Daniel Kaplan - Portail documentaire du Ministère de l'Ecologie
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160<br />
Les problématiques <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong>s innovations<br />
reconnaissent classiquement plusieurs<br />
modèles <strong>de</strong> propagation relatifs à la « mise en<br />
contact » entre émetteurs et adoptants potentiels :<br />
– la diffusion « par extension » qui s’apparente au<br />
modèle <strong>de</strong> croissance urbaine en « tâche d’huile »<br />
ou la diffusion par « migration » (le foyer d’innovation<br />
se déplace) ;<br />
– la diffusion par « effet <strong>de</strong> contagion », qui<br />
s’effectue progressivement et <strong>de</strong> proches en<br />
proches, ou par « effet d’irradiation », subitement<br />
et à gran<strong>de</strong> échelle,<br />
Ces logiques ou modèles, loin d’être en concurrence,<br />
fonctionnent souvent ensemble, parfois <strong>de</strong><br />
façon séquentielle. La première population, celle qui<br />
va spontanément ou « naturellement » vers ces<br />
innovations est celle concernée par les « effets<br />
d’irradiation » ou qui est dans la proximité directe<br />
<strong>du</strong> foyer d’émission et se trouve rapi<strong>de</strong>ment incluse<br />
dans l’extension <strong>du</strong> processus. Il convient bien sûr<br />
<strong>de</strong> signaler que cette proximité au foyer émetteur<br />
peut être une proximité physique, mesurable en<br />
distance euclidienne, mais cette proximité peut<br />
également être organisationnelle, culturelle, professionnelle,<br />
sociale… On sait par exemple qu’à son<br />
origine, l’ancêtre d’Internet a diffusé dans le mon<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>s laboratoires <strong>de</strong> recherche en contrat avec le<br />
Secrétariat américain à la Défense puis, à partir <strong>de</strong><br />
ce premier cercle, il a conquis le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
chercheurs au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ces premiers laboratoires.<br />
Ces premières populations accè<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s<br />
informations basiques sur l’innovation et n’a pas<br />
besoin <strong>de</strong> médiation particulière, autre que ce qui<br />
fait lien entre elles (une pratique professionnelle, un<br />
intérêt partagé…) pour se transformer en<br />
population d’usagers.<br />
Par contre, l’effet <strong>de</strong> contagion suppose l’intervention<br />
<strong>de</strong> médiations <strong>de</strong> proximité, tandis que le<br />
processus <strong>de</strong> migration constitue une configuration<br />
particulière que l’on a pu observer par exemple au<br />
Japon dans les usages <strong>de</strong> la téléphonie mobile où,<br />
diffusant <strong>de</strong> plus en plus dans les couches populaires<br />
et les catégories d’âge <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 25 ans, elle<br />
commence à se raréfier ou, tout au moins à <strong>de</strong>venir<br />
moins ostentatoire qu’auparavant auprès <strong>de</strong> la<br />
population masculine <strong>de</strong>s cadres dynamiques. La<br />
distinction sociale opère ici un jeu <strong>de</strong> substitution<br />
bien connu qui veut que l’on ne souhaite pas être<br />
assimilé, ni se conformer à l’usage <strong>de</strong>s catégories<br />
sociales que l’on considère « en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong> la sienne ».<br />
Se pose la définition <strong>de</strong>s TIC qui constituent les<br />
« points d’entrée » au regard <strong>de</strong>s problématiques <strong>de</strong><br />
l’innovation. Pour les pays in<strong>du</strong>strialisés, en matière<br />
d’équipement tout <strong>du</strong> moins, il ne s’agit plus, à<br />
l’évi<strong>de</strong>nce, <strong>de</strong> la radio, <strong>du</strong> téléphone, voire <strong>de</strong> la<br />
