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Les yeux jaunes des crocodiles

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frêle, bien jeune et bien amoureux au milieu <strong>des</strong> cracheurs de<br />

feu, <strong>des</strong> joueurs de tambour et de tambourin, <strong>des</strong> montreurs<br />

d’ours et <strong>des</strong> jongleurs, <strong>des</strong> pages qui servaient le vin et<br />

garnissaient les assiettes de vian<strong>des</strong> rôties qui arrivaient<br />

presque froi<strong>des</strong> de la cuisine car, en ce temps-là, les cuisines<br />

étaient très loin <strong>des</strong> salles de festin. Belle et baignée de frais,<br />

Aliénor chantonnait le refrain que lui avait appris sa nourrice<br />

lors de ses épousailles :<br />

Mon cœur est à vous,<br />

mon corps est à vous.<br />

Quand mon cœur en vous se mit,<br />

Le corps vous donna et promit.<br />

Elle répéta plusieurs fois ces vers comme on dit une prière<br />

dans la nuit et se promit de devenir une reine parfaite, une reine<br />

juste, bonne et douce pour tous ses sujets. »<br />

Joséphine avait baissé la voix jusqu’à ce qu’elle ne fût plus<br />

qu’un murmure et le poids de sa fille, s’alourdissant contre son<br />

sein, lui indiqua que l’enfant dormait et qu’elle pouvait se taire<br />

sans la réveiller.<br />

Hortense était restée longtemps au téléphone avec son père,<br />

puis elle avait raccroché, s’était couchée, avait éteint sans venir<br />

l’embrasser. Joséphine avait respecté son besoin de solitude.<br />

— Tu sais comment aller chez Iris ? demanda Hortense en<br />

abaissant le pare-soleil pour vérifier l’éclat de ses dents et<br />

l’ordonnance de sa coiffure.<br />

— Tu t’es maquillée ? observa Joséphine, apercevant les<br />

lèvres brillantes de sa fille.<br />

— Un peu de gloss que m’a donné une copine… Ce n’est pas<br />

ce que j’appelle se maquiller. Juste un minimum de politesse<br />

envers les autres.<br />

Joséphine ne releva pas l’insolence du propos et préféra se<br />

concentrer sur le chemin à prendre. À cette heure-ci, l’avenue<br />

du Général-de-Gaulle était encombrée, mais il n’y avait pas<br />

d’autre manière de franchir le pont de Courbevoie. Une fois<br />

passé le pont, la circulation serait plus fluide. Enfin, elle<br />

l’espérait.<br />

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