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130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne

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En Colombie et dans le Nord de l’Amérique du Sud, les anarchistes revendiquent la<br />

tradition des guérillas de fugitifs noirs, comme celle de Benkos BIOHO 42 au début du XVII vers<br />

Cartagena de Indias qui serait peut-être la première guérilla d’Amérique latine ? Il aurait crée le<br />

premier territoire libre américian dans le marécage de la Mantuana vers Carthagène. Après 30<br />

ans de lutte il est torturé et exécuté en mars 1630.<br />

La résistance et l’auto-organisation des « cimarronos » (noirs réfractaires) s’exprime<br />

dans le mouvement des « palenques » (camps entourés de palissades) qui formeraient de<br />

« véritables républiques indépendantes ». leur autonomie se traduit également dans un idiome<br />

créole, le « palenquero ». il y aurait eu plus de 100 palenques sur les trois siècles de l’Époque<br />

moderne.<br />

Au XVII° et XVIII° siècles les communautés de « las Rochelas » comptaient tous ceux qui<br />

refusaient les pressions étatiques, religieuses et fiscales.<br />

b) Communautés libertaires pirates<br />

Dans un ouvrage dont l’essentiel est l’analyse de la supposée « république de Salé » 43<br />

sur la côte atlantique de l’actuel Maroc, l’auteur libertaire, célèbre sous le pseudonyme de Hakim<br />

BEY, mais ici utilisant son vrai nom Peter LAMBORN WILSON, parle de « position proto-anarchoindividualiste<br />

» en décrivant l’idéologie de la piraterie. Bien sûr la prudence lui fait dire qu’il ne<br />

s’agit pas d’une position « philosophique » mais d’une ébauche de vie libre, luttant contre les<br />

tabous, et très en avance sur les États contemporains du XVII° siècle. Cette « république<br />

corsaire mauresque du Bou Regreg » ne serait donc qu’un « compromis » entre des États<br />

autoritaires de l’époque et les « utopies pirates ».<br />

Pour préciser les termes, pour LAMBORN WILSON, le boucanier est un homme libre au<br />

départ plutôt terrien, et devenu pirate par nécessité. Le pirate est un criminel ou un délinquant,<br />

attentif à ses libertés et à un certain égalitarisme. Le corsaire n’est qu’un mercenaire. C’est donc<br />

bien les pirates, rebelles pré-anarchistes, et préromantiques qui intéressent l’auteur.<br />

À Salé notamment, c’est chez les « renegados » qu’il trouve cette utopie pirate assez<br />

concluante malgré les limites reconnues. Ceux-ci sont souvent des européens sans foi ni loi, qui<br />

font leur nid en terre d’islam, parfois en adoptant les coutumes locales et même la religion !<br />

Pourtant les descriptions de son ouvrage très documenté ne sont guère pertinentes. Ces pirates<br />

sont soumis à des autorités issues de la violence la plus sauvage, et la soi-disant camaraderie<br />

des pirates ne tient guère face à la puissance sans opposition des petits chefs locaux que sont<br />

les capitaines autoproclamés des vaisseaux. Enfin les bribes de liberté à Salé sont souvent<br />

causées par le bon vouloir ou le désintérêt des puissances locales. Les enclaves du Bou Regreg<br />

(Salé, la Casbah, la future Rabat) fourmillent de conflits, de concurrences violentes et d’inégalités<br />

somme toutes traditionnelles.<br />

Le même auteur présente en fin du XVII° siècle et au début du XVIII°, d’autres modèles<br />

d’utopies pirates qui semblent plus avancées : elles sont plus « anarchistes » par leur volonté de<br />

défendre « la liberté individuelle maximale » ; elles sont plus radicales et communistes parfois<br />

avec « l’abolition de la hiérarchie économique ».<br />

C’est le cas de la confrérie égalitaire des « Frères de la Côte », les fameux boucaniers<br />

d’Hispaniola (futurs Haïti et Saint Domingue). L’île de la Tortue et New Providence aux Bahamas<br />

en sont des appendices. L’autonomie est inscrite dans les fameux « Articles » qui décrivent des<br />

pratiques de démocratie directe avec élection des capitaines : chaque navire devient une sorte<br />

de « démocratie flottante ». La suppression des châtiments corporels est un choix formidable<br />

pour une époque où les marins étaient de véritables esclaves sans droits face à une hiérarchie<br />

de fonction et de classe disposant d’un pouvoir absolu, surtout dans la flotte britannique.<br />

L’harmonie entre les races et les classes, même balbutiante, est une autre trace d’extraordinaire<br />

modernité. Mais cette utopie boucanière fut détruite par un de ses enfants, le renégat Henry<br />

MORGAN !<br />

Dans les Bahamas, la « horde sauvage » de Nassau, célèbre pour les exploits pas<br />

toujours reluisants des Barbe Noire et de Rackham le Rouge, présente également des traits<br />

égalitaires, sinon libertaires.<br />

42<br />

FAJARDO SÁNCHEZ Luis Alfonso Una historia del anarquismo en Colombia : Crónicas de utopía,<br />

Móstoles, 1999<br />

43<br />

LAMBORN WILSON Peter Utopies pirates, Paris, Dagorno, 1998<br />

16

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