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l’intégration, à la prise en compte du savoir<br />
expérientiel des usagers dans l’élaboration<br />
de nouvelles connaissances en santé<br />
mentale. Nous essayons de faire du milieu de<br />
la recherche lui-même, un lieu propice pour<br />
favoriser ce qu’on appelle le rétablissement<br />
civique vers la pleine citoyenneté en faisant en<br />
sorte que la recherche puisse être un endroit<br />
où les usagers interagissent et développent<br />
leur potentiel socioprofessionnel.<br />
Je vais vous présenter ici le modèle<br />
global de santé mentale publique, qui trouve<br />
ses origines dans la promotion de la santé.<br />
Vous avez ici le modèle proposé par la charte<br />
d’Ottawa sur la promotion de la santé qui<br />
comporte cinq stratégies :<br />
• renforcer et soutenir l’action<br />
communautaire,<br />
• développer des aptitudes et<br />
compétences personnelles,<br />
• créer des environnements favorables,<br />
• réorienter les services de santé,<br />
• élaborer des politiques publiques<br />
propices à la santé.<br />
C’est le modèle original en promotion<br />
de la santé qui a ensuite été décliné dans<br />
ce qu’on appelle l’approche écologique en<br />
santé publique. Dans ce modèle, le patient<br />
ou l’usager, comparativement aux autres<br />
niveaux d’interventions, n’est jamais que<br />
la cible des interventions alors que tous les<br />
autres niveaux peuvent être les initiateurs<br />
d’interventions. C’est ce qui nous a amené à<br />
développer avec Larry Davidson et un certain<br />
Jean-Luc Roelandt qui est peut-être dans la<br />
salle et que vous connaissez certainement,<br />
nous avons publié il y a quelques années<br />
déjà une première version du modèle global<br />
de santé mentale publique où on voit la<br />
base de la citoyenneté qui est un élément<br />
essentiel et puis le rétablissement se situant à<br />
plusieurs niveaux. Il y a plusieurs niveaux sur<br />
ce modèle :<br />
• le niveau supranational,<br />
• le niveau gouvernemental (étatique),<br />
• le niveau communautaire,<br />
3 Cet article a été sélectionné « Outstanding Paper » de l’année par le comité éditorial de cette revue scientifique.<br />
<br />
• le niveau des établissements<br />
et organisations,<br />
• le niveau individuel.<br />
À chacun de ces niveaux correspondent des<br />
dimensions d’analyse :<br />
• au niveau intra-personnel, ce que la<br />
personne vit en elle-même,<br />
• au niveau interpersonnel, dans ses<br />
échanges avec autrui,<br />
• au plan culturel,<br />
• au plan socio-économique,<br />
• au plan politique.<br />
L’important ici est de considérer qu’avec<br />
le rétablissement, nous ne voulons pas juste<br />
mettre les gens dans la communauté, ce que<br />
nous voulons c’est que les gens soient de<br />
la communauté, c’est-à-dire qu’ils puissent<br />
maintenir le réseau, rester en contact avec autrui<br />
et pour ça il faut nécessairement considérer<br />
les gens comme étant des concitoyens à part<br />
entière, égaux à tous les autres.<br />
Pour illustrer le tout, je vais vous parler<br />
ici d’un projet avec l’OMS, qui s’appelle le<br />
QualityRights Project. Nous avons publié dans<br />
le récent numéro du Journal of Public Mental<br />
Health, en décembre dernier, cette modélisation<br />
que je vais ici vous expliquer 3 . Le QualityRights<br />
Project touche essentiellement à cinq droits<br />
de la Convention des Nations Unies relative<br />
aux droits des personnes handicapées qui a<br />
été adoptée par un grand nombre de pays.<br />
Le QualityRights Project vise à faire en sorte<br />
qu’on puisse évaluer au niveau entre autres<br />
des établissements publics de santé mentale<br />
le degré de respect des droits. Ce qui était<br />
initialement suggéré était qu’éventuellement, les<br />
usagers puissent prendre part à ce processus<br />
d’évaluation. Ce que nous suggérons, c’est<br />
que les usagers doivent prendre part à cette<br />
évaluation. L’idée ici est que par exemple vous<br />
voyez dans la première boite à gauche, vous<br />
pourriez remplacer ce projet par un projet à<br />
l’échelle locale ou nationale, chez vous dans<br />
votre pays, qui ne serait pas nécessairement<br />
celui de l’OMS.<br />
Vous auriez nécessairement au début un<br />
comité organisationnel, puis des groupes<br />
d’usagers (une demi-douzaine) qui seraient<br />
soutenus par un animateur, un pair aidant<br />
qui aurait cette capacité de soutenir les gens<br />
