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130102_ANT.pdf - Ecole alsacienne

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visant à transformer la société et dont la charge de transformation utopique est grande, mais<br />

reposant sur des analyses économiques, techniques, organisationnelles... les rendant possibles,<br />

donc réalisables.<br />

Dans les années 1970, les multiples écrits de « l’anarcho-personaliste » Carlos DÍAZ sont<br />

en accord avec les slogans de 1968, surtout le fameux « Soyons réaliste, demandons<br />

l’impossible », puisqu’il répète que « à chercher l’impossible, l’homme a toujours réalisé ce qui<br />

est possible. Et ceux qui ‘sagement’ se sont limités au possible n’ont jamais fait le moindre<br />

pas en avant » 66 .<br />

En 1979, René LOURAU, dans le colloque « Interrogations sur l’autogestion » tenu à<br />

Lyon, pour éviter autant que possible le pire futur, demande de procéder à des efforts<br />

imaginatifs pour guider nos actions : « ...il y a un ou des futurs imaginés, imaginaires, qui<br />

déterminent notre action... » et il se pose en défenseur résolu de la nécessité de l’utopie.<br />

Olivier CORPET au colloque sur « Interrogations sur l’autogestion » de 1979 cite la belle<br />

formule de Henri LEFEBVRE, que l’on peut sans trop se tromper qualifier de marxiste libertaire :<br />

« ...l’ouverture vers le possible. C’est la voie et l’issue, la force qui peut soulever les poids<br />

colossaux qui pèsent sur la société et qui l’accablent. Elle montre le chemin pratique pour<br />

changer la vie, ce qui reste le mot d’ordre et le but et le sens d’une révolution ».<br />

A juste titre, Alain THEVENET dans la revue Réfractions, 2, 1998, rappelle que<br />

« ...refuser d’envisager « un autre futur » c’est avaliser le présent. Ce qui revient aujourd’hui à<br />

refuser le politique, ou, à ne l’admettre que comme instrument de l’économique qui est alors la<br />

valeur dominante ». Or l’anarchisme se doit plus que jamais de combattre la domination<br />

économique et la culture dominante. L’idéal est donc plus que nécessaire.<br />

Mimmo PUCCIARELLI qui en sociologue libertaire a contacté une trentaine de militants<br />

lyonnais dont les dialogues sont à la base de son livre sur ‘« L’imaginaire des libertaires<br />

d’aujourd’hui » donne des conclusions très intéressantes. L’idéal du début du siècle et les<br />

croyances dans le Grand Soir ou dans la réalisation d’une société libertaire s’estompent. À la<br />

place se profile un pessimisme vis à vis de toutes les pensées révolutionnaires figées, y compris<br />

celle des anarchistes. Cependant, même si le rêve utopique est moins affirmé chez les libertaires<br />

d’aujourd’hui, il n’en demeure pas moins pour l’auteur que l’idéal est beau et émouvant : « car la<br />

générosité, la joie, le plaisir de vouloir vivre dans un monde plus juste, plus libre, plus<br />

solidaire, pour tout dire libertaire, me semblent des sentiments incroyablement pleins de<br />

richesse pour l’humanité 67 ».<br />

Il est intéressant de noter que dans la conclusion au numéro spécial de la Revue Projet<br />

sur « Le déplacement des utopies » en 1998, Alain THOMASSET affirme qu’il faut des utopies.<br />

Elles sont nécessaires, mais elles doivent être plus imaginatives, plus « par en bas » et<br />

autogestionnaires, plus modestes et plus humaines et être très critiques par rapport aux grands<br />

systèmes. C’est une vrai définition de l’utopie libertaire qu’il nous donne là.<br />

Mais c’est encore une fois à Max NETTLAU que revient l’analyse la plus séduisante,<br />

comme il l’affirme dans la conclusion de son Esbozo... (pages 105 et 106) : « ...Le peuple aura<br />

toujours son rêve, son utopie et tout homme a la sienne. Il n’y a donc aucune raison pour<br />

déprécier, pour dédaigner ce genre - tout au contraire. Si nous pouvions créer et propager une<br />

puissante (séduisante) utopie, les gens nous aideraient à la réaliser : il nous revient donc de la<br />

créer et d’avancer. » Pour lui, et c’est une faiblesse, les libertaires de son temps ont perdu leur<br />

goût de penser, d’analyser, de proposer, d’expérimenter... Or « ...(l’utopie) ne s’identifie pas au<br />

jeu de l’esprit, à la fantaisie pure et simple, (mais) repose aussi très souvent sur le<br />

raisonnement, la connaissance, l’expérience. C’est une création, une action. La critique la<br />

modifiera, la bouleversera... Tant mieux ». Rien n’est figé ni prédéterminé, mais penser et<br />

prévoir sont nécessaires à la cause.<br />

Même le pourfendeur de l’utopie qu’est Daniel COLSON (2001) au sens restrictif qu’il lui<br />

donne, se permet d’écrire cette belle formule utopique : « L’anarchisme est une force affirmative<br />

qui, par la révolte, ne rompt les chaînes de la domination que pour mieux, et dans le<br />

mouvement même de cette rupture, affirmer un autre possible, une autre composition du<br />

monde ». Il est en accord avec la cinquantaine de militants, contactés par Stéphanie CHAUVIN 68 ,<br />

66 DÍAZ Carlos El anarquismo como fenomeno político moral, Madrid, 1978<br />

67 PUCCIARELLI Mimmo L’imaginaire des libertaires aujourd’hui, Lyon, ACL, 1999, p.263<br />

68 CHAUVIN Stéphanie L’engagement militant et l’utopie aujourd’hui, –in-L’anarchisme a-t-il un<br />

avenir ? Histoire de femmes, d’hommes et de leurs imaginaires, Actes du Colloque International de<br />

Toulouse, 27-29/10/1999, Lyon, ACL, 560p, 2001<br />

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