grand sourire. Un sourire carnassier.- Tu voulais me rencontrer, on m’a dit.- J’espérais des présentations.- Finasse pas. J’suis Toni. Sanchez, il bave trop. Et il mouil<strong>le</strong> devant n’importequel flicard. Faci<strong>le</strong> de lui faire raconter des choses.- Toi t’as <strong>le</strong>s couil<strong>le</strong>s plus accrochées ?- Moi, je t’emmerde ! Ce qu’tu sais de moi ou rien, c’est pareil. Toi, t’es rien.T’es juste bon à balayer la merde chez <strong>le</strong>s crouil<strong>le</strong>s. Et encore, paraît qu’t’y bril<strong>le</strong>s pasdes masses. Là où tu mets <strong>le</strong>s pieds, c’est pas ta place. J’ai quelques copains dans tamaison. Y pensent que si tu changes pas de trottoir, faudra t’casser <strong>le</strong>s quil<strong>le</strong>s. Leconseil y t’vient d’eux. Et j’m’associe en p<strong>le</strong>in. Clair ?- Tu me fais peur.- Rigo<strong>le</strong> Ducon ! J’pourrais t’aligner qu’ça ferait pas une vague. Quand unconnard se fait étendre, ça fait jamais de vague. C’est bon pour moi. Et pour toi aussi.Si je te plombe, tes copains prendront ta doublure.- Mais ça n’arrivera pas.- Pourquoi ? Tu m’auras tiré dans <strong>le</strong> dos avant ?Ses yeux se voilèrent légèrement. Je venais de dire une connerie. Ça mebrûlait de lui lâcher que j’en savais plus qu’il ne <strong>le</strong> croyait. Mais je ne <strong>le</strong> regrettais pas.J’avais touché juste. J’ajoutai, pour me rattraper :- T’as une tête à ça, Toni.- C’que tu penses, je me <strong>le</strong> mets au cul ! Oublie pas ! Le conseil y en auraqu’un, pas deux. Et oublie Sanchez.Pour la deuxième fois en quarante-huit heures, on me menaçait. D’un conseil,pas de deux. Avec Toni, c’était moins douloureux que la nuit dernière, mais tout aussihumiliant. J’eus envie de lui tirer une bal<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> ventre, là sous la tab<strong>le</strong>. Juste pourcalmer ma haine. Mais je n’allais pas buter ma seu<strong>le</strong> piste. Et de toute façon, jen’avais pas d’arme sur moi. J’emportais rarement mon arme de service. Il finit samauresque, comme si de rien n’était, et se <strong>le</strong>va. Il me jeta un regard à faire peur. Je <strong>le</strong>pris pour argent comptant. Ce type était un vrai tueur. Peut-être qu’il devenaitnécessaire que je me balade armé.Toni s’appelait Antoine Pirelli. Il habitait rue Clovis Hugues. À la Bel<strong>le</strong>-de-Mai,derrière la gare Saint-Char<strong>le</strong>s. Historiquement, <strong>le</strong> plus vieux quartier populaire deMarseil<strong>le</strong>. Un quartier ouvrier, rouge. Autour du bou<strong>le</strong>vard de la Révolution, chaquenom de rue salue un héros du socialisme français. Le quartier avait enfanté dessyndicalistes purs et durs, des militants communistes par milliers. Et de bel<strong>le</strong>sbrochettes de truands. Francis <strong>le</strong> Belge était un enfant du quartier. Aujourd’hui, ici, onvotait presque à égalité pour <strong>le</strong>s communistes et <strong>le</strong> Front national.À peine rentré au bureau, j’étais allé vérifier l’immatriculation de sa Golf. Tonin’était pas fiché. Cela ne me surprit pas. S’il l’avait été, ce dont j’étais sûr, quelqu’unavait fait <strong>le</strong> ménage. Mon troisième homme avait un visage, un nom et une adresse.Tous risques courus, c’était une bonne journée.J’allumai une cigarette. Je n’arrivais pas à quitter <strong>le</strong> bureau. Comme si quelquechose m’y retenait. Mais je ne savais quoi. Je repris <strong>le</strong> dossier Mourrabed. Je relusson interrogatoire. Cerutti l’avait complété. Mourrabed ne louait pas l’appartement. Ilétait au nom de Raoul Farge, depuis un an. Le loyer était payé en espèces tous <strong>le</strong>smois. Et régulièrement. Ce qui était inhabituel dans <strong>le</strong>s cités. Cerutti trouvait çaanormal, mais il était arrivé trop tard pour trouver son dossier à l’Office d’HLM. Lesbureaux fermaient à cinq heures. Il se proposait d’y al<strong>le</strong>r demain matin.Bon travail, je me dis. Par contre, c’était <strong>le</strong> bide comp<strong>le</strong>t côté dope. On n’avait
