LIBERTE COULEUR D'HOMME - Les amis d'André Laude
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LIBERTÉ Couleur D’HOMME<br />
Nous savons qu’il n’y a pas de « science révolutionnaire », de boutiques où l’on pourrait se<br />
procurer des « modes d’emploi » de la révolution. Mais nous savons ce que nous voulons et ce que<br />
nous ne voulons pas. Ne voulons plus.<br />
Marcuse et d’autres nous ont appris à y voir un peu plus clair. Nous tâtonnons. Nous voudrions<br />
cesser d’être des femmes, des hommes en proie aux convulsions. Nous voudrions marcher dans la<br />
rue sans crainte de prendre une balle dans la nuque. Nous aimerions commencer à vivre.<br />
Comment transmettre aux foules, aux masses, aux peuples, la flamme dont nous brûlons vifs de<br />
Paris à Amsterdam, de Rome à Londres, de New York au « goulag », de la Havane à Rabat. <strong>Les</strong><br />
peuples n’aiment pas la violence irrationnelle. Inexplicable.<br />
Nous savons que le « vieux monde » ne s’écroulera jamais sous des brassées de fleurs. Qu’il ne<br />
tombera que lorsque nous le frapperons au cœur, avec rage, avec violence. Saurons-nous glisser<br />
dans nos armes des chargeurs d’amour ?<br />
Nous avons déjà beaucoup fait. Il ne nous reste plus, dans un suprême effort, qu’à changer la vie !<br />
Dix ans d’échecs ai–je écrit. Échecs en ce sens qu’en dépit des efforts lucides ou lyriques de<br />
milliers et de milliers de jeunes gens et d’adultes d’accord avec les « contestataires » pour tenter<br />
d’abattre le « vieux monde », nous avons jusqu’à nouvel ordre échoué. Le « vieux monde », ses<br />
flics, ses psychiatres, ses « opium du peuple », ont la peau dure. Et pis, ce sont ceux–là mêmes, et<br />
moi parmi eux, qui le contestaient qui, très souvent, lui ont – par leurs comportements, leurs peurs<br />
instinctives, leurs angoisses, leurs carences de pensée, leurs terribles élans contradictoires – fourni<br />
des « munitions ».<br />
Ce que nous avions–ce que nous avons encore et toujours ! – à abattre est immense, gigantesque.<br />
Une réalité qui coupe le souffle : un monde où cent millions d’enfants d’Inde en Colombie, du<br />
Maroc à la Thaïlande et Taïwn (cinquante deux millions employés dans l’industrie et l’agriculture<br />
plus quarante et un millions employés sans rémunération dans le cadre familial) travaillent dans des<br />
conditions la plupart du temps cauchemardesques, un monde où « l’internationale des grandes<br />
puissances » fussent–elles, de par leur nature de « grande puissance » justement antagonistes,<br />
s’entendent à merveille pour écraser, intégrer, réduire toute vraie tentative d’autre chose; un monde<br />
où des Partis politiques de « gauche » ne peuvent même plus masquer la misère spirituelle qui<br />
anime ceux qui les dirigent, des Partis où triomphent avant la volonté réelle d’aider à<br />
l’émancipation des peuples, les plus vils, les plus matérialistes intérêts. Et c’est ainsi que l’on voit<br />
un Parti communiste ainsi qu’un Parti démocrate chrétien italien livrer à l’assassinat un homme<br />
politique nommé Aldo Moro, tout en pleurnichant et en s’abritant derrière les sacro–saints intérêts<br />
de l’État, un monde où des peuples entiers sont réduits à la prostitution pour survivre, un monde où<br />
l’on fusille les homosexuels comme de vulgaires criminels, un monde où à tout instant les polices<br />
tirent impunément, expulsent des vieillards, tuent des nègres, des chicanos, des « bougnoules », un<br />
monde où sous prétexte de « crise » qui relèverait de la décision des Dieux lointains, on frappe plus<br />
encore les plus pauvres, les humiliés, un monde où tout créateur porté par un élan sans nom, se voit<br />
bafoué, un monde où sur les écrans de TV règnent les médiocres, les malins, les roquets, les<br />
requins, un monde où l’on accule au suicide la belle et lumineuse Gabrielle Russier, où l’on se<br />
rabat, en se gardant bien d’évoquer la lâcheté quotidienne de la majorité, sa veulerie, sa<br />
mesquinerie, sa démission, sur « l’autodéfense ». Tirer sur un jeune « voyou » est, certes, plus aisé<br />
que de faire la guerre des classes, un monde où les bouffons sont chamarrés d’or et où les vrais<br />
princes mangent leur pain sec, un monde où l’on connaît mieux Léon Zitrone, les lamentations de<br />
l’ex–chabanou d’Iran que les écrits toniques d’E.M. Cioran ou Georges Perros, un monde où des<br />
poètes tels que Xavier Grall, le fou d’Armorique, Tristan Cabral le Fou d’Occitanie, n’intéressent<br />
guère des journalistes accrochés aux basques de tel ou tel leader syndicaliste, politique, ressassant<br />
quotidiennement les mêmes paroles creuses, redondantes, imbéciles, un monde où le fric ouvre<br />
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