L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal
L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal
L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
par le quartier gai puis, le professeur en tant que tel était homophobe.<br />
Quand on a <strong>pas</strong>sé à côté, elle voulait <strong>pas</strong> qu’on regarde. Ben elle voulait<br />
qu’on regarde, elle voulait <strong>pas</strong> qu’on fixe les gens puis on a fermé toutes<br />
les fenêtres. Mais ce que je trouve stupide, c’est de faire nier l’évidence<br />
qu’y a ça puis de ne <strong>pas</strong> expliquer aux gens « Eux s’aiment, pis tout ça,<br />
puis tu sais c’est leur choix ». Mais en 6 e année, ils m’ont fait couper<br />
ça genre «c’est des personnes à part». (Fabien)<br />
Corollairement avec la désapprobation des actes homophobes,<br />
il y a l’expérience de l’empathie à l’égard de ce que les jeunes victimes<br />
peuvent ressentir. Des jeunes peuvent référer à des circonstances qui ont<br />
insufflé un certain éveil, tel que le fait d’avoir vu de près la souffrance<br />
qu’un gai rejeté éprouve : «c’était touchant pour moi puis sa famille de<br />
savoir que quelqu’un peut être aussi méchant avec une personne». Ces circonstances<br />
peuvent aussi être la réaction de colère de la victime à la suite<br />
de gestes homophobes qu’un jeune vient de poser :<br />
«Puis quand il s’est fâché sur le coup, ça m’a vraiment <strong>ma</strong>rqué.<br />
(…) T’sais, on n’est vraiment <strong>pas</strong> <strong>dans</strong> sa peau là. On sait <strong>pas</strong> t’sais<br />
si j’avais un gros nez puis à chaque fois que quelqu’un me voyait, il fait<br />
« ouan, ton nez, il est <strong>pas</strong> pire ». Puis à chaque fois quelqu’un [dit]:<br />
« ouan ton nez est <strong>pas</strong> pire ». À la fin là, que je serais vraiment fâché.<br />
« Tu veux le voir mon nez?» (Fabien)<br />
Dans cet exemple, le jeune participant prend non seulement<br />
conscience de la douleur infligée par son geste, <strong>ma</strong>is il se rend également<br />
compte de la puissance de l’impact que crée la répétition constante,<br />
régulière, «banale» de l’insulte. Ce garçon n’est <strong>pas</strong> le seul à voir cet aspect<br />
«supplice-de-la-goutte» : «crier gai, peut-être que la personne va s’en<br />
foutre, <strong>ma</strong>is après un nombre de temps, la personne peut te tomber sur les<br />
<strong>GRIS</strong>-MONTRÉAL RAPPORT DE RECHERCHE<br />
2007<br />
nerfs». Pour une personne qui est «vraiment gaie», on comprend de surcroît<br />
la crainte que peut insuffler en elle cette pratique : «C’est ça qui fait<br />
<strong>ma</strong>l, à chaque fois qu’un gars dit tapette, plein d’insultes. Si t’es gai, tu te<br />
dis « si j’avouais, ils vont me traiter de tapette ». Si ces commentaires sont<br />
émis après quelques dis<strong>cour</strong>s de justification de l’insulte, il est possible<br />
qu’un garçon s’y oppose dès le départ et affirme qu’il faille faire attention<br />
aux personnes à qui on le dit, «car on pourrait les offenser».<br />
Les discussions sur l’homophobie ont également suscité quelques<br />
questionnements et de la curiosité sur ce que les gais et lesbiennes pouvaient<br />
ressentir devant les opinions négatives qu’on se fait d’eux. Il s’agit<br />
d’une autre <strong>ma</strong>nifestation d’empathie, ou du moins d’un premier <strong>pas</strong>,<br />
d’une volonté mini<strong>ma</strong>le d’aller vers l’autre.<br />
5.3.2. Habitudes et volontés d’intervention<br />
Les jeunes sont témoins d’homophobie <strong>dans</strong> leur vie quotidienne. Ce qu’ils<br />
en reconnaissent varie, de même que l’émotion que ceci suscite en eux.<br />
Certains ne semblent <strong>pas</strong> considérer que l’homophobie blesse – notamment<br />
sous la forme de l’insulte – tandis que d’autres en sont exaspérés.<br />
En raison de cette diversité des dispositions à l’empathie, nous pouvons<br />
supposer que la propension à s’interposer devant des gestes homophobes<br />
diffère sensiblement d’une personne à l’autre.<br />
Bien que cette recherche tente de déterminer s’il est possible<br />
d’en<strong>cour</strong>ager des jeunes à devenir des alliés, il serait erroné de présumer<br />
que la solidarité ne s’exprime <strong>pas</strong> déjà sur le terrain. C’est toute la gamme<br />
des habitudes et des prédispositions à l’intervention qui est exposée ici, du<br />
refus de s’interposer à la pratique régulière de la solidarité. Si pratique et<br />
intention sont jumelées, c’est à défaut d’avoir pu de<strong>ma</strong>nder des précisions<br />
103