28.04.2013 Views

130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne

130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne

130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Le mot est souvent associé aux projets socialistes de refonte complète de la société. En<br />

évoquant par exemple KROPOTKINE, MALATESTA, RECLUS... on parlera d’utopies communistesanarchistes.<br />

Des groupes contemporains vont dans le même sens, comme l’UTCL (Union des<br />

Travailleurs Communistes Libertaires) qui en 1986 à son IV° congrès rédige un Projet « Pour<br />

l’alternative. Projet communiste libertaire ». Les classer d’utopies, c’est bien sûr un peu une<br />

manière de les critiquer en insistant sur ce que ces projets ont de rêveries, d’aspects<br />

irréalisables...<br />

Au XX ème siècle, de plus en plus d’analystes du marxisme mettent l’accent sur son<br />

caractère utopique, d’autant, comme le remarque Frédéric ROUVILLOIS qu’un auteur fondamental<br />

sur ce thème, comme MANNHEIM, fait de l’utopie un mouvement foncièrement hostile à l’ordre<br />

existant et un moteur essentiel de la transformation sociale. 54 Cette analyse va être dominante<br />

pendant longtemps chez beaucoup d’essayistes travaillant sur les utopies.<br />

Pour les socialistes, le terme se confond souvent avec celui d’« idéal », dont la<br />

« nécessité » 55 est réaffirmée comme le dit si bien Fernando AINSA. Un René DUMONT en 1974<br />

ou un Albert JACQUARD plus récemment parlent même d’ « Utopie ou la mort » comme seuls<br />

choix possibles restant à l’humanité contemporaine devant la crise généralisée (politique, morale<br />

et économique...) qui s’annonce.<br />

Frédéric ROUVILLOIS, en 1998, après une rigoureuse analyse des définitions du terme<br />

« utopie » tranche en faveur de cette interprétation stricte : l’utopie serait résolument moderne<br />

(au mieux depuis la Renaissance) et occidentale. Il exclut tous les penseurs antiques, même<br />

PLATON autant que les millénaristes médiévaux, les arcadies et toute référence à l’âge d’or...<br />

Pour lui, n’est utopie que tout projet proposant :<br />

- un nouveau système politique<br />

- visant à la perfection<br />

- créé par l’homme et pour l’homme<br />

- bénéficiant d’une organisation minutieuse et d’un rationalisme intégral. 56 Sa vision fort restrictive<br />

a le mérite de la rigueur et de la clarté d’analyse, mais exclut bien de réels textes et essais<br />

utopiques. Elle est très proche de celle de Raymond TROUSSON, qui, il faut le rappeler rejette<br />

hors de son utopie (littéraire)tous les textes politiques et sociaux car non narratifs.<br />

Dans son exposé de 1958, le militant anarchiste italien Ugo FEDELI, profitant de son emploi<br />

chez OLIVETTI pour parfaire ses recherches, précisait dans sa belle introduction : « L’utopie fut<br />

et est le songe de l’homme assailli par la misère morale et matérielle qui l’entoure et voudrait<br />

l’engloutir. C’est la tentative de sortir le regard de la trivialité quotidienne pour le porter vers de<br />

lointaines régions de l’idéal pour y construire la cité nouvelle, des justes et des parfaits, la ‘cité<br />

du soleil’ pour paraphraser Tommaso CAMPANELLA. L’utopie est l’aspiration à une forme<br />

parfaite et générale de vivre, qui a nourri les hommes de tous les temps 57 ».<br />

Ce projet global (« modèle global de société idéale ») est à la fois, pour GONZÁLEZ<br />

MATAS Enrique, un projet de réalisation sociale et un moyen d’impulser le progrès social. Il<br />

s’efforce de préciser ces notions de manière simple et donc intéressante dans son introduction à<br />

son livre sur les Utopías Sociales Contemporáneas (Málaga, 1994). Le projet comprend 3<br />

phases :<br />

1- l’idée qui le définit<br />

2- l’effort pour le réaliser, et sa réalisation<br />

3- l’utopie accomplie (communautés, États socialistes...).<br />

Le moyen d’impulser lui repose également sur 3 étapes :<br />

1- une critique du présent, des structures contemporaines,<br />

2- une prospective plus ou moins précise<br />

3- un désir d’engagement, de militantisme, de réalisation.<br />

Donc l’utopie, à la différence des croyances religieuses ou du millénarisme, est un projet<br />

que l’homme cherche à réaliser de lui-même, par sa propre position volontariste. Et si ce projet<br />

est « une utopie aujourd’hui » ce peut-être « la réalité de demain » comme le rappelle Boutros<br />

BOUTROS-GHALI au colloque de Blois en 2000.<br />

54 ROUVILLOIS Frédéric L’utopie, 1998, p.13-14<br />

55 AINSA Fernando Necesidad de la utopia 1977<br />

56 ROUVILLOIS Frédéric, op.cit., p.242<br />

57 FEDELI Ugo Un viaggio alle isole utopia, 1958<br />

14

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!