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- Les autres.- Quels autres ?- Ben, <strong>le</strong>s autres. Ceux qui l’ont flingué, quoi. Que même c’est chaud. Y m’ontdit qu’y pouvaient m’embarquer, pour complicité de meurtre. À cause d’la mob. L’avraiment flingué un type ?Une bouffée de cha<strong>le</strong>ur m’envahit. Donc ils savaient. Je bus en fermant <strong>le</strong>syeux. Je ne voulais pas que Djamel voie mon troub<strong>le</strong>. La sueur ruissela sur mon front,mes joues, et dans mon cou. Ils savaient. De me <strong>le</strong> redire, une nouvel<strong>le</strong> fois, me fitfrissonner.- C’était qui ce mec ?J’ouvris <strong>le</strong>s yeux. Je commandai une nouvel<strong>le</strong> bière. J’avais la bouche sèche.J’avais envie de lui raconter à Djamel : Manu, Ugo et moi. L’histoire de trois copains.Mais l’histoire, je pouvais la lui servir de n’importe quel<strong>le</strong> façon, il ne retiendrait queManu et Ugo. Pas <strong>le</strong> flic. Le flic c’était tout ce qui <strong>le</strong> faisait gerber. L’injustice même,rien que d’exister.Police machine matrice d’écervelésmandatés par la justiceSur laquel<strong>le</strong> je pissegueulait NTM, des rappeurs de Saint-Denis. Un hit, chez <strong>le</strong>s quinze-dix-huit ansdes banlieues, malgré <strong>le</strong> boycott de la plupart des radios. La haine du flic, ça <strong>le</strong>sunissait <strong>le</strong>s mômes. Faut dire qu’on ne <strong>le</strong>s aidait pas à avoir une haute image denous. J’étais payé pour <strong>le</strong> savoir. Et sur mon front, il n’était pas écrit : flic sympa. Je nel’étais pas, d’ail<strong>le</strong>urs. Je croyais à la justice, à la loi, au droit. Ces choses-là. Quepersonne ne respectait, parce que nous, <strong>le</strong>s premiers, on s’asseyait dessus.- Un truand, j’ai dit.Djamel se foutait de ma réponse. Un flic ne pouvait donner qu’une tel<strong>le</strong>réponse. Il ne s’attendait pas à ce que je lui dise : « C’était un mec bien, et, en plus,c’était mon pote. » Mais peut-être bien que c’est ce que j’aurais dû lui répondre. Peutêtrebien. Mais je n’en savais plus rien, de ce qu’il fallait répondre à des mômescomme lui, comme à tous ceux que je croisais dans <strong>le</strong>s cités. Des fils d’immigrés,sans boulot, sans avenir, sans espoir.Il <strong>le</strong>ur suffisait d’ouvrir la télé aux infos pour apprendre qu’on avait baisé <strong>le</strong>urpère, et qu’on s’apprêtait à <strong>le</strong>s baiser eux encore mieux. Driss m’avait raconté qu’unde ses copains, Hassan, <strong>le</strong> jour où il avait touché son premier salaire, il s’était pointé àla banque. Il pétait de joie. Il se sentait enfin respectab<strong>le</strong>, même avec un salaire desmicard. « Y m’faudrait un prêt de trois briques, m’sieur. Pour me payer unebagno<strong>le</strong>. » Ils lui avaient ri au nez, à la banque. Ce jour-là, il avait tout compris.Djamel, il savait ça déjà. Et dans ses yeux, c’était Manu, Ugo et moi que je voyais.Trente ans plus tôt.- Je peux la ressortir, la mob ?- Tu devrais la refourguer. Si tu veux mon avis.- Les autres, y m’ont dit que ça faisait pas de problème. Il me regarda denouveau à la dérobée. J’<strong>le</strong>ur ai pas dit, que vous m’aviez demandé pareil.- Quoi ?- D’la mettre en planque. Et tout ça.Le téléphone sonna. Du comptoir, Ange me fit signe.- Pérol, pour toi.Je pris <strong>le</strong> combiné.- Comment t’as su que j’étais là ?

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