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ne l’imaginais pas aussi machiavélique. Je revins à une autre question : comment Ugoavait-il su aussi vite pour Zucca ? Et par qui ? Une autre piste à suivre. Je ne savaispas encore comment m’y prendre, mais je devais m’y mettre. Sans me trouver dans<strong>le</strong>s pattes d’Auch.J’avais fini <strong>le</strong>s bières et réussi quand même à prendre un loup. Deux kilos,deux kilos cinq. Pour une mauvaise journée, c’était mieux que rien. Honorine attendaitmon retour. Assise sur sa terrasse, el<strong>le</strong> regardait la télé par la fenêtre.- Mon pôvre, z’auriez pas fait fortune, comme pêcheur, vé ! dit-el<strong>le</strong> en voyantmon loup.- Je suis jamais parti pour faire fortune.- Juste un loup comme ça… El<strong>le</strong> <strong>le</strong> regarda d’un air désolé. Z’al<strong>le</strong>z <strong>le</strong> fairecomment ? Je haussai <strong>le</strong>s épau<strong>le</strong>s. Vé ! à la sauce Bel<strong>le</strong> Hélène, y serait peut-êtrepas mal.- Faudrait un crabe, et j’en ai pas.- Oh ! Vous, z’avez votre tête des mauvais jours. Boudiou, faut pas trop vouschatouil<strong>le</strong>r, qu’on dirait ! Dites, j’ai des langues de morue, qu’el<strong>le</strong>s marinent depuishier. Si ça vous dit, je <strong>le</strong>s amène demain ?- Jamais goûté. Où vous avez trouvé ça ?- C’est une nièce, vé, qu’el<strong>le</strong> me <strong>le</strong>s a ramenées de Sète. Moi, j’en ai plusmangé depuis que mon pauvre Toinou il est parti. Bon, je vous ai laissé de la soupeau pistou. El<strong>le</strong> est encore tiède. Reposez-vous, que vous avez vraiment la petite mine.Babette n’hésita pas une seu<strong>le</strong> seconde.- Batisti, el<strong>le</strong> dit.Batisti. Merde ! Comment n’y avais-je pas pensé plus tôt ? Tel<strong>le</strong>ment évidentque ça ne m’était même pas venu à l’esprit. Batisti avait été un des hommes de mainde Mémé Guérini, <strong>le</strong> caïd marseillais des années 40. Il avait décroché il y a unevingtaine d’années. Après la tuerie du Tanagra, un bar du Vieux-Port, où quatrerivaux, proches de Zampa, furent exécutés. Ami de Zampa, Batisti s’était-il sentimenacé ? Babette l’ignorait.Il avait ouvert une petite société d’import-export et coulait une vie paisib<strong>le</strong>,respecté de tous <strong>le</strong>s truands. Il n’avait jamais pris parti dans la guerre des chefs,n’avait manifesté aucune velléité de pouvoir et de fric. Il conseillait, servait de boîteaux <strong>le</strong>ttres, mettait en liaison <strong>le</strong>s hommes entre eux. Lors du casse de Spaggiari àNice, c’est lui qui, en p<strong>le</strong>ine nuit, monta l’équipe capab<strong>le</strong> de venir à bout des coffresde la Société Généra<strong>le</strong>. Les hommes aux chalumeaux. Au moment du partage, ilrefusa sa commission. Il avait rendu service, c’est tout. Il gagnait en respect. Et <strong>le</strong>respect dans <strong>le</strong> Milieu, c’était la meil<strong>le</strong>ure assurance sur la vie.Manu atterrit chez lui un jour. Un passage obligé, si l’on ne voulait pas rester uncasseur de rien. Manu avait longtemps hésité. Depuis <strong>le</strong> départ d’Ugo, il était devenudu genre solitaire. Il ne faisait confiance à personne. Mais <strong>le</strong>s petits braquagesdevenaient dangereux. Et puis, il y avait de la concurrence. Pour pas mal de jeunesArabes, c’était devenu un sport favori. Quelques coups réussis permettaient deconstituer la cagnotte nécessaire pour devenir dea<strong>le</strong>r, et avoir <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> d’unlotissement, voire de la cité. Gaëtan Zampa, qui avait reconstitué <strong>le</strong> milieu marseillais,venait de se pendre dans sa cellu<strong>le</strong>. Le Mat et Le Belge tentaient d’éviter un nouveléclatement. On recrutait.Manu se mit à bosser pour <strong>le</strong> Belge. Occasionnel<strong>le</strong>ment. Batisti et Manu, ilss’étaient plu. Manu avait trouvé en lui <strong>le</strong> père qu’il n’avait jamais eu. Le père idéal, quilui ressemblait, et qui ne lui faisait pas la mora<strong>le</strong>. Le pire des pères, pour moi. Jen’aimais pas Batisti. Mais j’avais eu un père, et je n’avais pas vraiment eu à m’en

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