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vagabondait comme dans les Brumes Infernales.<br />
Il avait tellement observé la jeune fille que son esprit la matérialisait à son gré. <strong>Les</strong> longs<br />
cheveux flottaient avec souplesse, s’entrelaçant dans les branches, le sang avait disparu et<br />
elle posait ses <strong>yeux</strong> bleu nuit sur lui. Il entendait même sa douce voix résonner dans sa tête,<br />
lui répétant la lettre. E…, la Fille-aux-<strong>yeux</strong>-bleus…, Vic… Elle était si belle, trop pour mourir. Il<br />
adressa une profon<strong>de</strong> prière à ses Divinités pour qu’elle se rétablisse.<br />
<strong>Les</strong> grognements d’un loup le firent sortir <strong>de</strong> ses songes. La bête apparut, majestueuse.<br />
Elle s’était faufilée dans la clairière, certainement pour se désaltérer, et constater une<br />
présence dans son eau claire ne <strong>de</strong>vait pas lui plaire !<br />
Tant qu’il restait dans la mare, Axel ne craignait rien, mais si les nuits étaient aussi<br />
fraîches qu’à Pandème en cette saison, son corps ne résisterait pas longtemps. Il se mit à<br />
espérer que la bête allait partir et qu’il suffisait d’un peu <strong>de</strong> patience.<br />
Le loup s’était arrêté <strong>de</strong> gron<strong>de</strong>r. Il avait rangé ses crocs sous ses babines et avait même<br />
redressé ses oreilles ron<strong>de</strong>s. Humant fortement, il s’approcha <strong>de</strong>s affaires du jeune homme :<br />
il avait certainement senti la nourriture !<br />
Voyant déjà son repas partir en fumée, Axel se redressa et se mit à frapper l’eau<br />
violemment. Sur le moment, le loup s’enfuit à toutes pattes, mais une o<strong>de</strong>ur plus forte que la<br />
peur le poussa à revenir. Axel craignait l’animal et celui-ci dut le ressentir : il reprit <strong>de</strong><br />
l’assurance et revint à la charge.<br />
La truffe ne s’intéressait pas à la nourriture. Subrepticement, le loup se saisit du reste <strong>de</strong><br />
la chemise noire et s’enfuit plus loin. Il ne disparut pas <strong>de</strong>rrière les lianes <strong>de</strong> clématites. Axel<br />
comprit son attitu<strong>de</strong> lorsqu’il l’entendit gémir, et le vit se coucher en boule sur l’étoffe en<br />
lambeaux.<br />
Axel était dans <strong>de</strong> beaux draps ! Que <strong>de</strong>vait-il faire ? Ce loup semblait connaître la Filleaux-<strong>yeux</strong>-bleus,<br />
mais pouvait-il s’approcher ? De toute évi<strong>de</strong>nce, il était apprivoisé, mais<br />
peut-être n’acceptait-il qu’un seul maître ? Bon. De toute manière, l’animal <strong>de</strong>vait<br />
certainement avoir plus peur que lui.<br />
Doucement, sans déranger le loup, Axel sortit <strong>de</strong> l’eau. Par petits pas, il s’approcha. Le<br />
loup ne bougeait pas, il restait recroquevillé sur le bout <strong>de</strong> tissu au milieu <strong>de</strong>s graminées. De<br />
temps à autre, il lançait <strong>de</strong>s <strong>yeux</strong> inquiets vers Axel, mais ne montrait aucune agressivité. Le<br />
jeune homme fit bonne contenance. Toujours <strong>de</strong> gestes lents et posés, il prit son sac et ses<br />
vêtements pour s’éloigner. L’animal ne réagit pas.<br />
Axel se rhabilla sans précipitation. <strong>Les</strong> gros nuages avaient disparu comme par<br />
enchantement mais le froid mordait sa peau, annonçant la nuit. Avec précaution, Axel<br />
ramassa du bois et alluma un feu. Maintenant, si le loup avançait, il pourrait l’empêcher<br />
d’attaquer sans lui faire <strong>de</strong> mal.<br />
Le jeune homme sortit le gibier qui lui avait été offert. Le petit païeux bleu fut embroché<br />
et mis à rôtir au-<strong>de</strong>ssus du feu. <strong>Les</strong> narines du loup se dilatèrent, mais il ne manifesta rien <strong>de</strong><br />
plus pendant tout le temps <strong>de</strong> la cuisson. Ce ne fut que lorsque la vian<strong>de</strong> fut cuite qu’il pointa<br />
sa truffe ; il s’approcha en rampant sur le sol, la chemise dans la gueule, fouettant les herbes<br />
folles <strong>de</strong> sa queue fournie.<br />
La position était si comique pour un animal sauvage qu’Axel ne put s’empêcher <strong>de</strong> rire.<br />
Surpris et vexé, le loup se leva d’un bond pour s’éloigner. Ses <strong>yeux</strong> fendus, aussi brillants que<br />
<strong>de</strong>s flammes, imposèrent le silence. Axel se tut et contempla le susceptible animal. Il était<br />
d’un gris-roux brillant. Son épaisse livrée virait au blanc éclatant au niveau <strong>de</strong> ses pattes et