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LIBERTE COULEUR D'HOMME - Les amis d'André Laude

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LIBERTÉ Couleur D’HOMME<br />

Dans une arrière-pièce du café les armes furent partagées. Je vis Concha se saisir d’un pistolet<br />

mitrailleur. Le groupe devait s’infiltrer dans le bâtiment administratif par une entrée restée libre<br />

grâce à la complicité d’un gardien. Là, il devait déposer des charges d’explosifs susceptibles de<br />

réduire en poussière des dizaines de dossiers dangereux pour les militants, tout en évitant<br />

d’atteindre des civils. Il devait se retirer aussitôt posées les charges explosives. <strong>Les</strong> véhicules<br />

devaient prendre en charge les armes. <strong>Les</strong> membres du groupe se disperseraient alors et<br />

rejoindraient l’appartement deux par deux. Paco régla les montres. Puis il marcha vers la fenêtre et<br />

là je le vis sortir d’une de ses poches une photographie qu’il contempla plusieurs minutes, sans<br />

doute Melba et les enfants. Je restais à distance. Puis soudain Paco replaça la photographie dans sa<br />

poche. Il se tourna vers les autres, eut un sourire et s’approcha de Concha qu’il étreignit<br />

longuement. <strong>Les</strong> hommes se serrèrent les mains mutuellement. Ils embrassèrent Concha. Puis Paco<br />

donna l’ordre du départ. Il était prévu qu’en cas de catastrophe je me réfugierais si possible dans le<br />

café.<br />

Je me trouvais sur le trottoir, allant et venant lentement sur une cinquantaine de mètres. Je<br />

n’osais pas regarder les camarades chauffeurs. Je jetais des regards furtifs sur le cadran de ma<br />

montre. Midi moins cinq, midi moins quatre, midi moins trois, midi moins deux, midi.<br />

Brusquement des rafales d’armes automatiques déchirèrent le demi-silence. D’autres rafales<br />

répondirent. Que se passait–il donc ? Il se passait que le groupe était tombé dans un piège.<br />

Paco m’expliqua un peu plus tard ce qui s’était produit. Le groupe avait franchi comme prévu<br />

l’entrée du bâtiment grâce à la complicité du gardien. Il s’était engagé dans les escaliers<br />

monumentaux qui conduisaient aux pièces où les charges explosives devaient être déposées et<br />

allumées. C’est alors que le piège se referma sur eux. Des gardes civils, des policiers embusqués<br />

dans les encoignures, les zones d’ombres, les toits, ouvrirent le feu sur eux. Concha s’effondra la<br />

première, une balle en plein front. Il n’était pas possible de déposer les charges explosives mais du<br />

moins Paco et ses compagnons avaient la preuve indiscutable que Miguel les avait trahis, qu’il était<br />

donc le responsable des multiples arrestations suivies de séances de torture de nombreux<br />

compagnons. Paco donna l’ordre de repli. Antonio fut chargé de prévenir les conducteurs des<br />

véhicules de ne pas s’attarder plus. C’était trop dangereux. Quand il eut accompli sa mission,<br />

Antonio, pistolet mitrailleur mal caché sous sa veste, rejoignit les autres qui reculaient pied à pied.<br />

Fou de rage Paco se battit comme un lion. Il s’agissait de ne laisser aucun blessé entre les mains de<br />

la police, d’avoir le moins de victimes possible.<br />

Je me repliai vers le café comme prévu. <strong>Les</strong> rafales continuaient de se succéder. Je craignais pour<br />

la vie de Paco, pour la vie des compagnons. Puis les rafales cessèrent. Le patron du café épiait le<br />

bout de la ruelle. Un des hommes du groupe qui avait été blessé arriva au café. Il avait un ordre<br />

impératif de Paco à me transmettre. Je ne devais pas bouger. Je n’avais rien à craindre. Le camarade<br />

patron de café n’avait jamais été soupçonné de sympathie pour une organisation anarchiste. Paco<br />

avait encore quelque chose d’important à accomplir. Le soir, il me récupérerait et nous repartirions<br />

pour la France.<br />

Le soir même, j’appris ce qu’avait d’important encore à accomplir Paco. Miguel avait été jugé,<br />

exécuté pour sa traîtrise. Miguel qui ne se croyait pas découvert était tombé lui aussi dans le piège.<br />

Il ne put se défendre. Il avoua tout. <strong>Les</strong> camarades lui donnèrent une chance de faire justice lui–<br />

même. Ils lui tendirent un pistolet. Miguel ne put se résoudre à se tirer une balle dans la tête. Ce<br />

furent Antonio et Pablo qui l’exécutèrent.<br />

Le bilan était lourd : outre Concha quatre camarades avaient été tués durant l’attaque. C’étaient<br />

les quatre camarades chargés de couvrir le repli du groupe. Deux autres étaient assez grièvement<br />

blessés. Deux autres dont Antonio avaient frôlé la mort de près. Paco était miraculeusement<br />

indemne. La baraka ! Mais justice était faite. Je savais que cette action avait douloureusement<br />

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