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Urbanisation de la Chine, utopie et réalité d o ssier - ccifc

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DOSSIER专 栏Des nongminggong dans une ruelle pékinoise. Le waidiren qui vient <strong>de</strong> l’extérieur se reconnaîtà ses manières <strong>et</strong> à son accent. 在 北 京 胡 同 里 的 外 地 人 。 可 以 通 过 举 止 和 口 音 认 出 他 们 。•••distinction passe au niveau <strong>de</strong>l’emploi, entre ceux qui ont un travail fixesa<strong>la</strong>rié qui donne droit à une protectionsociale <strong>et</strong> ceux qui ne l’ont pas. Mêmeà Pékin, plus <strong>de</strong> <strong>la</strong> moitié <strong>de</strong>s gens n’ontpas <strong>de</strong> contrats <strong>de</strong> travail <strong>et</strong> disparaissent<strong>de</strong>s statistiques. Dans c<strong>et</strong>te économie informelle,on trouve aussi bien <strong>de</strong>s titu<strong>la</strong>ires<strong>de</strong> hukou que <strong>de</strong>s waidiren.La troisième catégorie est celles <strong>de</strong>s gensqui ne rentrent dans aucune catégorie <strong>et</strong>dont personne ne sait ce qu’ils font. Quandon va dans les « vil<strong>la</strong>ges » recréés en villedans les zones que les paysans pékinoisont dé<strong>la</strong>issées au-<strong>de</strong>là du quatrième périphériqueà Pékin, on r<strong>et</strong>rouve <strong>de</strong>s nongmingongsans statut, <strong>de</strong>s écoles <strong>de</strong> nongmingongplus ou moins illégales qui naissent<strong>et</strong> meurent… <strong>de</strong>s enfants qui s’arrêtent aucollège, puis trainent dans les wangba, lescafés intern<strong>et</strong>. Des sociologues chinois ontcommencé à travailler sur ces migrants <strong>de</strong><strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième génération.C. : La société chinoise apparaît très mobile. Commentfonctionne <strong>la</strong> promotion sociale <strong>et</strong> commentfait-elle naître <strong>de</strong> nouvelles cultures urbaines ?J.-L. R. : Attention au mythe. S’il y a <strong>de</strong>s possibilités<strong>de</strong> promotion très faciles à l’intérieur<strong>de</strong>s blocs, on passe très difficilement d’unbloc à l’autre ! Le premier bloc regroupepaysans <strong>et</strong> nongmingong. Il vaut mieuxêtre nongmingong que paysan. On a plusd’argent, on s’habille <strong>et</strong> mange mieux, onpeut envoyer <strong>de</strong> l’argent à sa famille pourlui perm<strong>et</strong>tre <strong>de</strong> monter dans <strong>la</strong> hiérarchiesociale. Malgré l’exploitation, être migrantest le plus souvent vécu comme une promotionsociale <strong>et</strong> financière. Une paysannedans une p<strong>et</strong>ite ville <strong>de</strong> Mongolie me disaitque sa famille gagnait 200 Rmb (environ 20euros) par an alors qu’elle seule, coiffeuseen ville à Chifeng, gagnait entre 1 000 <strong>et</strong>1 500 Rmb par mois.Le <strong>de</strong>uxième bloc est constitué par lepeuple urbain qui travail<strong>la</strong>it en usine dansles années 70 <strong>et</strong> qui a enfanté un rej<strong>et</strong>onunique dans les années 80 qui a pu faire<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>et</strong> jouit d’un capital sco<strong>la</strong>ire <strong>et</strong>social. En étant pékinois ou shanghaien, il aplus facilement accès à un travail. Les promotionssociales peuvent aller assez vite.Un fils d’ouvriers <strong>et</strong> d’employés peut entrer© Anne Garrigueà l’université Tsinghua ou celle <strong>de</strong> Fudan s’iltravaille bien. Aller à l’université en <strong>Chine</strong>a une valeur énorme <strong>et</strong> les voies d’accèsrestent urbaines. Un jeune Pékinois a <strong>de</strong>fortes probabilités <strong>de</strong> finir à l’université alorsqu’un rej<strong>et</strong>on <strong>de</strong> villes moyennes <strong>et</strong> encoreplus un fils <strong>de</strong> paysans auront beaucoupplus <strong>de</strong> difficultés car il existe <strong>de</strong>s quotaslimitant l’accès à l’université <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong>paysans ou d’habitants <strong>de</strong> p<strong>et</strong>ites <strong>et</strong> moyennesvilles.Le troisième bloc c’est celui <strong>de</strong>s « fils <strong>de</strong>princes », ces enfants <strong>de</strong> hauts cadres quiforment un club très exclusif. Un jeuneétudiant bril<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> Tsinghua qui monte sasociété n’aura pas forcément le sentimentd’être au zénith parce que <strong>la</strong> déterminationpar <strong>la</strong> naissance <strong>et</strong> l’appartenance à unegran<strong>de</strong> famille restent très importantes.Les p<strong>la</strong>ces les plus élevées dans <strong>la</strong> hiérarchiesociale sont contrôlées par quelquesgran<strong>de</strong>s familles d’origine révolutionnaire.A noter que les signes d’appartenance ausomm<strong>et</strong> ne sont pas encore très c<strong>la</strong>irs. Lessignes <strong>de</strong> distinction sont en train d’êtrecréés alors qu’en France ils remontent souventau XVIII e siècle. On trouve encore <strong>de</strong>sélites chinoises qui rotent à table. Le bouleversement<strong>de</strong>s hiérarchies remonte auxannées 80 <strong>et</strong> même 70. J’ai un collègue historienà Tsinghua qui était lycéen au lycéenuméro 4 <strong>de</strong> Pékin avec tous les dirigeantsactuels. C’étaient ses amis mais aujourd’huiil n’appartient plus à ce milieu. Il pourraitutiliser ce capital s’il faisait <strong>de</strong> <strong>la</strong> politiqueou <strong>de</strong>s affaires. Il y a aussi <strong>de</strong>s quinquagénairesqui ont conservé <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions avec<strong>de</strong>s gens avec lesquels ils avaient été envoyésà <strong>la</strong> campagne pendant <strong>la</strong> Révolutionculturelle. On a donc encore du mal àfaire une cartographie sociale en fonction<strong>de</strong>s manières <strong>et</strong> <strong>de</strong>s réseaux mais <strong>la</strong> coupurebendiren/waidiren ou rural/urbain estforte. Il faut observer <strong>la</strong> tête <strong>de</strong>s Pékinois <strong>de</strong>souche quand ils voient débarquer dans lemétro un waidiren. Il le reconnaissent à sonton <strong>de</strong> voix plus fort, son dialecte, son accent,même à sa façon <strong>de</strong> s’habiller…C. : A combien évaluez-vous l’importance <strong>de</strong> <strong>la</strong>c<strong>la</strong>sse moyenne urbaine chinoise <strong>et</strong> comment <strong>la</strong>caractériser ?J.-L. R. : J’ai une vision constructiviste <strong>de</strong><strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse moyenne. Pour moi, a priori ellen’existe pas. Mais, dans toute société, à unmoment donné, une société peut vou-116Connexions / juill<strong>et</strong> 2010

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