26.06.2013 Views

Télécharger ce livre au format PDF - Index of

Télécharger ce livre au format PDF - Index of

Télécharger ce livre au format PDF - Index of

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

21<br />

Mon déjeuner s’est résumé à une pizza plus ou moins congelée, <strong>ce</strong> qui m’allait parfaitement vu que<br />

c’était un lundi. Moi-même, tous les lundis ou presque, j’étais pétrifiée, obligée de quitter le cocon de ma<br />

chambre pour affronter les feux du lycée.<br />

Heureusement, à part ma colle, mon week-end s’était plutôt bien passé. Papa et Maman ne s’étaient<br />

pas adressé la parole pour je ne sais quelle raison, et Frankie était parti faire une retraite religieuse avec<br />

un copain. Non pas que dans la famille, on aille be<strong>au</strong>coup à l’église, chose que les médias n’avaient pas<br />

manqué de souligner, mais apparemment il y avait deux filles qui fréquentaient la même église qu’un de<br />

ses amis et il avait décidé de passer du temps en tête à tête avec l’une d’elles. Si Frankie pouvait mettre<br />

la main sur une des filles pendant le week-end, il ne se gênerait pas – retraite ou pas retraite –, <strong>ce</strong> que je<br />

n’approuvais pas, mais en essayant de les séduire, il échapperait à la guerre froide entre Papa et Maman.<br />

Mon moyen à moi d’y échapper, c’était de rester enfermée dans ma chambre. De toute façon mes<br />

parents n’attendaient plus rien de moi. Ils ne m’appelaient même plus pour passer à table. J’imagine que<br />

c’est par<strong>ce</strong> qu’ils ne dînaient plus vraiment. Du coup, quand je sentais que chacun vaquait à ses<br />

occupations, je des<strong>ce</strong>ndais discrètement pour aller chiper quelque chose dans le réfrigérateur avant de<br />

remonter dans ma chambre, tel un raton laveur après avoir fouillé dans les poubelles.<br />

Le samedi soir, par exemple, je suis des<strong>ce</strong>ndue après avoir entendu la porte claquer, mais manque de<br />

chan<strong>ce</strong>, je suis tombée sur Papa assis devant un bol de céréales.<br />

– Ah ! je croyais que vous étiez tous les deux partis.<br />

– Ta mère est allée rejoindre je ne sais trop quel groupe de soutien. Y a rien à bouffer dans <strong>ce</strong>tte<br />

baraque ! À moins d’aimer les céréales.<br />

J’ai jeté un œil dans le réfrigérateur. Il avait raison. À part un litre de lait, une bouteille de ketchup,<br />

un reste de haricots verts et une douzaine d’œufs, il n’y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent.<br />

– Les céréales, ça me va, ai-je dit en attrapant une grosse boîte <strong>au</strong>-dessus du Frigidaire.<br />

– Elles sont ran<strong>ce</strong>s, putain.<br />

Il avait le bord des yeux rouge ; il n’était pas rasé ; ses mains étaient rugueuses, tremblant légèrement.<br />

Ça faisait une éternité que je n’avais pas fait attention à lui ; je n’avais jamais remarqué à quel point il<br />

avait vieilli. Il avait l’air usé, <strong>au</strong> bout du roule<strong>au</strong>.<br />

J’ai versé du lait pendant que Papa mangeait sans rien dire. Je sortais de la cuisine quand je l’ai<br />

entendu grommeler :<br />

– Tout est ran<strong>ce</strong> dans <strong>ce</strong>tte baraque de merde.<br />

Je me suis arrêtée à mi-chemin dans l’escalier.<br />

– Tu t’es encore engueulé avec Maman ?<br />

– À quoi bon, de toute façon ?<br />

– Tu… tu voudrais que je commande, genre, une pizza ? Pour le dîner, je veux dire.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!