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usagers de cette CIM. Là aussi, il faudra<br />

penser à la forme et l’accessibilité. Si l’usager<br />

peut avoir accès à cette information à partir<br />

de son langage et sa culture, là, on pourra<br />

donner de l’égalité dans l’interaction entre le<br />

professionnel et l’usager car il aura de quoi<br />

argumenter.<br />

Marc Laporta : Et comment verriez-vous<br />

ce processus ?<br />

Christian Marchal : Justement,<br />

vraiment travailler sur le langage de la CIM<br />

pour qu’elle soit accessible à l’usager, qu’on<br />

ne soit pas obligé d’avoir fait huit ans de<br />

médecine pour pouvoir lire la CIM, déjà<br />

ça serait quelque chose, donner certaines<br />

argumentations, mais je crois que partir des<br />

codes Z donne déjà une piste d’entrée pour<br />

pouvoir discuter et aller plus loin. Pour viser<br />

une collaboration bien-sûr et réduire le fossé<br />

symbolique entre le professionnel et l’usager.<br />

Je crois qu’il y a vraiment un travail aussi sur<br />

la forme de la CIM et la façon d’en parler.<br />

Maintenant, les usagers peuvent s’en servir,<br />

moi j’ai déjà été dans certains groupes où ils<br />

utilisaient le DSM. Je ne cautionne pas, mais<br />

il y a déjà une appropriation. Cela serait un<br />

peu plus objectif et ça peut donner une base<br />

de discussion et de légitimité à l’usager pour<br />

pouvoir parler de son trouble, de sa maladie,<br />

de ses difficultés et justement aller vers le<br />

traitement et voir ce qu’il y a à faire.<br />

Marc Laporta : Le langage aussi, c’est ça ?<br />

Christian Marchal : Trouver des passerelles<br />

ou un langage commun, évidemment,<br />

ça va créer des points de tension c’est<br />

comme quand le juridique vient se confronter<br />

à la médecine. L’autodétermination du patient<br />

par rapport au principe de ne pas nuire au<br />

médecin, ça ce sont des points de tension<br />

qui doivent être négociés.<br />

Marc Laporta : Absolument. Merci à vous.<br />

Chantal Roussy : Bonjour, je m’appelle<br />

Chantal Roussy et je représente l’UNAFAM<br />

(Union nationale des amis et familles de<br />

personnes malades et/ou handicapées<br />

psychiques) au conseil scientifique du<br />

CCOMS et j’aimerais rebondir sur le<br />

diagnostic. On représente les familles, les<br />

proches des familles et les usagers, on a les<br />

deux casquettes et le problème du diagnostic<br />

est un problème grave, en tout cas dans<br />

notre pays, parce que les psychiatres nous<br />

répondent, mais les familles demandent un<br />

diagnostic. Or, sur les premiers prodromes,<br />

c’est très dangereux de donner un diagnostic<br />

d’une psychose sévère parce que la famille<br />

s’enferme là-dedans et se met la casquette<br />

de parent de schizophrène. C’est très difficile<br />

parce que vous avez parlé de l’environnement,<br />

mais on sait bien que c’est un des éléments<br />

essentiels qui jusqu’à présent n’est pas pris<br />

en compte. Parce que le gosse à qui on a<br />

donné un diagnostic de schizophrénie, il<br />

repart quand même dans sa famille. Mais si la<br />

famille a décidé qu’il avait une schizophrénie,<br />

il n’en sortira jamais, c’est évident, donc il n’y<br />

aura aucune thérapie de rétablissement qui<br />

sera mise en œuvre. A notre avis ces codes Z<br />

sont indispensables.<br />

Marc Laporta : Pour les familles aussi<br />

c’est important, c’est ça que vous dites<br />

aussi ?<br />

Chantal Roussy : Pour les familles et<br />

pour les psychiatres qui sont en contact avec<br />

ces familles de façon qu’ils puissent dire : « j’ai<br />

des codes et pour le moment je ne peux pas<br />

établir un diagnostic » et, par contre, aider la<br />

famille dans son environnement car la famille<br />

ne comprend rien et donc en ne comprenant<br />

rien, elle ne fait qu’accentuer les troubles de<br />

la personne.<br />

Marc Laporta : Donc vous dites aussi,<br />

si j’ai bien compris, qu’on pourrait faire<br />

usage des codes un peu comme diagnostic<br />

provisoire au lieu d’un diagnostic lorsqu’il y a<br />

une zone grise avant d’arriver clairement à un<br />

diagnostic précis...<br />

