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LE SEXISME DANS LE MONDE DU TRAVAIL

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RAPPORT SUR <strong>LE</strong> <strong>SEXISME</strong> <strong>DANS</strong> <strong>LE</strong> <strong>MONDE</strong> <strong>DU</strong> <strong>TRAVAIL</strong><br />

ENTRE DÉNI ET RÉALITÉ<br />

Aux termes de ce rapport, cinq constats peuvent être faits.<br />

1. Le sexisme est contraire à l’égalité<br />

Parce que l’entreprise est un lieu de régulation sociale,<br />

dans lequel des obligations légales s’imposent à ellemême<br />

et aux salarié-e-s, aucune personne ne peut être<br />

traitée défavorablement à raison de son sexe ; aucune<br />

personne ne peut faire l’objet d’une atteinte à sa dignité<br />

et à son environnement de travail en raison de son sexe ou<br />

faire l’objet d’un comportement à connotation sexuelle.<br />

Dans ces conditions, l’entreprise doit garantir que les<br />

relations entre les femmes et les hommes qui existent sur<br />

le lieu de travail n’ont pas pour effet de produire des<br />

inégalités au détriment d’un groupe à raison du sexe. Elle<br />

doit tout mettre en œuvre pour que le lien de subordination<br />

qui existe entre un-e salarié-e et son supérieur<br />

hiérarchique ou que la prédominance numérique d’un<br />

groupe à raison du sexe sur un autre groupe exerçant les<br />

mêmes responsabilités, ou bien encore sa culture n’aient<br />

pas pour effet de produire des discriminations ou un<br />

mauvais traitement.<br />

2. Le sexisme fait peur<br />

Le simple énoncé du mot est de l’ordre de la transgression<br />

d’un tabou puisque lui sont préférés souvent les mots de<br />

«machisme» ou de «misogynie». C’est bien parce que le<br />

jeu de l’amour et du désir entre les femmes et les hommes<br />

est irrémédiablement convoqué quand on parle de<br />

sexisme qu’il est si difficile d’en parler en termes neutres.<br />

S’il y a tant de réserves pour nommer le sexisme, c’est<br />

qu’il renvoie à l’interdépendance entre les femmes et les<br />

hommes dans la vie intime. On a peur du mot «sexisme»<br />

comme on a peur du mot «sexe», ce qui n’est le cas d’aucun<br />

autre phénomène de discrimination, y compris le racisme.<br />

De ce fait, il prête le flan à une connotation péjorative,<br />

entrainant désapprobation, dérision ou mépris.<br />

La difficulté à prendre au sérieux le sexisme au travail tient<br />

à ce que le monde du travail favorise les relations inter -<br />

personnelles entre les femmes et les hommes en raison<br />

de la proximité et de la mixité sur les lieux de travail et<br />

convoque de fait les jeux liés à une sexualité hétéro<br />

normée. Analyser et nommer les manifestations de sexisme<br />

au quotidien, dans les relations de travail entre les femmes<br />

et les hommes, semble pour certains constituer une sorte<br />

de coup de canif dans les sacro-saints jeux de séduction<br />

et mettrait en péril rien moins que le désir, voire l’amour,<br />

alors que le sexisme est justement un «tue l’amour» et le<br />

fossoyeur du désir.<br />

La frontière entre l’intime et le monde du travail n’est donc<br />

pas étanche. L’objectif n’est pas qu’elle le soit. Mais il est<br />

en revanche de comprendre que les rapports d’interdé -<br />

pendance entre les femmes et les hommes qui existent à<br />

l’extérieur du travail ne sont pas du même ordre que ceux<br />

qui se jouent sur le lieu de travail. Un comportement de<br />

séduction dans un bar entre une femme et un homme<br />

n’équivaut pas à un comportement de séduction au bureau<br />

entre une subordonnée et son supérieur hiérarchique. Le<br />

lien de subordination existant entre les deux entraîne une<br />

relation intrinsèquement déséquilibrée. Il en est de même<br />

entre collègues. La salariée ne dispose pas forcément de<br />

toutes les ressources utiles pour repousser des avances ou<br />

réagir si on lui tient des propos sur son apparence physique<br />

ou si on lui coupe sans cesse la parole en réunion.<br />

3. Le sexisme est grave et agit<br />

négativement sur la performance<br />

Le sexisme englobe les violences sexistes et sexuelles au<br />

travail et le combattre, c’est promouvoir l’égalité et prévenir<br />

les violences.<br />

Car le sexisme fonctionne comme un redoutable instrument<br />

d’exclusion des femmes de la sphère professionnelle et leur<br />

signifie qu’elles ne sont pas à leur place. Il crée de la<br />

souffrance, fragilise la confiance en soi, même si les femmes<br />

en sous estiment souvent la portée et l’euphémisent pour<br />

survivre. Il impacte négativement la performance globale de<br />

l’entreprise en créant chez les victimes une forme de<br />

rétrécissement de leurs talents.<br />

Rejeter la notion de sexisme aux motifs par exemple<br />

qu’elle relève «d’un délire féministe», ou qu’elle conduit à<br />

faire « passer un comportement classiquement masculin<br />

pour une infamie 190 », en rire ou l’ignorer, c’est précisément<br />

dénier, dénigrer, effacer le cortège des maux qui lui sont<br />

attachés: infériorisation, délégitimation, exclusion, dévalori -<br />

sation, souffrance physique et psychologique, perte de<br />

l’estime de soi.<br />

4. Le sexisme est multiforme<br />

Si certaines manifestations de sexisme sont prises en<br />

compte par le droit et combattues, une forme de sexisme<br />

insidieux continue d’exister dans de nombreux lieux de<br />

travail, qui crée une culture défavorable aux femmes. Le<br />

sexisme dit «ordinaire» ou «résiduel», qui se joue au quotidien<br />

dans les relations entre les femmes et les hommes, est<br />

aujourd’hui un impensé dans le monde du travail, un<br />

phénomène invisible et dénié. Or, bien qu’en apparence<br />

anodine, cette forme de sexisme a un impact défavorable<br />

sur la carrière des femmes et leur bien-être au travail.<br />

190 - Eric Zemmour, propos tenus lors de l’émission « ça se dispute » sur i-Télé, 11 novembre 2013.<br />

QUATRIIÈME PARTIE<br />

L’IMPENSÉ, L’INNOMMÉ, <strong>LE</strong> DENIÉ<br />

Reconnaître et conférer une existence légale au sexisme<br />

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