi par une personne et ayant<br />
pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». L’exercice de<br />
pression grave n’étant pas requis<br />
125 - CRIM 2012 -15 / E8 - 07.08.2012, Présentation des dispositions de droit pénal et de procédure pénale de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au<br />
harcèlement sexuel .<br />
126 - « Le fait de harceler autrui par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible<br />
de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans<br />
d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende »<br />
DEUXIÈME PARTIE<br />
<strong>LE</strong> <strong>SEXISME</strong> <strong>DANS</strong> <strong>LE</strong> DROIT :<br />
Quasi-inexistence ou approche floutée<br />
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