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chronique des arts et de la curiosité, année 1877 - World eBook ...

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138 LA CHRONIQUE DES ARTS<br />

partenant au D' Sibson, vendue chez MM. Cbris-<br />

tie <strong>la</strong> semaine passée, se composait <strong>de</strong> 176 pièces,<br />

chaque pièce étant un chef-d'œuvre. Les médaillon?<br />

en jaspe bleu ont été vendus ainsi Shakes<br />

:<br />

peare, 420 fr. Garrick, 450 fr. Kemble (l'ac-<br />

;<br />

;<br />

leur), 360 fr. ; sa sœur, M" Siddons, en Muse<br />

tragique, 550 fr. Les médaillons en jaspe rose<br />

étaient encore plus recherchés. Ils ont été vendus:<br />

John Howard, 435 fr. ; Locke <strong>et</strong> Newton, 710 fr.<br />

chacun. Les suivants étaient en noir <strong>et</strong> b<strong>la</strong>nc :<br />

Cromwel, 400 fr. ; D' Priestley, 475 fr. C S.<br />

;<br />

Fox, 600 fr. Les bas-reliefs <strong>et</strong> médaillons encadrés<br />

se sont vendus <strong><strong>de</strong>s</strong> prix énormes, variant <strong>de</strong> l.OûO<br />

à 4.000 fr.<br />

Le plus beau spécimen <strong>de</strong> <strong>la</strong> collection était un<br />

vase en jaspe noir, avec <strong><strong>de</strong>s</strong> anses en serpents <strong>et</strong><br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> tètes <strong>de</strong> Méduse, le front surmonté par Pégase,<br />

d'après F<strong>la</strong>xman, ayant pour ?uj<strong>et</strong> pi'incipal<br />

l'Apothéose d'Homère. Après une longue dispute,<br />

il s'est vendu 18.375 fr.<br />

A <strong>la</strong> même salle <strong>de</strong> vente, M. Stow EUis a obtenu<br />

près <strong>de</strong> ."iOO.OOO fr. pour 286 tableaux. La col-<br />

lection était surtout intéressante en ce qu'elle représentait<br />

<strong>la</strong> carrière artistique du paysagiste<br />

David Cox, <strong>de</strong>puis son début jusqu'à <strong>la</strong> fin.<br />

H y avait <strong>de</strong> chaque époque, presque sans <strong>la</strong>cune,<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> tableaux à l'huile, <strong><strong>de</strong>s</strong> aquarelles, <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

<strong><strong>de</strong>s</strong>sins à <strong>la</strong> sépia, <strong>et</strong> quelques esquisses au crayon.<br />

Tous ont trouvé <strong><strong>de</strong>s</strong> amateurs à <strong><strong>de</strong>s</strong> prix qui<br />

n'accusaient nullement une crise monétaire.<br />

Lionel Robinson.<br />

Les peintures <strong>de</strong> Louis Gal<strong>la</strong>it au Sénat belge<br />

Six <strong><strong>de</strong>s</strong> portraits historiques <strong>de</strong> Louis Gal<strong>la</strong>it<br />

viennent <strong>de</strong> prendre p<strong>la</strong>ce, dans leurs cadres d'acajou,<br />

au Sénat. Ce sont les portraits <strong>de</strong> Charlemagne,<br />

<strong>de</strong> Go<strong>de</strong>froid <strong>de</strong> Bouillon, <strong>de</strong> Jean 11, <strong>de</strong><br />

Thierry d'Alsace, d'Albert <strong>et</strong> d'Isabelle. Les pères<br />

conscrits auront <strong>de</strong>vant eux <strong>de</strong> grands exemples<br />

plutôt que <strong>de</strong> gran<strong><strong>de</strong>s</strong> peintures; mais comme<br />

elles s'accor<strong>de</strong>nt bien avec <strong>la</strong> boiserie, le contentement<br />

