Programme congres - Pierre TAP
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conçue comme un processus complexe qui articule la souffrance psychologique à une réponse par la<br />
substance, dont les effets constituent le processus addictif.<br />
Jean Marc Figard (Université de Franche-Comté)<br />
Psychologie, santé, famille et addiction alcoolique.<br />
Contact : jmf33@wanadoo.fr<br />
L’ENTOUROLOGIE L’objet de notre communication concerne l’entourage de la personne alcoolique que<br />
nous rencontrons dans les groupes de parole, mis en place au CCAA de Besançon depuis dix ans, en<br />
qualité de psychologue et psychothérapeute. Le sujet alcoolique doit effectuer un chemin de guérison<br />
difficile où son entourage joue un rôle important tant au niveau des soins que de la rechute éventuelle. Le<br />
travail de réflexion s’oriente donc vers la problématique complexe des relations entourage/personne<br />
alcoolique. Nous entendons par entourage les personnes qui vivent avec l’alcoolique - et donc qui sont<br />
impliquées dans le soin et la maladie de l’autre - et de qui l’alcoolique attend quelque chose en retour, ce<br />
sera souvent la famille immédiate nucléaire, les parents et enfants, que nous avons pu rencontrer dans nos<br />
groupes de parole. L’idée de la construction d’une " entourologie ", néologisme qui désigne la problématique<br />
des entourages, est nouvelle (Sabatié, 1991) et nous semble pertinente pour souligner la souffrance des<br />
proches qui sont des " victimes " le plus souvent silencieuses à côté des malades A la mise en place des<br />
premiers groupes de parole, il y a dix ans, nous pensions aider le malade alcoolique en prenant en compte<br />
son entourage, et tenter de juguler et réguler l’influence de cet entourage sur les facteurs de rechutes, et de<br />
maintien de l’abstinence, pour les patients. Notre position d’alcoologue de façon univoque, visait le malade<br />
et lui seul, dans une optique de soins en " alcoologie classique ". Or, nous nous sommes rendu compte, au<br />
fur et à mesure des séances de groupes, que l’entourage était lui-même atteint d’une souffrance propre qui<br />
nous a semblé à la fois systématique et constante sur le plan des symptômes, et donc pertinente à traiter<br />
comme telle. Nous savons aujourd’hui que le malade est mieux soigné si l’entourage est pris en compte, et<br />
bon nombre de centres de cure et postcure l’y associent. Toutefois, il nous semble qu’il faut également<br />
prendre en charge l’entourage pour lui-même en ce qu’il montre de souffrances psychique propres, le plus<br />
souvent réactionnelles, c’est l’objet de notre travail de recherche. En effet, en cheminant sur le terrain de nos<br />
pratiques et en maintenant ouvert l’espace de la recherche, nous avons été interpellé par la similitude des<br />
comportements obsessifs de l’entourage du malade alcoolique et de certains traumatisés ou victimes suite à<br />
un choc brutal. Il nous arrive fréquemment, dans le cadre de débriefing post-traumatique, d’intervenir (en<br />
urgence ou non), auprès de populations en souffrance (officier-expert psychologue-sapeur-pompier, cellule<br />
d’urgence médico-psychologique du Doubs, psychologue de la Banque Populaire dans le cadre des suivis<br />
psychologiques de hold-up et de prise d’otages). C’est ainsi que peu à peu une interrogation s’est faite jour,<br />
autour de la névrose traumatique et des facteurs de stress répétés en lien avec l’entourage du sujet<br />
alcoolique. L’entourage du malade alcoolique est fortement stressé au quotidien ainsi que traumatisé au fil<br />
du temps, et notre argument tient dans l’hypothèse suivante : La maladie de l’entourage est une névrose<br />
traumatique qui s’installe de façon chronique avec souffrance psychique, dans une perte progressive de<br />
l’estime de Soi, vers un sentiment obsessif continu qui va de l’obsession de l’alcool de l’autre à l’obsession<br />
du comportement de l’alcoolique. Il s’agit ici bien évidemment de stress post-traumatique et nous pourrons<br />
mettre en évidence un tableau clinique des troubles observés chez l’entourage immédiat, allant de<br />
l’escalade agressive du passage à l’acte aux somatisations les plus diverses, en nous appuyant sur nos<br />
observations cliniques. Les notions de co-dépendance, d’obsession, de déni, de stress post-traumatique,<br />
seront établies et articulées vers une compréhension de ce que nous considérons comme la maladie de<br />
l’entourage autour d’une étude de la famille alcoolique. Une élaboration groupale semble indispensable pour<br />
rétablir un sens de la réalité mais aussi une dimension psychique globale. Le groupe de proche, ou groupe<br />
de parole (en fait groupe de debriefing et de thérapie), fonctionne en groupe ouvert et accueille uniquement<br />
les membres de l’entourage de l’alcoolique. Lieu de debriefing dans un premier temps il permet l’évacuation<br />
possible des traumatismes du quotidien. Secondairement ce groupe permet l’accession à une certaine<br />
mentalisation et analyse au travers de la parole des proches qui peuvent travailler au retour de leur équilibre,<br />
interroger le soi familial et le sens de leurs propres conduites. C’est au sein de ces groupes de parole que<br />
nous proposons un soin psychique qui permet de rompre la solitude et la honte, dans un échange avec<br />
d’autres entourages qui partagent une certaine " familiarité " avec la maladie. Nous traiterons de cette<br />
étrange familiarité des symptôme partagés, en théorisant et conceptualisant ce point de vue, avec comme<br />
cadre de référence une lecture analytique groupale et familiale d’un corps narcissique familial. Pour tenter<br />
de répondre à ces différents axes de préoccupations et de recherche nous proposerons une observation des<br />
groupes thérapeutiques (discours) ainsi qu’une analyse lexicale et syntaxique et une étude des cooccurrences<br />
sur la retranscription de trois groupes de thérapie d’entourages, où les dialogues ont pu être<br />
complètement enregistrés et mis à l’écrit. Bien entendu, l’objectif final de ce travail de réflexion est de mettre<br />
en place des outils conceptuels spécifiques afin d’améliorer les soins portés aux personnes de l’entourages<br />
comme aux individus alcooliques en ouvrant à l’enrichissement des prises en charge et à d’autres<br />
compréhensions de la question alcoolique: La souffrance alcoolique en cache une autre, celle de<br />
l’entourage, qui est secrète, ignorée, honteuse. La personne proche a une histoire à (se) raconter, un trajet<br />
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