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La main froide

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— Et roulez en gardant les vitres remontées ! lança-t-elle<br />

avec un ton de panique que son accent rendait encore plus<br />

théâtral.<br />

Dan recula précipitamment, comme si le mufle d’un<br />

quelconque Minotaure allait soudain jaillir d’entre les barreaux<br />

pour lui déchiqueter le bras. S’efforçant de rester calme, il<br />

grimpa dans la camionnette et attendit que la grille daigne<br />

s’entrebâiller. Du regard, il vérifia que les portières de la voiture<br />

étaient bien verrouillées et appuya sur la pédale dès que<br />

l’ouverture fut assez grande pour laisser passer la fourgonnette.<br />

Il conduisait penché sur le volant, scrutant l’espace autour de<br />

lui, cherchant à deviner de quel endroit viendrait l’attaque. Il<br />

voyait déjà le molosse bondissant à sa rencontre, fracassant le<br />

pare-brise pour le saisir à la gorge. Tout lui semblait possible…<br />

<strong>La</strong> maison était blanche, éblouissante sous le soleil.<br />

L’inévitable piscine s’auréolait de marbre à veinules violettes. <strong>La</strong><br />

pierre, d’une finesse de soie, évoquait une peau de femme. Le<br />

« parc » courait autour de cette oasis bordée de palmiers et de<br />

citronniers, une herbe drue, vivace, fruit d’un travail constant. Il<br />

y avait peu d’endroits où échapper au regard, juste quelques<br />

statues animalières en bronze verdi. Un combat de nègres et de<br />

crocodiles à la manière des artistes de Floride du siècle dernier,<br />

un ours affrontant un lion des montagnes. Le tout traité avec un<br />

parti pris tragique outré qui devait effrayer les dames lors des<br />

réceptions mondaines.<br />

Dan roulait au pas. Le gravier grésillait sous les roues de la<br />

camionnette. Une femme grassouillette au visage de poupée<br />

sortit de la maison. Une Mexicaine aux cheveux très noirs que<br />

des peignes de nacre essayaient de discipliner. Elle s’avança sur<br />

la pelouse comme si elle s’aventurait dans un champ de mines,<br />

en jetant des coups d’œil effrayés de tous côtés.<br />

Elle devait avoir une trentaine d’années, ses <strong>main</strong>s<br />

paraissaient curieusement petites et délicates au bout de ses<br />

bras replets. En arrivant près du véhicule, elle fit signe à Dan de<br />

descendre la glace.<br />

— C’est à cause du chien, expliqua-t-elle d’une voix<br />

haletante. On vous a parlé de lui ? Je suis sûre que non !<br />

Personne ne veut travailler ici à cause de cette saloperie de<br />

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