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La main froide

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Dorana se crispa en entendant ces mots. Les choses allaient<br />

trop vite à son goût. Elle s’approcha du lit et posa les doigts sur<br />

la barre de métal nickelée supportant la feuille de température.<br />

Adam était étendu sur le dos, des tubes fichés dans les narines,<br />

la bouche et les bras. Il avait la respiration rauque. Le bras<br />

« malade » avait été fixé au matelas à l’aide d’une sangle de cuir.<br />

Un drain sortait des pansements pour s’enfoncer dans une<br />

bouteille. Dorana dévisagea son mari sans rien éprouver. Ni<br />

remords ni attendrissement. Elle en fut tout à la fois rassurée et<br />

effrayée.<br />

« Mon Dieu ! pensa-t-elle, je ne savais pas que je le haïssais à<br />

ce point. »<br />

Un grondement sourd monta du coin de la chambre. C’était<br />

Dust, qui tirait sur sa laisse. Dorana ne tourna pas la tête. Elle<br />

devina que le chien la fixait en montrant les dents. Par bonheur,<br />

la muselière dissimulait ce rictus accusateur. « Il sait, songea-telle.<br />

Il a toujours su. »<br />

— Il n’a pas l’air de beaucoup vous aimer, observa Moreno.<br />

— Il est jaloux, dit simplement Dorana. C’est une bête<br />

difficile dont Adam s’est entiché. Je crois que la police voulait le<br />

piquer. Mon mari l’a sorti du chenil in extremis.<br />

Elle s’entendait parler à travers un mur de coton et<br />

s’évertuait à articuler les mots avec précision, comme le font les<br />

ivrognes lorsqu’ils sentent leur élocution devenir pâteuse. <strong>La</strong><br />

présence de Moreno lui donnait envie de hurler, elle aurait aimé<br />

pouvoir lui arracher les yeux.<br />

Elle continuait à fixer Adam sans savoir ce qu’elle devait<br />

faire ou dire. Comment une épouse aimante se serait-elle<br />

comportée ? Fallait-il tomber à genoux à son chevet ? Se jeter<br />

sur son corps en poussant des gémissements de souffrance ?<br />

C’était ainsi qu’on faisait dans les soap-operas, mais dans la<br />

réalité… ? Le poignet bandé, raccourci, éveillait en elle une<br />

affreuse nausée. Elle reporta le regard sur Adam. Il avait maigri<br />

et son visage présentait une vilaine coloration plombée. <strong>La</strong><br />

barbe proliférant sur ses joues était presque blanche. Elle en fut<br />

frappée. D’un seul coup, il lui parut beaucoup plus âgé qu’à<br />

l’ordinaire… et son dégoût s’en accrut d’autant. Elle se demanda<br />

s’il était réellement inconscient ou s’il simulait, pour se donner<br />

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