« La démocratie doit chercher sa validité et son ... - fasopo

Groupement Ethnique du Nord (Gen) qui deviendra par la suite le Rassemblement
Démocratique Dahoméen.
L’on observera ensuite la régionalisation du vote autour des trois leaders politiques et
leurs mouvements transformés presque en « partis uniques régionaux » : le Rassemblement
Démocratique du Dahomey (Rdd) de Maga, l’Union Démocratique Dahoméenne (Udd) de
Ahomadégbé et le Parti Républicain de Dahomey (Prd) d’Apithy.
Ils se sont forgés une légitimité politique dans l’antre des vestiges territoriaux et
symboliques des royaumes existant avant la colonisation et jadis antagonistes. Hubert Maga se
voulait l’héritier de la riche civilisation des royaumes Bariba de Nikki et de Kouandé ; Justin
Ahomadégbé adjoint à son nom celui du prince Tometin 154 , pour mieux incarner la grandeur
passée du puissant royaume de Danxomé à Abomey, quand Sourou Apithy fait pareil par le titre
de Migan, Premier ministre du roi de Xogbonou (Porto-Novo). Ce faisant, ils mobilisaient les
croyances populaires, tout en jouant sur les rivalités ancestrales entre les peuples de ces royaumes
défunts.
Leur communication électorale s’en trouvait facilitée par la détestation dans le temps des
frères ennemis de Porto-Novo et d’Abomey; aussi par le rejet des sudistes par les nordistes et
vice-versa. Un rejet alimenté par une « nappe souterraine des jugements de valeur comparatifs, fondés sur
des préjugés et des stéréotypes, qui nourrissent au quotidien un sentiment de supériorité 155 » des peuples du Sud
sur ceux du Nord. Chacun rayonnait quasiment dans sa région et toute velléité
d’affranchissement en son sein occasionnait des réprimandes physiques nocturnes et l’ostracisme
social, même si le patronage était aussi une méthode subtile pour fidéliser les clientèles
régionales 156 . Toutefois, il est utile de signifier que leur sphère d’influence ne coïncidait pas
identiquement avec les limites des anciens royaumes, même si le centre de gravité en dépendait.
Cependant, il est important de préciser que les pôles régionaux d’aujourd’hui ne sont pas
forcement la résultante des trois d’antan, même si l’idéologie du fils de terroir alimente, comme
jadis, l’ancrage des « partis régionaux ».
En définitive, comme l’a justement montré Jean François Bayart, « c’est la réhabilitation des
élections comme procédure réelle de dévolution d’un pouvoir effectif qui a nourri le mythe de l’autochtonie 157 ». Ce
constat est d’autant plus lumineux qu’au Bénin, la ressource du terroir est l’une des logiques de
154
Il se réclame maternellement de la ligne du roi Agonglo et le prince Tometin était le fils de ce dernier et frère
du roi Ghézo.
155
P. Braud, op. cit., p. 90.
156
Nous reviendrons sur la notion et les pratiques de clientélisme et de patronage dans la deuxième partie.
157
J.F. Bayart, « Autochtonie, démocratie et citoyenneté en Afrique », Critique internationale n°10 - janvier
2001, p. 182.
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