dans l’expression de leurs propres besoins qui<br />
sont parfois de proximité, comme des choses<br />
du quotidien. Donc au début les gens sont<br />
recrutés comme des usagers et en prenant<br />
part à cet exercice d’évaluation, ce que je veux<br />
mettre en évidence ici c’est la façon même<br />
dont on pourrait conduire une évaluation,<br />
cette façon-là doit être exemplaire en matière<br />
d’intégration du rôle des usagers pour faire en<br />
sorte qu’une telle expérience soit d’abord et<br />
avant tout utile aux usagers dans leur propre<br />
rétablissement vers la pleine citoyenneté, et<br />
en deuxième lieu utile aux organismes qui<br />
auraient commandité ou qui financent les<br />
projets. L’idée ici est de voir que les usagers<br />
peuvent avoir un rôle clé notamment comme<br />
pair aidant, comme animateur de ces groupes<br />
de discussion et tout ça est désormais bien<br />
soutenu dans la littérature. Vous avez peutêtre<br />
entendu hier soir Michael Rowe parler<br />
des différentes étapes que nous avons<br />
franchi dans l’élaboration d’un certain corpus<br />
scientifique en la matière et où les usagers<br />
ont été soutenus, formés pour assurer des<br />
rôles de co-chercheurs pour pouvoir entre<br />
autres énoncer des questions de recherche<br />
qui soient pertinentes d’abord pour eux.<br />
La deuxième boîte du modèle est<br />
consacrée à la communauté, à travers<br />
les forums citoyens et les Conseils locaux<br />
de santé mentale que vous connaissez<br />
en France et qui organisent notamment<br />
des évènements publics une fois par an.<br />
Chez nous au Québec, depuis quelques<br />
années nous avons mis en place ce que<br />
nous appelons les forums citoyens, soit un<br />
évènement d’une journée et si vous me le<br />
permettez on va voir comment à travers<br />
un forum citoyen on peut aborder les cinq<br />
grands droits de la Convention relative<br />
aux droits des personnes handicapées de<br />
l’ONU.<br />
Le premier droit est celui d’avoir un niveau<br />
de vie adéquat et d’avoir la protection sociale<br />
consacré par l’article 28 de la Convention. De<br />
sorte qu’à Montréal en mai dernier il y a eu un<br />
troisième forum citoyen. Alors que les deux<br />
premiers forums avaient été tenus à l’intérieur<br />
même de l’établissement public de santé<br />
mentale, le troisième forum a eu lieu dans un<br />
arrondissement de Montréal où il y a une forte<br />
concentration de ressources résidentielles<br />
spécialisées, en partie en raison du bas coût<br />
de l’immobilier comparé à d’autres parties<br />
plus centrales de la ville. Cette concentration<br />
élevée génère une certaine tension dans<br />
le voisinage, donc on avait pris un peu le<br />
risque d’aller là-bas où certaines personnes<br />
questionnaient la trop forte présence<br />
d’usagers. Le forum citoyen est le moment<br />
de considérer comme légitimes ces craintes<br />
pour pouvoir engager un dialogue constructif.<br />
Le second droit de la Convention porte<br />
sur celui de jouir du meilleur état de santé<br />
physique et mental possible, c’est l’article 25<br />
de la Convention. Or le comité organisateur<br />
du forum citoyen, qui pourrait être ici le<br />
Conseil local de santé mentale, avait parmi<br />
ses membres une représentante du Centre<br />
local de santé et services sociaux. Ce sont<br />
des gens qui donnent les soins en première<br />
ligne et à toute la population d’un territoire.<br />
L’idée ici est de réfléchir ensemble : pourquoi<br />
les gens qui ont besoin de services de santé<br />
mentale devraient-ils se rendre hors de la ville<br />
pour aller dans des structures spécialisées<br />
où on vous voit handicapé, déjà spécial, si<br />
vous devez vous rendre là ? L’OMS est très<br />
sensible et tient à promouvoir partout dans<br />
le monde une meilleure intégration des soins<br />
de santé physique et de santé mentale parce<br />
qu’une des grandes erreurs en occident aura<br />
été de diviser le corps et l’esprit et ce que l’on<br />
souhaite maintenant, c’est revenir sur cette<br />
dichotomie.<br />
Le troisième droit de la Convention est<br />
celui d’exercer sa capacité juridique et le<br />
droit à la liberté et la sécurité individuelle. On<br />
116 AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT - 4 ème rencontre internationale du CCOMS (Lille, France)<br />
AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT - 4 ème rencontre internationale du CCOMS (Lille, France)<br />
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