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LIBERTE COULEUR D'HOMME - Les amis d'André Laude

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LIBERTÉ Couleur D’HOMME<br />

À mon retour, il n’y avait plus de FCL. J’étais désenchanté, mais le désenchantement ne<br />

m’empêcha pas de répondre à un vieux réflexe : volonté d’action. Je rejoignis le PSU dont j’allais<br />

être membre jusqu’au lendemain de Mai 68. Le PSU était – il est toujours puisqu’il survit à toutes<br />

les intempéries – une « auberge espagnole », un fourré–tout : chrétiens de gauche, ex–militants<br />

communistes, futurs gauchistes, antistaliniens, romantiques de tout poil, jeunes gens frénétiques,<br />

jeunes femmes rêveuses s’y côtoyaient. Cette disparité faisait la richesse et la misère du Parti. Mais<br />

elle était loin d’être désagréable. Je m’intégrais à l’opposition qui allait être qualifiée<br />

« luxembourgiste » bientôt. C’était un Parti qui rassemblait les plus traditionnels comportements et<br />

ceux qui préfiguraient d’autres conceptions, d’autres approches de l’activité de « gauche ».<br />

C’était l’époque où l’étoile de Michel Rocard montait à l’horizon. Ce jeune homme protestant,<br />

d’excellente famille, venu des jeunesses SFIO, m’intriguait. Il me déplaisait et m’attirait dans le<br />

même temps. Je n’étais pas de son monde et je n’accordais guère de crédit à ses professions de foi<br />

« ultra gauche ». C’est un garçon instruit, décidé, froidement lucide, empêtré dans ses<br />

contradictions. Le PSU avait du mal à se tailler sa place au soleil. L’hégémonie du PCF était encore<br />

solidement établie parmi les travailleurs. La vieille SFIO s’accrochait durement à ses bastions<br />

traditionnels. Le retour du gaullisme avait jeté le trouble dans les rangs intellectuels. Je ne cesserai<br />

d’ailleurs jamais de m’étonner du nombre d’individus qui, faisant profession de foi de socialisme<br />

démocratique, ne cessèrent d’être fascinés par le Général, par sa rhétorique creuse et grandiloquente<br />

que Revel a dépecée dans un très subtil libelle. <strong>Les</strong> tourments de la guerre d’Algérie continuaient à<br />

me hanter. Moins que jamais, je pensais possible une révolution socialiste en Europe, une<br />

« Europe » tenue à l’œil par l’Union soviétique et les États–Unis. Le peuple commençait à savourer<br />

les délices de la « société de consommation ». <strong>Les</strong> spectres de la seconde boucherie mondiale<br />

s’éloignaient. <strong>Les</strong> classes moyennes, futures clientes des FNAC et du Club Méditerranée, se<br />

développaient sinon à la vitesse des rats, du moins avec une relative rapidité.<br />

Je m’étais lié au groupe de Socialisme ou Barbarie (S. ou B., comme il est convenu de dire) qui<br />

publiait une revue du même nom dans laquelle écrivaient, notamment, Claude Lefort et Cornélius<br />

Castoriadis. <strong>Les</strong> gens de S. ou B. étaient des trotskystes qui s’acheminaient, peu à peu, par<br />

honnêteté intellectuelle, vers une critique radicale du « socialisme scientifique ». J’appris beaucoup<br />

grâce à eux et je les en remercie aujourd’hui. De nombreuses études, concernant la « bureaucratie<br />

soviétique », étaient publiées dans cette revue. Des études approfondies, sérieuses, intelligentes.<br />

Elles ne cessaient de vérifier mes positions, mes intuitions, mes analyses. <strong>Les</strong> rouages de la<br />

bureaucratie était parfaitement mis en lumière. Il n’y avait pas à redire. L’URSS était tout, sauf<br />

socialiste. C’est à peu près à la même époque que je lus en anglais – avec beaucoup de difficultés<br />

d’ailleurs – les premiers textes mis à ma disposition de Herbert Marcuse. Ce fut un choc. Ce<br />

philosophe allemand, installé aux États–Unis, qui avait participé à la gloire de l’École de Francfort<br />

avec Adorno, Horkheimer et d’autres, mettaient à nu les mécanismes de notre oppression, dont il<br />

allait donné dans l’homme unidimensionnel une « photographie » impressionnante.<br />

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