<strong><strong>de</strong>s</strong> yeux passera avant les satisfactions <strong>de</strong><br />

l'esprit.<br />

Louis Gal<strong>la</strong>it n'est pas un peintre historien. Sa<br />

vision <strong>de</strong>meure enfermée dans un cercle étroit :<br />

il s'est arrêté au vestiaire <strong>de</strong> l'histoire. Des gens<br />

pour qui l'histoire est un haubert ou un justaucorps<br />

<strong>et</strong> qui jugent l'homme par l'habit, ont naturellement<br />

acc<strong>la</strong>mé c<strong>et</strong>te peinture <strong>de</strong> défroques, savante<br />

surtout dans <strong>la</strong> mise en scène ; individuellement,<br />

chaque comparse parait bien dans son rôle ; mais<br />

c'est le milieu qui <strong>la</strong>isse à désirer. Par milieu,<br />

j'entends, s'il s'agit d'un roi, l'air du règne, <strong>et</strong> s'il<br />

•s'agitd'un peuple, l'espèce <strong>de</strong> buée particulière qui<br />

se dégage <strong>de</strong> lui. La portée du tableau d'histoire<br />

est tout entière dans le surnaturalisme, si essen-<br />

tiellement humain toutefois, qui consiste à souligner<br />

les personnages d'une œuvre par <strong>la</strong> sensation<br />

profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l'époque où il se meut. Le tableau<br />

qui n'ouvre pas une porte sur le passé <strong>et</strong> ne<br />

le rend pas vivant autant qu'une scène du présent,<br />

mais avec <strong><strong>de</strong>s</strong> caractères différents, manque<br />

<strong>de</strong> sens philosophique <strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> haute signification<br />

indispensables à tout ce qui tend à exprimer<br />

l'homme. Leys est <strong>de</strong> tous les peintres f<strong>la</strong>mands<br />

le plus n<strong>et</strong>tement historique ; ses toiles sont <strong>de</strong><br />

l'évocation; il fait revivre par enchantement tout<br />

un coin du passé ; on peut dire qu'il a r<strong>et</strong>rouvé<br />

l'homme ancien sous l'homme mo<strong>de</strong>rne.<br />

Les six portraits représentent donc Charlemagne,<br />

Go<strong>de</strong>froid <strong>de</strong> Bouillon, Jean II, Thierry<br />

d'Alsace, Albert <strong>et</strong> Isabelle. Ils s'enlèvent sur <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

fonds d'or gaufré avec <strong><strong>de</strong>s</strong> harmonies sour<strong><strong>de</strong>s</strong>,<br />

c'est-à-dire qu'au rebours <strong>de</strong> ce qui se fait généralement,<br />

c'est <strong>la</strong> figure qui est <strong>la</strong> <strong>de</strong>mi-teinte <strong>et</strong><br />

le fond qui est <strong>la</strong> c<strong>la</strong>rté. Procédé dangereux qui<br />

tend à éteindre <strong>la</strong> chair au profit du cadre. L'or,<br />

il faut eu convenir, joue ici un rôle commo<strong>de</strong>,<br />

puisqu'il est naturellement éc<strong>la</strong>tant <strong>et</strong> qu'il a permis<br />

au peintre <strong>de</strong> négliger l'eff<strong>et</strong> lumineux <strong><strong>de</strong>s</strong><br />

personnages. A mon sens, les fonds d'or n'ont<br />

pas été faits pour les figures ; ils sont venus<br />

après coup; il est difficile d'adm<strong>et</strong>tre, en eff<strong>et</strong>,<br />

qu'ayant à accor<strong>de</strong>r <strong>la</strong> chair <strong>et</strong> l'or, l'artiste ait<br />

volontairement assourdi les tons <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie. Les<br />

six portraits ont l'air boucané ; Isabelle même,<br />

femme <strong>et</strong> par conséquent peau nacrée, où le sang<br />

<strong>de</strong>vait m<strong>et</strong>tre ses roses, a le visage tanné. Ce<br />

