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L'homophobie, pas dans ma cour! - GRIS-Montréal

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attitudes négatives envers les personnes non hétérosexuelles. À cheval<br />

entre l’explication psychique et nor<strong>ma</strong>tive, elle suppose, à la <strong>ma</strong>nière<br />

de cette première, que l’identité se fonde par l’opposition. Ce n’est donc<br />

qu’en se dévêtissant de ces « étiquettes » et en laissant s’exprimer un flou<br />

sexuel fondamental que les préjugés pourraient être abolis.<br />

Hormis le fait que certains auteurs reprochent au concept d’hétéronor<strong>ma</strong>tivité<br />

de réduire les préjugés à une simple question d’adoption de<br />

normes et de représentations sociales, ignorant la complexité des rapports<br />

de pouvoir qui sont à la source des résistances, des occultations et des<br />

représentations hégémoniques (Adam, 1998; Jackson, 2005), il suppose à<br />

tort que l’identité se construit forcément par antagonisme <strong>dans</strong> un rapport<br />

conflictuel à l’autre. Par ailleurs, il reproduit à l’inverse le dis<strong>cour</strong>s hégémonique<br />

hétérocentré. Présupposer que « tout individu est fondamentalement<br />

hétérosexuel, envers et contre ses propres convictions» 41 devient<br />

« tout individu est fondamentalement queer ou polymorphe sexuel, envers<br />

et contre ses propres convictions ». Certes, la croyance en des catégories<br />

pures et nettement délimitées – un « vrai » homme, une « vraie »<br />

lesbienne, un « vrai » Blanc – se construit effectivement sur le rejet de celui<br />

ou celle qui ne s’y conforme <strong>pas</strong>. Seulement l’identité n’est <strong>pas</strong> confinée<br />

à la délimitation claire et peut très bien s’i<strong>ma</strong>giner de façon approxi<strong>ma</strong>tive,<br />

accueillant ainsi la multiplicité et réduisant le rejet. L’approxi<strong>ma</strong>tif,<br />

toutefois, ne repose <strong>pas</strong> sur l’abolition pure et simple des catégories.<br />

L’empreinte du social et les rapports sexués<br />

L’hétérosexisme, comme nous l’avons vu plus haut, met en exergue les<br />

rapports de pouvoir entre hommes et femmes, tandis que l’hétéronor<strong>ma</strong>tivité<br />

porte une attention particulière à la gestion des identités genrées.<br />

<strong>GRIS</strong>-MONTRÉAL RAPPORT DE RECHERCHE<br />

2007<br />

Mais tous deux, de part et d’autre, considèrent les représentations complémentaristes<br />

attribuant aux hommes et aux femmes des traits propres<br />

et distincts comme étant au cœur des jugements « homophobes » envers<br />

les personnes homosexuelles.<br />

Quelques auteurs défendent en effet l’hypothèse selon laquelle<br />

les attitudes négatives envers les gais et les lesbiennes seraient essentiellement<br />

une extension du sexisme qui se <strong>ma</strong>nifesterait par l’imposition de<br />

modèles sexués rigides (Pharr, 1997; Welzer-Lang, 1994; Sears, 1997).<br />

« Or l’homophobie est fortement liée au sexisme. L’homophobie<br />

est en effet l’intériorisation du sexisme <strong>dans</strong> ses rapports aux autres.<br />

L’homophobie est la discrimination envers les personnes qui montrent, ou<br />

à qui l’on prête, certaines qualités (ou défauts) attribués à l’autre genre.<br />

Sexisme et homophobie érigent des frontières distinctes et étanches entre<br />

les genres. Sexisme et homophobie organisent la discrimination envers les<br />

personnes, hommes ou femmes, qui ne se conforment <strong>pas</strong> aux i<strong>ma</strong>ges<br />

stéréotypées des genres. Sexisme et homophobie sont les produits d’une<br />

pensée essentialiste, pour laquelle les rapports entre les sexes sont<br />

immuables. (Welzer-Lang, 1994, p. 17)<br />

Le <strong>ma</strong>intien de l’ordre genré, qui <strong>pas</strong>se par sa naturalisation ou son<br />

essentialisation, supposerait qu’il n’y ait qu’homme et femme, que chacun<br />

se dé<strong>ma</strong>rquerait par des traits, affinités et compétences distincts, et<br />

que tous deux ne pourraient trouver leur intégrité que <strong>dans</strong> la réunion – sexuelle<br />

et/ou domestique – de leur complémentarité. En légiti<strong>ma</strong>nt la répartition<br />

de rôles donnés et en assoyant certains modes d’interaction, cette opération<br />

a l’heur d’assurer la survie des rapports de pouvoir existants.<br />

Or, comme les hommes et les femmes présentent beaucoup plus de<br />

variété et de non-conformité que ces représentations binaires et complé-<br />

41 Ce type de dis<strong>cour</strong>s a longtemps été servi aux personnes homosexuelles, qu’on disait <strong>ma</strong>lades ou ayant dévié de la trajectoire fondamentale de l’hétérosexualité et ce, envers et contre leurs sentiments propres.<br />

41

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