« La démocratie doit chercher sa validité et son ... - fasopo

Mais avant eux, les rois d’Abomey attachaient un prix particulier aux forces occultes et au
vodùn en général. Le mythe fondateur du royaume en est d’une éloquence proverbiale. Les
dynasties qui ont régné à Abomey seraient issues du couple originel entre une femme et une
panthère Agasu. Leur politique religieuse consistait, essentiellement, bien qu étalée à trois niveaux,
à contrôler les prêtres vodùn et leurs puissances 321 .
Pour revenir au propos sur le local, bon nombre de nos interviewés nous ont confié que
pour être chef, il faille d’abord s’assurer une dominance mystique sur ses adversaires. Même dans
le Nord du pays où le vodùn ne domine pas, il est impensable de ne pas se « blinder » chez les
marabouts ou les féticheurs locaux, avant de s’avancer sur la scène politique. Une thèse déjà
évoquée par Nassirou Bako-Arifari, dans une étude à Founougo. Il mentionne : « la menace de
représailles avec des forces occultes est ici une véritable psychose sociale. Nul ne peut exercer une fonction publique
s’il n’a pas le tii, expression locale pour désigner tout ce qui est supposé conférer à son détenteur une puissance
protectrice, mais aussi offensive. Ainsi, on pense que tous les délégués, chefs de village ou de quartier, ont tous eu les
moyens de se “fortifier” pour pouvoir parer aux “attaques chimiques” éventuelles 322 ».
En définitive, l’émulation politique s’énonce ainsi comme une lutte qui se déroule
officieusement dans le monde invisible et la construction des notabilités politiques passe par cette
trajectoire des forces occultes. Incapable de dominer mystiquement ses adversaires, le politique
peut voir s’effriter tous ces efforts fournis jusque là. Dans sa quête du poste de maire de Grand-
Popo, Félix Gbadovi, que l’on s’en souvienne, a dû réviser à la baisse ses ambitions de peur, entre
autres, des missiles des « sages ».
321 Voir K. Elwert-Kretschmer, « Vodun et contrôle social au village », op. cit., p. 104.
322 N. Bako-Arifari, « La démocratie à Founougo (Borgou) : paysans et “déscolarisés” en compétition pour le
pouvoir local » in Thomas Bierschenk et Jean-Pierre Olivier de Sardan, op. cit., p. 81.
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