ien trouvé dans l’appartement, ni dans la bagno<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> devait bien être quelque part.Pour une bagarre, même saignante, on ne pourrait pas obtenir la mise en examen deMourrabed. On serait obligé de <strong>le</strong> relâcher.C’est en <strong>le</strong>vant <strong>le</strong>s yeux que j’eus <strong>le</strong> déclic. Au mur, il y avait une vieil<strong>le</strong> affiche.La route des vins en Bourgogne. Et dessous. Visitez nos caves. La cave ! Bordel demerde ! C’était certainement dans la cave que Mourrabed la planquait, cette putain dedope. J’appelai la fréquence radio. Je tombai sur Reiver, l’Antillais. Je croyais l’avoirmis en service de jour, celui-là. Cela m’irrita.- T’es de nuit, toi !- Je remplace Loubié. L’a trois mioches. Moi, suis célibataire. Pas même unenana qui m’attend. C’est plus juste comme ça. Non ?- OK. Fonce cité Bassens. Tu te renseignes si <strong>le</strong>s immeub<strong>le</strong>s ont des caves. Jebouge pas.- Y en a, il répondit.- Comment tu sais ça ?- Bassens, je connais.Le téléphone sonna. C’était Ange, des Treize-Coins. Djamel était passé deuxfois. Il revenait dans une quinzaine de minutes.- Reiver, je dis. Reste dans <strong>le</strong> secteur. J’arrive. Dans une heure à tout casser.Djamel était au comptoir. Une bière devant lui. Il portait un tee-shirt rouge avecl’inscription « Charly pizza » en noir.- T’avais disparu, je lui dis en m’approchant.- Je bosse pour Charly. De la place Noail<strong>le</strong>s. J’<strong>livre</strong> des pizzas. Du pouce, ilmontra la moby<strong>le</strong>tte garée sur <strong>le</strong> trottoir. J’ai une nouvel<strong>le</strong> mob ! Choucarde, non ?- C’est bien, je dis.- Ouais. C’est cool et ça fait un peu d’thune.- Tu me cherchais l’autre soir ?- J’ai un truc, qu’ça va vous intéresser. Le type qui z’ont dessoudé dansl’passage, ben, il était pas chargé. Le flingue, y z’y ont collé après.Ça me sonna. Si fort, que mon estomac se raidit. Je sentis la dou<strong>le</strong>urréapparaître au fond du ventre. J’avalai <strong>le</strong> pastis qu’Ange m’avait servi d’autorité.- D’où tu tiens ça ?- La mèr’d’un copain. Y z’habitent au-dessus du passage. El<strong>le</strong> étendait <strong>le</strong> linge.El<strong>le</strong> a tout vu. Mais el<strong>le</strong> mouftera que dal<strong>le</strong>, la mèr’. Vos copains y sont passés.Papiers et tout <strong>le</strong> bordel. La peur qu’el<strong>le</strong> a. Ce qu’j’vous dis, c’est net.Il regarda l’heure mais il ne bougea pas. Il attendait. Je lui devais quelquechose et il ne partirait avant. Même pour gagner quelques thunes.- Ce type, tu sais, il s’appelait Ugo. C’était mon ami. Un ami d’avant. De quandj’avais ton âge.Djamel opina. Il enregistrait et il fallait que, dans sa tête, ça se place quelquepart.- Ouais. Du temps des conneries, vous v’<strong>le</strong>z dire.- C’est ça, oui.Il enregistra à nouveau, en pinçant <strong>le</strong>s lèvres. Pour lui, qu’ils aient fait la peau àUgo comme ça, c’était dégueulasse. Ugo méritait justice. J’étais la justice. Mais dansla tête de Djamel justice et flic, ça ne collait pas vraiment. J’étais peut-être <strong>le</strong> copaind’Ugo, mais j’étais aussi un flic, et il avait du mal à l’oublier. Il avait fait un pas versmoi, pas deux. Nous étions encore loin de la confiance.- M’a paru sympa, votr’copain. Il regarda à nouveau l’heure, puis moi. Y aencore une chose. Hier, que vous me cherchez, deux types y vous filaient. Pas des
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assis sur les rochers, silencieux,
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Laurent.- T’es con ou quoi ! C’
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que je trouve ?Il se dégagea vivem
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- Au revoir, monsieur Varounian, r
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ochettes aux cent épices, grillée
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Le monde se remettait en ordre. Nos