télévision dont les taux d’équipement par ménage<br />
13 http://www.nua.ie/surveys/how_many_online/europe.html<br />
Emmanuel Eveno<br />
ne sont plus guère significatifs dans la mesure où ils<br />
se sont très largement banalisés. Il faut donc<br />
prendre en compte l’équipement en technologies<br />
plus récentes.<br />
On peut retenir les « équipements<br />
précurseurs » tels que les appelle l’Autorité <strong>de</strong><br />
régulation <strong>de</strong>s télécommunications (ART) dans son<br />
« Rapport sur le marché français <strong>de</strong>s télécommunications<br />
en 1998 » et qui considère essentiellement,<br />
au titre <strong>de</strong> ces « équipements précurseurs » : la<br />
téléphonie mobile et le micro-ordinateur connecté à<br />
Internet. On conçoit assez facilement qu’il est bien<br />
difficile <strong>de</strong> dresser une liste exhaustive <strong>de</strong> ces<br />
« équipements précurseurs » dans la mesure où<br />
nombre <strong>de</strong> ces technologies ou, plus exactement, <strong>de</strong><br />
larges pans <strong>du</strong> marché <strong>de</strong> ces technologies ne se sont<br />
pas stabilisés. On retiendra ici, à l’instar <strong>de</strong> l’ART,<br />
que l’un <strong>de</strong>s premiers objets significatifs <strong>de</strong> ces<br />
équipements précurseurs est le téléphone mobile et<br />
le micro-ordinateur connecté à Internet.<br />
On pourrait également considérer les critères<br />
constitués par la société américaine Merrill Lynch<br />
pour son enquête sur les « Digital Citizens » réalisée<br />
en septembre 1997, et dans laquelle étaient distinguées,<br />
pour i<strong>de</strong>ntifier les figures sociales <strong>du</strong> « Super<br />
connecté » ou <strong>du</strong> « Connecté » , cinq types d’équipements<br />
(ceux qui échangent <strong>de</strong>s e-mails au<br />
minimum trois jours par semaine, qui utilisent<br />
régulièrement l’ensemble (les « Super-Connectés »)<br />
ou au moins trois (les « Connectés ») <strong>de</strong>s quatre<br />
équipements suivants : téléphone cellulaire,<br />
ordinateur portable, beeper/pager et microordinateur<br />
domestique).<br />
2. L’Internet<br />
Sur les usages d’Internet, le plus simple consiste<br />
à travailler à partir <strong>de</strong>s données <strong>du</strong> Nua 13 , on se rend<br />
compte que la situation française est très en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong><br />
ce que connaissent <strong>de</strong>s pays tels que le Canada ou les<br />
États-Unis. Quoique légèrement inférieure, la<br />
diffusion d’Internet en France est cependant<br />
comparable avec celle <strong>de</strong> l’Italie ou <strong>de</strong> l’Allemagne<br />
jusqu’à l’année 1999 et elle est supérieure à celle <strong>du</strong><br />
Portugal ou <strong>de</strong> l’Espagne, toujours à cette époque.<br />
Le graphique ci-<strong>de</strong>ssous (cf. schéma n° 1) retrace la<br />
diffusion sociale d’Internet dans les principaux pays<br />
<strong>de</strong> l’Union européenne, entre 1997 et fin 2001. Pour<br />
chaque pays, nous avons retenu les <strong>de</strong>rnières<br />
données connues pour chaque année.<br />
Les pays ont été classés en fonction <strong>de</strong> leur<br />
score, dans un ordre décroissant. On peut i<strong>de</strong>ntifier<br />
grâce à ce schéma, <strong>de</strong>ux époques bien distinctes. La<br />
première est celle qui va <strong>de</strong> 1997 à 1999. La France,<br />
comme l’Allemagne ou l’Italie, ne font pas partie<br />
<strong>de</strong>s pays où la diffusion d’Internet a été particulièrement<br />
précoce et rapi<strong>de</strong>. On i<strong>de</strong>ntifie en fait <strong>de</strong>ux<br />
groupes <strong>de</strong> pays, les cinq pays qui, fin 1999, avaient<br />
un taux <strong>de</strong> diffusion supérieur à 20 % <strong>de</strong> leur