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Axel la trouva bien impulsive. Qu’avait-elle soudain ?<br />
Il la rejoignit au premier étage. Dans la petite pièce ron<strong>de</strong> aux murs <strong>de</strong> pierres nues,<br />
seuls un vieux banc <strong>de</strong> bois et une chaîne pendant du plafond décoraient le vi<strong>de</strong>. La<br />
princesse s’était assise et avait porté son visage vers le paysage aux couleurs assombries.<br />
Elle ressemblait à un oiseau en cage.<br />
Comme à son habitu<strong>de</strong>, Éline restait figée <strong>de</strong>vant la falaise <strong>de</strong> la Forêt Interdite. Que<br />
n’aurait-elle pas donné pour se faire dévorer par le Monstre qui hantait ces lieux et<br />
disparaître ainsi <strong>de</strong> la vie ? Le soir <strong>de</strong> ses noces avec le duc d’Alekant, elle n’hésiterait plus.<br />
Quitte à forcer une poterne et à se jeter directement dans les douves pleines <strong>de</strong> sariclès !<br />
Elle était prête à tout pour échapper aux mains <strong>de</strong> Korta. Une envie <strong>de</strong> pleurer montait en<br />
elle.<br />
— Pourquoi avez-vous dit cela ? <strong>de</strong>manda-t-elle d’une faible voix.<br />
— Parce que vous n’êtes <strong>de</strong>stinée qu’à un seul homme : mon frère, répondit doucement<br />
Axel en s’asseyant à ses côtés.<br />
— Destinée ? ! Vous croyez à ce genre <strong>de</strong> fable ?<br />
Sa raison lui paraissait tellement absur<strong>de</strong> qu’elle en oublia ses larmes.<br />
— Oui. J’y crois, affirma-t-il avec amertume. Philip, non, bien que je sois persuadé qu’il<br />
aurait volé jusqu’ici si la princesse Éloïse avait <strong>de</strong>mandé à le voir. Et Cédric…<br />
Il lui prit la main, englobant dans ses doigts les bagues <strong>de</strong> diamants et le grand saphir <strong>de</strong><br />
la reine <strong>de</strong> Leïlan.<br />
— Princesse Éline, sans vous connaître, mon frère ne pense qu’à vous, ne vit que pour<br />
vous. Croyez-moi, c’est avec beaucoup <strong>de</strong> regrets qu’il m’a laissé venir à sa place. Il sera un<br />
roi juste et bon. Je suis certain que sa première loi sera <strong>de</strong> vous ôter ce voile à tout jamais.<br />
— Arrêtez ! cria-t-elle en retirant sa main. Vous ne connaissez rien <strong>de</strong> ce pays ! Vous<br />
cherchez à me faire rêver en m’endormant <strong>de</strong> vos belles paroles.<br />
Elle se leva dans toute l’ampleur <strong>de</strong> sa robe et <strong>de</strong> sa capeline. Elle était bouleversée. Axel<br />
chercha avec agitation dans ses vêtements.<br />
— Tenez, prenez ceci. Elle m’est adressée, mais lisez-la. Elle prouvera mes dires.<br />
Éline regarda le papier roulé qu’il lui tendait. Qu’est-ce que c’était ? Elle se rassit et<br />
déroula la lettre.<br />
Penchée vers la fenêtre, la lumière du soir traversait son voile et découpait légèrement le<br />
contour <strong>de</strong> son visage. Il semblait doux mais Axel, même en forçant les <strong>yeux</strong>, ne pouvait en<br />
voir davantage. Dommage, il aurait vu une expression <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> sensibilité passer sur les<br />
traits d’Éline.<br />
Ses <strong>yeux</strong> bleu azur n’avaient plus <strong>de</strong> larmes, ce qu’ils lisaient était tellement beau et si<br />
injuste. Chaque mot écrit par le prince Cédric semblait dicté par un amour profond pour elle,<br />
elle qu’il ne connaissait même pas. Tout son corps tremblait d’émotion mais elle ne voyait<br />
que la fatalité. Elle ne pourrait jamais l’aimer en retour. Elle <strong>de</strong>vait épouser Korta pour<br />
sauver sa sœur.<br />
— Je ne puis vous laisser cette lettre. Si je l’ai sur moi, c’est pour la brûler. Je ne tiens pas<br />
à ce que l’on sache qui je suis. Mais je peux écrire à mon frère pour qu’il vous en fasse<br />
parvenir une, rien que pour vous.<br />
— Non, fit-elle. Je maintiens que j’aime le duc d’Alekant.<br />
Elle lui rendit la missive.<br />
— Alors, pourquoi êtes-vous venue me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comment était mon frère, si votre cœur