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Les yeux jaunes des crocodiles

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— Assieds-toi avec nous, dit Iris en lui montrant un fauteuil.<br />

— Non, merci… Je vais aller retrouver mes copains qui sont<br />

au bar à côté.<br />

Elle fit le tour de la table, embrassa sa tante, sa mère, son<br />

oncle et demanda à Joséphine :<br />

— Tu me donnes la permission, maman chérie ? Tu es très en<br />

beauté, ce soir !<br />

— Tu trouves ? dit Joséphine. Pourtant je n’ai rien de spécial.<br />

Si, j’ai couru ce matin, c’est peut-être ça…<br />

— Ce doit être ça ! Allez… À tout à l’heure ! Amusez-vous<br />

bien.<br />

Joséphine la regarda disparaître, intriguée. Elle me cache<br />

quelque chose. Ce n’est pas normal qu’Hortense me fasse un<br />

compliment.<br />

— Allez, dit Philippe. À la santé du livre !<br />

Ils reprirent leurs coupes. Le garçon apporta les cartes pour<br />

qu’ils commandent.<br />

— Nous vous recommandons les écrevisses, ce soir, elles sont<br />

délicieuses…<br />

— Au fait, demanda Philippe, il s’appelle comment ce livre ?<br />

Joséphine et Iris se regardèrent, abasourdies. Elles n’avaient<br />

pas pensé au titre.<br />

— Zut ! dit Jo. C’est vrai, ça, je n’ai pas pensé au titre !<br />

— Pourtant, je t’ai consultée souvent ! la coupa Iris. Tu m’as<br />

toujours dit que tu étais très bonne pour les titres et tu ne m’en<br />

as pas trouvé un !<br />

Elle tenta d’effacer la gaffe de Joséphine. Insista, dit :<br />

— Depuis le temps que je t’ai passé le manuscrit en te<br />

suppliant de me faire <strong>des</strong> suggestions, et rien ! rien de rien ! Tu<br />

m’avais promis, Jo, ce n’est pas sympa !<br />

Joséphine, le nez plongé dans la carte, n’osait regarder<br />

Philippe. Il la dévisageait sans rien dire, le regard lourd de<br />

colère. Cette scène lui rappelait une autre scène, il y a quinze<br />

ans. L’ambition est une passion dévastatrice, pensa-t-il. L’avare<br />

se repaît de son or, le débauché se repaît de chair, l’orgueilleux<br />

se bouffit de vanité, mais l’ambitieux qui n’a pas réussi, de quoi<br />

se nourrit-il si ce n’est de lui-même ? Il se ronge, il se détruit<br />

lentement, rien ne peut apaiser sa soif de briller, de réussir. Il<br />

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