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essemble ? Je n’avais aucune envie de mourir sur le moment, pendant la tuerie, je veux dire. Au
contraire, je priais pour qu’il ne tire pas sur moi. Mais aujourd’hui, je me demande si je n’aurais pas
préféré y passer. Dès que je sors, j’entends les gens qui font des commentaires dans mon dos, genre
« Quel dommage. Elle était jolie. » Elle était… Comme si c’était du passé. Non pas que le fait d’être
jolie soit la chose la plus importante du monde, mais…
Inutile qu’elle poursuive, j’avais compris. Être jolie, c’est pas tout, mais être franchement moche, ça
peut l’être.
J’étais désemparée. Elle était tellement directe, tellement courageuse, que je ne savais que lui
répondre. J’ai jeté un œil sur mon jean. J’ai repéré une légère déchirure sur la cuisse et j’en ai profité
pour y enfoncer un doigt.
– Tu sais, a-t-elle poursuivi, je ne me souviens pas de tout ce qui s’est passé ce jour-là. Mais j’ai
parfaitement conscience que tu n’y étais pour rien. Je l’ai dit à la police. Avec Jessica, on est allées au
commissariat et tout et tout. Mes parents étaient vraiment mal. Ils avaient besoin de s’en prendre à
quelqu’un qui était toujours en vie. Ils n’arrêtaient pas de me dire que je ne pouvais pas savoir toute la
vérité. Que j’oubliais sûrement des éléments. Mais moi, je n’avais aucun doute, tu n’avais pas tiré. Je t’ai
vue, quand tu t’es enfuie après avoir essayé de l’empêcher de tirer. Et je t’ai aussi vue quand tu t’es
agenouillée près de Christy Bruter pour lui venir en aide.
Je continuais à tripoter le trou de mon jean sans rien dire. Épuisée, Ginny s’est laissé aller contre son
oreiller en refermant les yeux.
– Je te remercie, ai-je fini par dire, tout doucement, comme si je m’adressais au trou dans mon jean
plus qu’à elle. Je te demande pardon. Vraiment, sincèrement, je te demande pardon pour ce que tu as subi.
Par ailleurs, peut-être que tu t’en fiches, mais je te trouve aussi jolie.
– Merci.
Sa respiration est devenue de plus en plus lente, régulière, et j’ai compris qu’elle s’endormait.
Mon regard errait jusqu’au moment où je suis tombée sur un journal qui traînait sur la chaise où était
assise sa mère. Le gros titre m’a sauté à la figure en hurlant :
Tentative de suicide d’une rescapée de la tuerie
Le directeur du lycée de Garvin confirme son soutien
aux élèves
Comme par hasard, l’article était signé par Angela Dash. Tout à coup, j’ai eu un flash. J’ai pris le
journal, je l’ai plié en quatre et je l’ai fourré dans mon sac à dos.
– Il vaut mieux que je te laisse dormir, ai-je murmuré. Je sais ce qu’il me reste à faire. Je reviendrai,
c’est promis, ai-je ajouté d’une voix timide.
– D’accord, ça serait sympa, m’a répondu Ginny sans rouvrir les yeux.