Chantal Roussy : Evidement et surtout<br />

un diagnostic sur l’environnement qui est<br />

quelque chose de très important.<br />

Marc Laporta : Vous avez remarqué<br />

ce matin quand Geoffrey Reed a donné<br />

quelques exemples de diagnostics, ça m’a<br />

frappé que les divisions qu’ils ont proposées<br />

soient finalement contextuelles, on a parlé du<br />

post-partum, de la dépression saisonnière,<br />

alors que pour la schizophrénie, on a plutôt<br />

des descriptions phénoménologiques. C’est<br />

intéressant parce que c’est fait de façon<br />

probablement inégale, subdiviser certains des<br />

troubles en catégories qui sont d’emblées<br />

acceptées comme étant reliées à des<br />

facteurs contextuels. Il semblerait que, pour<br />

la dépression, elles soient plus importantes<br />

que pour les troubles psychotiques.<br />

Chantal Roussy : J’ai l’impression que<br />

pour les troubles psychotiques schizophréniques,<br />

c’est souvent un diagnostic par<br />

défaut et que comme on n’a pas pu<br />

diagnostiquer vraiment les troubles et qu’on<br />

n’a pas fait les recherches suffisantes pour<br />

pouvoir aider au rétablissement - car il n’y<br />

a pas de rétablissement chez nous, je suis<br />

désolée pour les cliniciens qui sont là, il n’y a<br />

pas de rétablissement, il y a des recherches<br />

qui sont passionnantes, mais l’application<br />

n’est pas faite - et donc si vous voulez,<br />

à bout d’arguments, on vous dit : « il est<br />

schizophrénique », point.<br />

Massimo Marsili : Le diagnostic modifie<br />

le contexte. En modifiant les contextes de<br />

famille, tu modifies aussi le pronostic et c’est<br />

ça qui est intéressant.<br />

Marc Laporta : L’acte diagnostic est<br />

influencé d’une part par le diagnostic et,<br />

d’autre part, par ce qui est disponible comme<br />

traitement et ce qui est déterminé par les<br />

idées préconçues des cliniciens. Les jeunes<br />

résidents ont souvent des idées préconçues<br />

de chronicité et de sévérité qui ne sont pas<br />

du tout basées sur l’expérience. De tels<br />

aspects demandent un tout autre niveau<br />

d’intervention et je pense qu’il est important<br />

de tout faire pour tenter de diminuer ces<br />

fausses idées préconçues. Il faut ajouter à la<br />

formation les notions de facteurs contextuels<br />

qui modulent l’expression de la maladie. Il<br />

faut aussi rehausser la compréhension de<br />

l’épisode lui-même, de l’acte diagnostic et de<br />

l’hospitalisation, qui peuvent parfois avoir un<br />

effet traumatique. Ce sont des contributions<br />

iatrogéniques. Ces aspects reliés au système<br />

de soins, compliquent le pronostic et c’est<br />

très important d’intervenir là-dessus.<br />

Hervé Guiheneuf : président du GEM<br />

(groupe d’entraide mutuelle) d’Epernay : Je<br />

voulais soutenir particulièrement les deux<br />

dernières interventions. J’ai été codé pendant<br />

douze ans, j’ai eu la chance d’avoir une famille<br />

qui m’a supporté et par une erreur du secret<br />

médical, je me suis décodé tout simplement,<br />

ça fait trois ans maintenant que je n’ai plus<br />

aucune thérapie, plus aucun médicament.<br />

Il est vrai que pour les familles, le parler<br />

des médecins est souvent du chinois. Mon<br />

épouse qui a toujours été présente auprès de<br />

moi ne comprenait rien du tout de ce qui se<br />

passait dans ma tête.<br />

Marc Laporta : Mais dites-nous comment<br />

vous faites entrer les aspects contextuels, estce<br />

que vous conceptualisez ça comme étant<br />

lié à des aspects contextuels de votre vie ?<br />

Hervé Guiheneuf : Je pense que le<br />

codage a fait que les deux psychiatres qui<br />

m’ont suivi pendant douze ans sont restés<br />

dans ce codage. J’ai changé de psychiatre,<br />

qui a confié à ma sœur mon diagnostic,<br />

pensant s’adresser à mon épouse. Bien sûr,<br />

elle m’a téléphoné pour me dire que c’était<br />

totalement faux. Je suis sorti de l’hôpital en<br />

me disant décode-toi et je me suis décodé<br />

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AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT<br />

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