CONTES INITIATIQUES PEULS - 1 - Aide et Action
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Le ver ouvrit son énorme bouche <strong>et</strong>, d'un seul coup, avala Kobbou. Puis, s'adressant aux<br />
deux hommes : « La reine des lieux vous avait bien mis en garde contre ce que vous<br />
risquiez si vous restiez sur c<strong>et</strong>te île. J'ai avalé votre mouton en guise d'avertissement, pour<br />
vous donner un avant-goût du sort qui pourrait être le vôtre si vous vous obstiniez à rester<br />
ici, »<br />
Bien que saisis d'une peur compréhensible, BâWàm'ndé <strong>et</strong> Siré répondirent d'une seule voix:<br />
« Nous avons hàte, ô grand Ver, d'être avalés par toi pour r<strong>et</strong>rouver notre mouton. »<br />
Aussitôt, Bà-Wâm'ndé se sentit happé par les pieds. « Sire, ô Sire ! s'écria-t-il, attrape mes<br />
bras <strong>et</strong> tire-moi, le ver est en train de m'avaler (1) ! » Siré se saisit des bras de Bâ-Wâm'ndé<br />
<strong>et</strong> tira de toutes ses forces, mais en un clin d' oeil non seulement le ver avait avalé<br />
BàWâm'ndé, mais les bras de Siré avaient disparu dans sa gueule. Le reste de son corps y<br />
fut bientôt englouti à son tour.<br />
A peine l'énorme invertébré avait-il fini d'avaler le mouton <strong>et</strong> ses deux cavaliers que Njeddo<br />
Dewal arrivait sur la rive de l'autre côté du lac, là où nos compagnons s'étaient embarqués<br />
sur le dos de la tortue. Elle se mit à fouiller partout pour r<strong>et</strong>rouver trace des fugitifs, mais en<br />
vain. En désespoir de cause, elle se lança à la recherche du gueddal. Également en pure<br />
perte. Elle chercha longtemps, se fatigua beaucoup, fut énormement perturbée par c<strong>et</strong>te<br />
quête aussi épuisante qu'inutile. Elle était si lasse qu'elle ne pouvait plus marcher<br />
normalement <strong>et</strong> n'avançait qu'en titubant. Vacillant sur ses jambes, le coeur empli<br />
d'inquiétude, elle se dirigea vers l'embarcadère. Ses intestins se mirent à se tortiller <strong>et</strong> à<br />
grouiller dans son ventre. Une morve épaisse <strong>et</strong> fétide s'épanchait de ses narines (2) . Des<br />
larmes chaudes <strong>et</strong> amères cascadaient de ses yeux.<br />
Par des moyens qui lui étaient propres, elle traversa le lac <strong>et</strong> débarqua sur Pile. Sans perdre<br />
une minute, elle courut fébrilement vers le lieu discr<strong>et</strong> où elle avait enfoui la gourde<br />
métallique. A son grand soulagement, elle constata que l'endroit ne présentait aucune trace<br />
de visite insolite. Toutefois, pour être certaine que ses ennemis n'avaient pas débarqué dans<br />
l'ile, elle entreprit d'en fouiller tous les coins <strong>et</strong> recoins, recherchant la moindre trace, voire la<br />
moindre odeur d'ovin ou de fils d'Adam. Mais elle ne perçut rien de tout cela.<br />
________________________<br />
1. La peur., dit-on, ne peut-être totalement effacée du coeur de l'homme, quel que soit son degré ;<br />
c'est sa patience qui aura raison de sa peur. " Si le poltron pouvait être suffisamment patient., dit<br />
l'adage, il verrait le preux courir. "<br />
2. Dans les contes, il émane toujours des sorciers quelque chose de malodorant. Ils sont en relation<br />
avec tout ce qui est répugnant, puant, difforme, lugubre ou fantasmagorique. L fantasmagorie est<br />
l'ambiance de la sorcellerie.<br />
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