130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne
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plusieurs conférences, notamment La société de l’avenir en 1887 où il définit une cité-jardin<br />
avant la lettre, avec un centre ou agora entouré de bâtiments publics et de lieux culturels<br />
(théâtres surtout) se mêlant aux espaces verts. Plus on s’éloigne du centre, plus alternent les<br />
lieux de vie ou de travail, toujours dans un milieu aéré, voire totalement intégré dans la nature<br />
forestière pour les activés liées à l’agriculture. MORRIS apparaît comme un<br />
« désurbanisateur » 57 se positionnant surtout pour des villes moyennes insérées dans la nature.<br />
Les maisons amples et lumineuses sont entourées de jardins. Les parcs ne sont jamais loins…<br />
e) Les libertaires…<br />
Et il vrai que les libertaires se sont souvent intéressés au problème des cités-jardins,<br />
autour de Pierre KROPOTKINE, William MORRIS et de l’écossais Patrick GEDDES, ainsi que du<br />
théoricien et architecte paysagiste Lewis MUMFORD (qui avoue à maintes reprises sa dette<br />
envers le prince anarchiste russe) et du canadien Marshall McLUHAN (1911-1980) plus tard dont<br />
la notion de village global inclut bien des traces kropotkiniennes, ce que reconnaît très nettement<br />
MATTELART dans son Histoire de l’Utopie planétaire. Très tôt ils ont mis en avant le<br />
polymorphisme, les constructions à taille humaine, le respect de l’environnement et de l’humain, la<br />
décentralisation chère à MUMFORD et la nécessité de mêler ville et campagne. En 1899, dans<br />
Fields, factories and workshops, KROPOTKINE militait pour de petites unités quasiment<br />
autogérées.<br />
En Allemagne vers 1900, c’est l’anarchiste Bernhard KAMPFFMAYER (1867-1942), très<br />
lié à KROPOTKINE et Paul RECLUS, qui va en faire la promotion, et aux USA c’est le libertaire<br />
Harry KELLY qui développe l’idée de villages libres, entourés de jardins, disposant d’écoles<br />
modernes, dans les environs de New York. Max NETTLAU parle à leur propos de « petite utopie<br />
qui marche dans la bonne direction ». Quant à l’anarchiste espagnol Ricardo MELLA, dans son<br />
utopie de 1889 La nueva utopia, il entoure des immeubles d’habitations fonctionnels de jardins et<br />
espaces verts pour produire et pour se détendre.<br />
La plupart des libertaires émettent donc sur ces notions une « vision anti-utopique », au<br />
sens où « l’architecture utopiste est un espace oppressif qui conduit à toutes les aberrations<br />
étatiques » dit RAGON dans son article de la revue L’Arc déjà cité. La vision libertaire se place<br />
donc sous le signe de l’espace éclaté, individualisé, humanisé et remet en cause les fondements<br />
mêmes des systèmes figés et des pouvoirs. Une bonne partie de la philosophie des cités-jardins<br />
est ainsi résumée.<br />
À plusieurs reprises HOWARD reconnaît sa dette vis à vis de MORRIS et de<br />
KROPOTKINE, même s’il semble que c’est surtout le centraliste BELLAMY qui lui a donné l’envie<br />
de réaliser son projet.<br />
f) HOWARD et ses disciples…<br />
C’est cependant un non-libertaire, mais proche des clubs socialisants de l’époque,<br />
notamment les Fabiens, Ebenezer HOWARD (1850-1928), lecteur assidu de RUSKIN, de MORRIS<br />
et surtout de l’autoritaire BELLAMY, qui fait la synthèse de différentes idées émises avant lui. Il a<br />
même financé la publication anglaise de l’utopie de BELLAMY, tant il était intéressé par les plans<br />
de régénérations de Boston qui y étaient développés.<br />
On peut également le lier aux recherches d’un Camillo SITTE en Autriche, surtout à partir<br />
de l’ouvrage classique « L’art de bâtir des villes » de 1889..<br />
Son œuvre est prolongée par les travaux de F.J. OSBORN et ceux de C.B. PURDOM.<br />
HOWARD limite les villes à moins de 30 000 habitants, et insiste pour que les espaces<br />
verts en occupent les 5/6°. Il souhaite une grande diversité dans ces petites cités et ne veut en<br />
aucun cas ériger un modèle forcément sclérosant. Son éloge de la diversité et de l’hétérogénéité<br />
est constant. Il prône d’ailleurs des villes, certes plutôt circulaires, mais adaptables au milieu<br />
local. Il refuse même de figer dans des plans concrets des projets urbains sans connaître l’aire<br />
choisie et ses particularités. La diversité est donc par principe assurée.<br />
Il s’appuie également sur l’idée kropotkinienne d’autosuffisance municipale, sur la<br />
coopération et le droit à la liberté individuelle. Parmi les idées nocives à rejeter figurent en bonne<br />
place la centralisation à outrance et le parlementarisme, ce qui est un autre point commun avec<br />
les libertaires de son temps 58 .<br />
57 CAMOIN Robert Art, littérature, socialisme et utopie chez William MORRIS, Arles, Sulliver, 2001<br />
58 Collectif À la recherche de la cité idéale, Catalogue de l’exposition d’Arc-et-Senans, 2001<br />
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