n'est pourtant pas ainsi que Rubens l'a peinte, <strong>et</strong><br />

ses portraits étaient <strong>de</strong> bons modèles à consulter.<br />

Des six portraits du Sénat, le plus vivant, parce<br />

qu'il est le plus familier <strong>et</strong> qu'il rentrait le plus<br />

dans <strong>la</strong> donnée bourgeoise accessible à l'idéal du<br />

peintre, c'est celui d'AlberL Une main sur <strong>la</strong><br />

hanche, <strong>et</strong> tenant dans l'autre un chapeau à<br />

plumes, il appuie le poids <strong>de</strong> son corps sur <strong>la</strong><br />

jambe gauche. La silhou<strong>et</strong>te a l'aisance d'un<br />

homme bien en point, sensuel, amoureux <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

gran<strong>de</strong> vie ; <strong>la</strong> jambe, musclée <strong>et</strong> grosse <strong>de</strong> moll<strong>et</strong>,<br />

s'arcboute un peu sous le corps. Le pourpoint<br />

bosse sur <strong>la</strong> poitrine, noir avec <strong><strong>de</strong>s</strong> réveillons<br />

d'or.<br />

Charlemagne est une figure supérieure <strong>et</strong> compliquée<br />

<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te confusion qui entoure les somm<strong>et</strong>s<br />

du genre humain ; <strong>la</strong> légen<strong>de</strong> se mêle à<br />

l'histoire pour <strong>la</strong> grandir. Ce<strong>la</strong> dépassait l'art <strong>de</strong><br />

Gal<strong>la</strong>it : il a fait <strong>de</strong> Charlemagne une façon <strong>de</strong><br />

Dieu, le père d'atelier, à gran<strong>de</strong> barbe <strong>et</strong> à gros<br />

s-nu-cils, couleur cuir <strong>de</strong> Cordoue. C'est peu pour<br />

c<strong>et</strong> homme qui portait le mon<strong>de</strong> entre ses <strong>de</strong>ux<br />

sourcils. Charlemagne <strong>de</strong>vrait avoir l'air <strong>de</strong> fendre<br />

à coups <strong>de</strong> crâne <strong>la</strong> bordure <strong>de</strong> son cadre. D'une<br />

main il tient un parchemin roulé, <strong>de</strong> l'autre il<br />

appuie sa <strong>la</strong>rge épée en terre ; le mouvement<br />

est mesquin <strong>et</strong> ma<strong>la</strong>droit. Ou ne sent pas non plus<br />

dans les épaules l'habitu<strong>de</strong> du lourd manteau<br />

royal.<br />

bition.<br />

11 y avait là pourtant un noble suj<strong>et</strong> d'am-<br />

Go<strong>de</strong>froid <strong>de</strong> Bouillon indique un meilleur<br />

idéal; il semble tendre l'oreille aux voix <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

prédication <strong>et</strong> il regar<strong>de</strong> le ciel comme s'il le prenait<br />

à témoin d'une gran<strong>de</strong> résolution. L'esprit<br />

enf<strong>la</strong>mmé <strong><strong>de</strong>s</strong> Croisa<strong><strong>de</strong>s</strong> apparaît dans c<strong>et</strong>te<br />

silhou<strong>et</strong>te crispée, dans le mouvement <strong><strong>de</strong>s</strong> bras,<br />

dans l'échevèlement <strong><strong>de</strong>s</strong> cheveux ; c'est l'effarement<br />

mystique mêlé à <strong>de</strong> <strong>la</strong> détermination ; un<br />

pas <strong>de</strong> plus, <strong>et</strong> le héros sera sur sou cheval, le<br />

g<strong>la</strong>ive en main, faisant tête , aux infidèles. Malheureusemeut<br />

l'or sertit durement les gris ardoisés<br />

du portrait ; ce qu'il y a <strong>de</strong> discr<strong>et</strong> dans le<br />

procédé <strong>de</strong>vient <strong>de</strong> <strong>la</strong> brutalité dans le voisinage<br />

du cru <strong>de</strong> l'or.

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