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tout seul ! Ça a été très dur, j’ai souffert<br />

énormément mais j’y suis arrivé.<br />

Marc Laporta : La sortie du labyrinthe<br />

a été aidée par un proche qui a dit « ça ne<br />

te correspond pas ». Comment est-ce que<br />

vous pensez qu’un clinicien aurait pu vous<br />

décoder ? Qu’est-ce qui aurait fallu qu’un<br />

clinicien prenne en compte ?<br />

Hervé Guiheneuf : Ça, je ne sais pas !<br />

J’étais enfermé dans une bulle, j’étais<br />

suicidaire donc pour le médecin je me doute<br />

que ça devait être difficile de dire « on va<br />

arrêter les médicaments sur ce monsieur qui<br />

au final ne pense qu’à se supprimer ».<br />

Marianne Schoendorff : Merci<br />

beaucoup. Je dirige une association de<br />

santé mentale qui porte aussi un GEM et<br />

j’ai un master en éducation thérapeutique<br />

au titre de patiente experte. Effectivement,<br />

j’ai l’impression qu’il peut y avoir en France<br />

un problème en termes de diagnostic et<br />

de communication du diagnostic puisque<br />

je vois beaucoup de gens qui n’ont pas<br />

de diagnostic dans mon association pour<br />

bipolaires, ou alors l’arrivée du diagnostic<br />

a mis vraiment beaucoup de temps. En<br />

fonction des personnes, vous parliez d’un<br />

effet iatrogène du diagnostic, il me semble<br />

que ça peut être le cas en fonction de la<br />

manière dont ce diagnostic est communiqué.<br />

J’essaye de rebondir par rapport à ce que<br />

vous disiez, c’est-à-dire si le diagnostic n’est<br />

pas expliqué et rattaché à des éléments de<br />

notre contexte, c’est complétement plaqué et<br />

du coup, effectivement, on se retrouve soimême<br />

à essayer de correspondre à ce qui<br />

est marqué dans nos livres et on se fait soimême<br />

son propre pronostic. Surtout qu’en<br />

France, le rétablissement n’existe pas, on est<br />

donc dans une catégorie pour toujours. J’ai<br />

l’impression qu’on est catégorisé dans un<br />

diagnostic et que tous les aspects sociaux ne<br />

sont pas pris en compte par le même service.<br />

D’un point de vue personnel, c’est vraiment<br />

compliqué à intégrer.<br />

Pour les recommandations, il faut surtout<br />

préconiser une nouvelle communication entre<br />

les usagers et les cliniciens.<br />

Marc Laporta : Je vais essayer de<br />

résumer ce que j’ai compris jusqu’ici, et peutêtre<br />

certains d’entre vous voudront compléter.<br />

Il serait intéressant de prendre en compte ces<br />

aspects contextuels. Nous avons entendu<br />

les cliniciens dire que cela peut leur être utile.<br />

C’est évident pour les pédopsychiatres, mais<br />

cela semble également utile en psychiatrie<br />

adulte. L’utilité clinique est importante. Dans<br />

ce sens, c’est évidemment utile pour les<br />

usagers. Je pense que nous avons eu une<br />

réponse forte mais j’aimerais savoir si certains<br />

usagers pensent que cela n’est pas utile et<br />

qu’ils nous expliquent pourquoi. Aujourd’hui,<br />

nous voulons consolider les arguments à<br />

donner à l’OMS sur la décision d’inclure ou<br />

non ces codes dans les diagnostics et la<br />

pratique clinique. Le troisième groupe qui<br />

pourrait en bénéficier est celui des familles.<br />

Nous avons entendu qu’il était utile pour<br />

les familles de comprendre que l’aspect<br />

contextuel peut avoir une influence. J’aimerais<br />

entendre des réactions. Est-ce utile pour ces<br />

trois groupes ?<br />

Chantal Roussy : Oui, nous avons<br />

un problème entre les méthodes des<br />

pédopsychiatres qui effectivement prennent<br />

en compte tous les éléments globaux et la<br />

psychiatrie adulte qui, à quinze ans et six mois,<br />

reçoit des jeunes avec des méthodes de la<br />

psychiatrie adulte chronique. Le travail n’est<br />

pas le même entre les premier prodromes et<br />

l’installation de la chronicité. En France, on ne<br />

sait pas du tout faire.<br />

Marc Laporta : D’accord et le rapport<br />

avec les aspects contextuels, êtes-vous<br />

capable de le clarifier ? Est-ce qu’on prend plus<br />

en compte d’emblée les aspects contextuels<br />

chez les enfants que chez les adultes ?<br />

Chantal Roussy : Très souvent les<br />

premiers symptômes sont invisibles, ils<br />

arrivent entre quinze et dix- sept ans. A<br />

