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– Tu n’imagines pas le bin’s que ça a été, m’a-t-elle avoué d’un ton amer. Une fois de plus. Il y avait
des journalistes dans le jardin. Une fois de plus. Il a fallu que le docteur Hieler intervienne pour qu’ils
s’en aillent. Je t’ai accordé le bénéfice du doute, Valérie, et tu as vu comment ça se termine ? Ton père a
peut-être raison. On te donne ça, un centimètre, et tu prends ça, un mètre.
– Pardon. Je ne savais pas, je te jure, je n’ai pas cherché à m’enfuir. J’étais juste sortie me balader.
– Ça fait des heures que tu es partie, Valérie. Tu n’avais prévenu personne. J’ai cru que tu avais été
kidnappée. Ou pire. J’avais peur que ce gamin, Troy, ait mis sa menace à exécution.
– Pardon, Maman. J’ai perdu la notion du temps.
– N’importe quoi ! s’est écriée une voix en haut.
J’ai levé les yeux en même temps que Maman : c’était Frankie, debout au premier étage, en caleçon et
T-shirt, les cheveux ramassés et pointant d’un seul côté.
– Frankie…
– Papa a raison, tout ce qu’elle fait, c’est semer la zizanie.
– Je répète, je vous demande pardon. Je n’ai pas cherché à semer la zizanie. Je suis allée au cimetière
et je suis tombée sur Duce, du coup on a discuté et j’ai oublié l’heure. J’aurais dû vous prévenir, c’est
vrai.
– Duce Barnes ? a repris Maman, l’air interloquée.
J’ai baissé les yeux.
– Oh, Valérie, encore un ! a-t-elle soupiré. Encore un type du genre de Nick. Ça ne t’a pas servi de
leçon ? Avec tout ce qui s’est passé, tu ne trouves rien de mieux à faire que de continuer à traîner avec ce
genre de garçons et à foncer droit vers les ennuis ?
– Pas du tout, c’est pas du tout ce que tu penses.
– J’avais un match de sélection de foot, a hurlé Frankie du haut de l’escalier. Je n’ai pas pu y aller
parce que Papa et Maman étaient tous les deux ici, balisant parce que tu avais disparu. Écoute, Valérie, je
veux bien prendre ta défense mais tu ne penses qu’à toi. Tu crois tout le temps que toi et Nick, vous étiez
des victimes. Même aujourd’hui, alors que Nick n’est plus là, tu continues à bousiller la vie des autres.
C’est pas possible. Papa a raison. J’en ai ras le bol que ma vie dépende de la tienne.
Il est retourné dans sa chambre en claquant la porte.
– Sympa, merci, a lancé Maman en agitant la main vers le haut de l’escalier. Cela dit, tu ne pourrais
pas nous laisser un peu souffler, ne serait-ce qu’une journée ? J’étais là, j’avais décidé de te faire
confiance et tu…
– Je n’ai rien fait de mal. Je suis allée me promener. Je n’ai pas fichu ta journée en l’air. C’est toi qui
la fous en l’air en refusant de me faire confiance. Quand est-ce que vous allez comprendre enfin ça ? Je
n’ai tiré sur personne ! Je n’ai rien fait ! Arrêtez de me traiter comme un monstre. Je n’en peux plus de me
prendre tout dans la figure.
J’ai entendu la porte de Frankie s’entrouvrir, mais je n’ai pas levé les yeux. Je les ai fermés et j’ai
pris une longue respiration pour me calmer. Je redoutais d’être la cause d’un nouveau drame dans la vie
de Frankie.
– Je suis sortie me promener pour aller faire mes adieux à Nick, ai-je repris en rouvrant les yeux et
en fixant Maman. Tu devrais te réjouir. Nick est officiellement sorti de ma vie, et à jamais. Maintenant tu
peux commencer à me faire confiance.
Maman s’est enfin détendue, relâchant ses bras le long du corps.
– Bien, a-t-elle lâché. Au moins, tu es en sécurité.
Elle s’est retournée pour monter l’escalier, m’abandonnant dans l’entrée. J’ai entendu Frankie
refermer sa porte. Ouais, pensais-je. En sécurité.