13.07.2013 Views

L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal

L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal

L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

monde de l’homosexualité que les jeunes veulent bien le prétendre.<br />

D’une part, leurs dis<strong>cour</strong>s sur l’insulte laissent s’échapper un certain nombre<br />

de contradictions et d’ambigüités. D’autre part, leurs représentations<br />

des hommes gais demeure très proche de celles qu’ils se font de ceux qui<br />

sont les récipiendaires de ces insultes.<br />

Par exemple, alors qu’on affirme que l’insulte n’est <strong>pas</strong> liée à<br />

l’homosexualité et n’est utilisée que pour se niaiser entre garçons, on<br />

développe spontanément sur le fait qu’une des formes de taquineries<br />

consiste à simuler des avances homosexuelles sur les autres, qui sont<br />

assurées d’être accueillies par des «t’es gai, arrête». On pourrait répliquer<br />

que l’utilisation de l’insulte <strong>dans</strong> ces cas n’est qu’une autre application du<br />

«t’es stupide», cette fois-ci adressée à des personnes jouant le rôle de gais.<br />

Cependant, d’autres éléments – souvent sournois – confirment l’existence<br />

d’un lien entre «t’es gai» et «t’es un homme homosexuel». Lorsqu’on leur<br />

de<strong>ma</strong>nde s’il existe des insultes pour les lesbiennes, des jeunes répondent<br />

qu’il n’y en a <strong>pas</strong> pour elles – «contrairement aux hommes gais». Cela<br />

indique, mini<strong>ma</strong>lement, que «t’es un homme homosexuel» est un des sens<br />

pouvant être compris <strong>dans</strong> «t’es gai». En fait, des jeunes mentionnent<br />

eux-mêmes qu’il y a incertitude sé<strong>ma</strong>ntique. Parfois ils reçoivent l’insulte<br />

et ils ne savent <strong>pas</strong> si l’intention est de faire référence à une homosexualité<br />

présumée ou à autre chose (stupidité, faiblesse, efféminement, etc). Mais<br />

ils savent que la référence à l’homosexualité est tapie <strong>dans</strong> le potentiel<br />

sé<strong>ma</strong>ntique de « t’es gai» et qu’il est possible de jouer avec elle.<br />

De l’autre côté, le fort attachement de l’insulte à l’efféminement et<br />

à la faiblesse – aussi fort sinon plus que la stupidité – n’est <strong>pas</strong> étranger à<br />

l’homosexualité. Si les jeunes insistent sur un découpage nuancé où ils<br />

séparent les gais des efféminés, leurs représentations des hommes gais<br />

<strong>GRIS</strong>-MONTRÉAL RAPPORT DE RECHERCHE<br />

2007<br />

glissent souvent à leur insu vers l’efféminement (Bastien Charlebois,<br />

2007). En d’autres mots, plusieurs d’entre eux annonceront d’office que les<br />

personnes efféminées ne sont <strong>pas</strong> toutes homosexuelles et inversement,<br />

<strong>ma</strong>is en développant plus tard, ils ajouteront qu’ils peuvent reconnaître les<br />

personnes homosexuelles par une série d’indices rattachés à l’efféminement.<br />

D’autres vont aussi admettre se de<strong>ma</strong>nder, dès qu’ils voient un<br />

garçon efféminé, s’il n’est <strong>pas</strong> homosexuel :<br />

- «Il y a du monde, que je vois mettons, en train de <strong>ma</strong>rcher,<br />

puis ils ont des petites hanches et ils <strong>ma</strong>rchent comme des filles,<br />

tu sais.» (Olivier)<br />

- «Tu fais le lien rapidement.» (Sandra)<br />

- «Ouan, c’est ça.» (Olivier)<br />

Par conséquent, il y a toujours un lien – au moins indirect – entre<br />

«t’es gai» et les hommes gais.<br />

Bien que les garçons soient en moyenne les plus ardents défenseurs<br />

de l’insulte, des personnes – des filles de surcroît – qui ont des proches<br />

homosexuels peuvent aussi la mini<strong>ma</strong>liser ou professer une ambivalence<br />

à son endroit. Ainsi certaines d’entre elles affirment que «c’est juste<br />

une expression» et qu’il n’y a <strong>pas</strong> lieu de s’en alarmer. Ou encore être<br />

incertaines quant à l’analyse à en faire :<br />

«Mais il y a des personnes qui font des commentaires (…) comme<br />

« ah, espèce de tapette » (…) je le prends <strong>pas</strong> comme personnel, c’est juste<br />

un mot, il faut dire, puis je pense <strong>pas</strong> qu’ils traitaient la personne de gaie,<br />

que c’était péjoratif. Je pense que c’est juste plus une expression.» (Mélissa)<br />

«Si je sais que pour eux c’est <strong>pas</strong> nécessairement relié à gai<br />

même si pour de vrai ça l’est relié, <strong>dans</strong> <strong>ma</strong> tête ils traitent <strong>pas</strong><br />

quelqu’un de gai ou c’est <strong>pas</strong> méchant.» (Marianne)<br />

98

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!