partir de là, on demande à ce que l’aspect<br />

contextuel soit pris en charge et qu’on ne<br />

prenne pas uniquement en charge la maladie<br />

au sens le plus réducteur du terme.<br />

Marc Laporta : On fait ici un lien entre<br />

facteurs contextuels et la notion d’éviter<br />

la chronicité. Est-ce là ce lien conceptuel ?<br />

Ces deux aspects vont ensemble pour vous ?<br />

Chantal Roussy : Oui, bien-sûr. Les<br />

psychiatres pour adultes sont formés à la<br />

maladie, ils cherchent la maladie. Je caricature<br />

car tout le monde n’est pas pareil, mais<br />

malgré tout, un psychiatre adulte soigne des<br />

personnes âgées et qui ont déjà un parcours<br />

dans la maladie. Quand on reçoit un jeune,<br />

on ne peut absolument pas savoir comment<br />

il va évoluer dans la mesure où c’est vraiment<br />

dépendant du contexte.<br />

Stéphanie Larchanché : Bonjour, je suis<br />

anthropologue médicale au centre François<br />

Minkowska à Paris. Je voudrais ajouter que<br />

l’anthropologie médicale à partir des études de<br />

terrain sur la relation entre usagers et experts<br />

a pu plus ou moins formaliser et théoriser<br />

cette approche sur la nécessaire prise en<br />

compte du contexte social de la maladie.<br />

Au centre François Minkowska, nous avons<br />

développé une approche de prise en charge<br />

de nos patients qui est basée sur ce cadre<br />

d’anthropologie médicale et ce qu’on appelle<br />

la confrontation des modèles explicatifs de la<br />

maladie. C’est une confrontation qui permet<br />

de prendre en compte toute cette dimension<br />

des déterminants sociaux de la santé qui<br />

centrent le diagnostic sur la personne et<br />

pas seulement sur ses symptômes, donc la<br />

personne dans son contexte global. On a,<br />

sur la base de cette approche, pu développer<br />

une fiche clinique des recueils de données du<br />

patient pour établir le diagnostic qui prend<br />

en compte toute cette dimension globale du<br />

médico-psycho-social comme on l’appelle<br />

dans nos pratiques.<br />

Marc Laporta : Est-ce que vous avez une<br />

version qui se fait en quinze minutes ?!<br />

Rachid Bennegadi : C’est parfaitement<br />

faisable, nous avons élaboré ce travail avec<br />

le département de l’information médicale<br />

et nous avons introduit toutes ces notions<br />

contextuelles. Nous avons des propositions<br />

très concrètes sur les éléments à ajouter<br />

à cette série V et Z. Les cliniciens s’y<br />

retrouveront car on comprend mieux ce<br />

qu’on nous demande et ça permet encore<br />

une fois de pouvoir dialoguer avec le patient.<br />

On est sur autre chose que le risque de<br />

se retrouver à s’occuper que de la maladie.<br />

On entend la maladie comme nos amis Nord-<br />

Américains avec leur notion de « sickness,<br />

illness, disease ». Quand le psychiatre<br />

arrive à faire le diagnostic, ça veut dire qu’il<br />

a tenu compte du « sickness », donc des<br />

déterminants sociaux et de la souffrance<br />

psychique. « Illness », c’est le patient qui parle.<br />

J’ai entendu beaucoup de personnes dire<br />

qu’elles ne sont pas entendues, mais elles<br />

n’ont pas le temps de parler. Alors pourquoi<br />

nous avons fait ça ? Très rapidement, le fait de<br />

travailler sur le transculturel depuis cinquante<br />

ans, c’est-à-dire d’avoir été obligé de tenir<br />

compte de la stigmatisation qui s’est mise en<br />

place, on a compris comment réintégrer tout<br />

cela dans le droit commun, dans une sorte de<br />

stratégie éthique.<br />

Ken Thompson : Bonjour, je viens de<br />

Pittsburgh aux Etats-Unis et je voulais<br />

donner deux informations commentaires.<br />

Nous avons eu un grand mouvement aux<br />

Etats-Unis pour retrouver un contexte favorable<br />

de soins en santé, c’est pourquoi nous<br />

travaillons sur les déterminants sociaux et les<br />

processus de soins. Les gens sont malades<br />

pour certaines raisons et ce n’est pas pour les<br />

même raisons qu’ils vont être en bonne santé.<br />

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AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT - 4 ème rencontre internationale du CCOMS (Lille, France) AUTONOMISATION / EMPOWERMENT : AGIR AUTREMENT - 4 ème rencontre internationale du CCOMS (Lille, France)<br />

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