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— Qu’est-c’tu viens faire ? ! lança froi<strong>de</strong>ment Othal, freiné brutalement et surpris par son<br />
apparition.<br />
— Visiter le pays et ses habitants ! rétorqua le jeune homme. Et tu ne peux pas me le<br />
refuser, car tu auras peut-être besoin <strong>de</strong> quelqu’un qui sait manier une arme !<br />
Dans la faible lueur du soleil, l’épée brilla comme pour attirer l’attention sur elle.<br />
Othal ne voulait pas <strong>de</strong> la présence du Pandémois mais l’argument s’avérait <strong>de</strong>s plus<br />
valables. Aussi, ne répondit-il pas et fit-il redémarrer les chevaux. Axel était ravi. Il avait hâte<br />
<strong>de</strong> voir le Masque, cette légen<strong>de</strong> vivante.<br />
La charrette roulait à toute allure, prête à se rompre à la première pierre. Axel observait<br />
le visage d’Othal. Il semblait très soucieux. Ses mains calleuses crispaient les rênes. Des<br />
ri<strong>de</strong>s marquaient son front sous les plis <strong>de</strong> ses sourcils grisonnants. La présence du Masque<br />
l’angoissait. Un frisson d’inquiétu<strong>de</strong> parcourut Axel face à son expression. Pourquoi le bandit<br />
avait-il fait enlever <strong>de</strong>s enfants ? Cette lâcheté le répugnait. <strong>Les</strong> paysans n’avaient aucun<br />
moyen <strong>de</strong> défense. Axel sentait l’envie <strong>de</strong> se battre monter en lui.<br />
Il scruta l’horizon orangé. Un cavalier, tout <strong>de</strong> noir vêtu, dévalait le col <strong>de</strong>s Collines<br />
Jumelles dans leur direction. Plus loin <strong>de</strong>rrière, une <strong>de</strong>mi-douzaine <strong>de</strong> soldats le poursuivait.<br />
Othal paniqua complètement. Soudain il oubliait comment mener la charrette. Axel dut lui<br />
prendre les rênes <strong>de</strong>s mains : les chevaux s’emballaient. À guère plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux cents pas<br />
<strong>de</strong>vant eux, un vieillard et une dizaine d’enfants se trouvaient au bord d’une large rivière peu<br />
profon<strong>de</strong>. Le Doyen n’avait pas assez d’autorité pour les faire rentrer au village.<br />
Axel plongea sur un <strong>de</strong>s chevaux pour l’arrêter dans sa course et pour stopper la<br />
charrette. Se jetant ensuite au sol, il saisit les <strong>de</strong>ux plus petits enfants dans ses bras et<br />
ordonna aux autres <strong>de</strong> monter. Aucun ne discuta.<br />
La cavalca<strong>de</strong> approchait. Elle avait disparu dans le creux <strong>de</strong> la vallée voisine mais son<br />
bruit sourd se faisait entendre. Othal se reprit et aida le Doyen à monter. Au moment où Axel<br />
donna le <strong>de</strong>rnier enfant au vieil homme, le Masque apparut et franchit la Rivière Esseulée<br />
dans une gran<strong>de</strong> gerbe d’eau.<br />
Axel bondit immédiatement dans la charrette et sortit son épée. Mais Othal asséna un<br />
violent coup dans son estomac trop plein qui le fit tomber à la renverse. Sans comprendre, le<br />
jeune homme vit le villageois sortir une gran<strong>de</strong> perche du chariot et la jeter au Masque. De<br />
nouveau armé, ce <strong>de</strong>rnier n’hésita pas à faire volte-face, retraversa la rivière et fonça en<br />
direction <strong>de</strong>s soldats qui arrivaient. Axel avait l’impression d’avoir sauté un chapitre <strong>de</strong><br />
l’histoire !<br />
Tous les enfants s’étaient mis au bord du chariot et chuchotaient <strong>de</strong>s encouragements :<br />
— Vic ! Vic ! Vic !…<br />
— Allez vas-y ! Tu les auras !…<br />
— Tape fort !…<br />
En quelques secon<strong>de</strong>s, Axel put se rendre compte, à voir les <strong>yeux</strong> <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />
villageois, que le Masque était leur héros. Avec un simple bâton long, ils semblaient<br />
convaincus qu’il allait terrasser tous les soldats. Ne sachant plus que penser, Axel accepta <strong>de</strong><br />
se mettre en retrait <strong>de</strong> la bagarre.<br />
Le premier homme armé surgit. Homme <strong>de</strong> très gran<strong>de</strong> carrure, noble d’apparence<br />
vestimentaire, il arborait une barbichette et <strong>de</strong> fines moustaches noires qui accentuaient<br />
l’agressivité <strong>de</strong> son visage. Dans son regard se lisaient toute la hargne et la rage d’avoir<br />
laissé échapper ce détrousseur noir.