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paraissait de plus en plus lointaine et j’avais be<strong>au</strong> l’entendre, j’avais l’impression qu’elle ne s’adressait<br />

pas à moi. Qu’elle n’était pas dans mon monde. Pas submergée par <strong>ce</strong>tte avalanche d’horreur. J’étais<br />

seule, absolument seule.<br />

– Valérie, c’est à toi que je m’adresse. Mademoiselle, vous pensez qu’elle va bien ? Valérie ? Tu<br />

m’entends ? Seigneur, Ted, fais quelque chose !<br />

– Que veux-tu que je fasse, Jenny ? Qu’est-<strong>ce</strong> que je peux faire ?<br />

– Autre chose que de rester scotché comme ça ! C’est ta fille, Ted, nom de Dieu, ta famille ! Valérie,<br />

réponds-moi ! Val !<br />

J’étais happée par l’écran de télé, voyant tout en ne voyant pas les images qui défilaient.<br />

Nick. Il avait tiré sur des gens. Sur Christy Bruter. Sur M. Kline. Mon Dieu ! Il avait tiré sur eux.<br />

Pour de vrai. Je l’avais vu de mes propres yeux, il avait tiré sur eux. Il avait…<br />

J’ai tendu la main pour tâter le bandage <strong>au</strong>tour de ma cuisse et j’ai éclaté en sanglots. Une vraie crise<br />

de larmes, avec les ép<strong>au</strong>les et les lèvres qui tremblaient – « des sanglots du fond du cœur » comme<br />

j’avais entendu dire un jour Oprah Winfrey dans son émission.<br />

Maman a bondi de sa chaise pour se pencher <strong>au</strong>-dessus de moi.<br />

– Mademoiselle, je crois qu’elle a mal. Je pense qu’il f<strong>au</strong>drait que vous lui donniez quelque chose<br />

contre la douleur. Ted, demande-leur de lui donner un médicament contre la douleur.<br />

Imper<strong>ce</strong>ptiblement, à travers une espè<strong>ce</strong> de brume de surprise, j’ai vu qu’elle pleurait. Elle pleurait<br />

de telle façon que chaque fois qu’elle s’adressait à quelqu’un, c’était sur <strong>ce</strong> ton à la fois bourru et<br />

paniqué, avec une voix be<strong>au</strong>coup trop h<strong>au</strong>te, désespérée.<br />

J’ai aperçu dans le coin de mon champ de vision mon père qui s’approchait d’elle et la prenait par<br />

les ép<strong>au</strong>les pour l’écarter de mon lit. Elle a résisté, puis elle s’est laissé faire et elle a plongé la tête<br />

contre sa poitrine, et tous deux sont sortis de ma chambre. J’ai entendu ses hoquets qui s’éloignaient dans<br />

le couloir.<br />

L’infirmière était en train d’appuyer sur les boutons d’un des moniteurs derrière moi et le flic avait<br />

recommencé à regarder la télé. Frankie avait les yeux rivés sur les couvertures de mon lit, paralysé.<br />

Je pleurais, pleurais, pleurais toutes les larmes de mon corps, jusqu’<strong>au</strong> moment où j’ai eu mal <strong>au</strong><br />

ventre et j’ai cru que j’allais vomir. J’avais comme du sable dans les yeux, et le nez complètement<br />

bouché. J’<strong>au</strong>rais du mal à rapporter les pensées qui m’ont traversé l’esprit à <strong>ce</strong> moment-là, sinon que tout<br />

me paraissait brouillé, noir, c<strong>au</strong>chemardesque. Que je brûlais d’envie de revoir Nick et qu’en même<br />

temps je voulais qu’il disparaisse de ma vie. Que je voulais ma maman et en même temps, j’avais envie<br />

qu’elle disparaisse. Que je sentais que quelque part dans un recoin que mon <strong>ce</strong>rve<strong>au</strong> avait mis à l’abri,<br />

j’étais responsable de <strong>ce</strong> qui s’était passé dans la journée. Que j’avais joué un rôle mais qu’en même<br />

temps je n’avais jamais cherché à jouer <strong>ce</strong> rôle. Cela dit je n’<strong>au</strong>rais pas pu jurer que j’<strong>au</strong>rais refusé si<br />

c’était à refaire. Mais pas pu jurer non plus que j’<strong>au</strong>rais ac<strong>ce</strong>pté…<br />

Ma crise de larmes a fini par se calmer assez pour que je reprenne ma respiration, mais je me sentais<br />

vraiment mal.<br />

– Je vais vomir…<br />

Comme par miracle, l’infirmière a fait apparaître une cuvette en me la brandissant sous le menton.<br />

J’ai plongé la tête.<br />

– Vous pourriez avoir la gentillesse de sortir quelques instants ? a-t-elle demandé <strong>au</strong>x policiers.<br />

Les types sont sortis sans un mot, mais dès qu’ils ont ouvert la porte j’ai entendu des voix étouffées<br />

qui chuchotaient et j’ai reconnu mes parents qui discutaient dans le couloir. Frankie était cloué sur pla<strong>ce</strong>.<br />

De nouve<strong>au</strong> j’ai plongé la tête, avec une série de borborygmes immondes et le nez qui coulait,<br />

dégoulinant de morve dans la cuvette. L’infirmière m’a passé un linge humide sur le visage. La sensation<br />

de fraîcheur m’a fait du bien. J’ai fermé les yeux et j’ai reposé la tête contre mon oreiller.<br />

– C’est normal d’avoir la n<strong>au</strong>sée quand on se réveille après une anesthésie, a-t-elle ajouté d’une voix

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